La Dieudonnite

Cette semaine, la France entière souffre de dieudonnite, on ne parle que de l'(ex-?) humoriste dont les spectacles, disent les médias, attirent quelques centaines de personnes quatre fois par semaine, sans publicité.  Enfin les médias disent « sans publicité » tout en faisant de la publicité, il serait donc plus avisé de dire « sans budget publicitaire ».
Dans un très mauvais sujet documentaire de BFM, j’ai vu une ancienne organisatrice des tournées de Dieudonné expliquer que ce qui remplissait les salles, c’étaient les plaintes et les protestations de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme : chaque fois qu’ils réclament par voix de presse au maire d’une commune d’empêcher le spectacle de se tenir, le nombre de réservations explose.

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Aujourd’hui, dans le Parisien/Aujourd’hui-en-France, Manuel Valls prend position et explique qu’il compte faire tout ce qui est en son pouvoir pour interdire les spectacles de Dieudonné car ceux-ci, dit-il, troublent l’ordre public et appellent à la haine.
Or en face de ces accusations évidemment graves, on ne nous dit pas grand chose des propos de Dieudonné. Il a chanté « Shoah Ananas » sur l’air de « Chaud Cacao », ce qui lui a valu une condamnation à 30 000 euros d’amende. Il aurait inventé la « quenelle » (un geste dont les spécialistes se battent pour savoir s’il est « antisystème » ou « antisémite »), et il s’en est pris au journaliste Patrick Cohen en disant (cité par Le Monde) : «Moi, tu vois, quand je l’entends parler, Patrick Cohen, j’me dis, tu vois, les chambres à gaz… Dommage.» — on est tout de même forcé de noter que ce trait d’humour qu’on peut juger de mauvais goût n’est que la reprise d’un sketch d’Élie et Dieudonné et1 fait suite à une séquence diffusée par la cinquième chaîne où le dénommé Patrick Cohen expliquait à Frédéric Taddéï quelles personnalités devaient être mises sur liste noire dans les médias : Alain Soral, Marc-Édouard Nabe, Tariq Ramadan et Dieudonné2.
Une affreuse mécanique fait que les paranoïaques finissent toujours par avoir raison, et les responsables des associations de lutte contre le racisme, autant que Dieudonné, n’échappent pas à la règle : les premiers sont attentifs au moindre frémissement d’antisémitisme, et vont chercher le retour du nazisme dans la moindre réflexion suspecte, ou prêtent parfois même d’office un antisémitisme caché ou inconscient à tous ceux qui ne sont pas juifs, ou même parfois à des juifs qui ont le malheur de critiquer l’extrême-droite israélienne. Le second se voit en martyr, victime de censure et de tracasseries juridiques diverses. Il y a quinze ans, Dieudonné était encore un excellent acteur et un grand humoriste. Il lui arrivait régulièrement de s’en prendre à toutes les religions, qu’ils qualifiait d’escroqueries, et ses sketchs pouvaient avoir une pertinence politique salvatrice. Avec le temps, pourtant Dieudonné semble effectivement être devenu obnubilé par les juifs, et les associations de lutte contre l’antisémitisme semblent symétriquement obnubilées par Dieudonné, lui prêtant les plus affreux desseins et prenant au premier degré la moindre réponse provocatrice aux accusations (souvent outrancières au départ) qu’elles ont elles-mêmes émises.

Entre temps, Dieudonné se fait des amis, et puisqu’il est qualifié d’antisémite, il devient une référence pour l’extrême-droite (qui, il y a trente ans lui aurait sans doute trouvé la peau trop sombre — curieuse forme de progrès) autant que pour ceux qui se sentent concernés par l’invisibilité des « minorités visibles » dans la vie publique (et leur sur-représentation négative dans le débat public), par l’histoire de la traite négrière ou par la façon dont les Palestiniens sont traités par Israël, et qui ont l’impression (parfois fondée, pour des raisons que l’histoire récente explique assez bien) que certaines tragédies sont mieux médiatisées que d’autres, ou que certains sujets sont plus tabous que d’autres.

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Pour ma génération en tout cas, la Seconde Guerre Mondiale n’est pas si éloignée dans le temps, et les camps de concentration nazis restent le summum de ce qu’on nomme, quoique spécifiquement humain3, « l’inhumanité », et ce d’autant plus que cet épisode abominable de l’histoire humaine a été le fait de pays réputés modernes. Pour moi, et sans doute pour bien d’autres, la Shoah n’est pas qu’une tragédie de l’histoire juive, c’est aussi une tragédie dont la portée est universelle : des humains qui aimaient leurs chiens, qui aimaient la littérature, la belle peinture et la grande musique, ont voulu faire disparaître d’autres humains, des humains qui parlaient la même langue qu’eux, qui vivaient avec eux, et cela sur la foi de théories anthropologiques absurdes et d’une méfiance millénaire.
L’idée d’amoindrir, d’excuser, de relativiser pareille horreur est insupportable.
J’imagine que c’est ce sentiment d’horreur qui pousse certains à souhaiter qu’on fasse taire Dieudonné, mais ceux-là, les censeurs, ont à mon avis bien tort.

Il existe des lois précises en France : l’appel au meurtre, l’expression publique de la haine, l’injure ou la calomnie sont autant de délits encadrés par la loi. Même la négation de crimes contre l’humanité est punie par la loi4.
Dieudonné et ses contradicteurs le savent bien puisqu’ils se retrouvent fréquemment devant des tribunaux à ce titre. Alors surveiller ce qui est exprimé pendant les spectacles de Dieudonné et le condamner lorsque c’est mérité devrait suffire, pourquoi faudrait-il en plus appeler à la censure ? Au boycott par les municipalités ?
Les gens n’aiment pas beaucoup qu’on décide à leur place de ce qu’ils ont le droit d’entendre, car ils ont généralement la prétention de se faire une opinion par eux-mêmes5. Il est un peu insultant de les traiter comme des enfants débiles qui deviendraient subitement nazis parce qu’un britanno-camerounais remet sur scène un « prix de l’infréquentabilité » (pourtant bien mérité, non ?) à Robert Faurisson.
De fait, les témoignages de spectateurs que j’ai pu entendre sont plutôt que l’on rit du début à la fin de ses spectacles et que personne n’y est épargné.
Est-ce que Dieudonné joue juste à l’idiot qui ne supporte pas qu’on l’oblige à respecter le caractère sacré de la Shoah ? Est-ce qu’à force de jouer, il est devenu sérieux ?  Est-ce qu’il est embrigadé par un mouvement sectaire ? Est-ce que son engagement pour les Palestiniens s’est transformé en haine antisémite ? Et comment lui pardonner d’avoir défendu la décision de la justice iranienne de condamner une femme adultère à mort ?
Le second degré du message de l’humoriste était plus franchement perceptible à l’époque où, sur leurs affiches, le noir Dieudonné portait une cagoule du Klux Klux Klan tandis que son ami et associé le juif Élie Semoun s’habillait en SS.
Mais il sera difficile de savoir à quoi s’en tenir sur ce qu’il pense vraiment si on ne lui pose pas la question et si on ne le laisse pas parler.

...

Comment expliquer à un musulman que le même Richard Malka qui a défendu les caricature de Mahomet au nom de la liberté d’expression réclame à présent qu’on retire à Dieudonné sa liberté d’expression au nom d’un antisémitisme présumé ? L’article de l’avocat dans le Huffington Post est à peine croyable : le titre associe Dieudonné au journal Minute et à Alain Soral, mais ne cite à aucun moment de propos de l’humoriste qui puisse justifier une telle association. Dieudonné n’apparaît explicitement que dans le titre de l’article.

Certaines vidéos de Dieudonné ont de quoi mettre mal à l’aise, moins par ce qui y est dit que parce qu’il est impossible de ne pas voir qu’elles ont une cible obsessionnelle. Quand Dieudonné s’en prend à son ami Élie en lui demandant « ce sont tes origines qui te montent à la tête ? » ou affirme que les dirigeants de la France ne rendent de comptes qu’à Israël, il s’inscrit dans la tradition de la pire presse antisémite, avec ses sous-entendus rances et sa manière fourbe de désigner des cibles.
Mais imaginons que ce soit une forme tordue d’humour au quinze-millième degré, causée par l’insoumission, le refus des tabous ou le goût de la provocation du personnage, imaginons… Il restera toujours un gros problème à Dieudonné : la manière dont il est entendu par ses propres amis. Car pour avoir discuté avec deux ou trois soutiens acharnés à Dieudonné, sur Twitter, je n’ai pas senti une bienveillance antiraciste bien affirmée, mais au contraire, la revendication d’une revanche assez agressive envers les Juifs qui bénéficieraient d’un traitement médiatique à part :

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Je vous épargne le reste de l’échange, pas spécialement cordial…

Les commentaires qui concernent Dieudonné, sur Youtube ou à la suite des articles de presse qui le concernent, sont d’une teneur souvent agressive, parfois franchement haineuse, que ce soit pour le défendre ou pour l’attaquer, d’ailleurs.
Certains réfutent l’antisémitisme de Dieudonné avant d’affirmer, en substance, que cette réputation non méritée est le fait d’un complot juif6…. Hmm…

Au sujet de Dieudonné, j’ai lu souvent ses soutiens citer cette phrase attribuée à Voltaire et qu’on lit souvent aussi chez les complotistes américains : « Pour savoir qui vous dirige vraiment, il suffit de regarder ceux que vous ne pouvez pas critiquer ». Le sous-entendu est clair : on ne peut pas rire de la Shoah en France, donc la France est dirigée par les juifs. En fait, Voltaire n’a jamais écrit une telle phrase, lui qui s’en prenait à la monarchie absolue et donc à un pouvoir qui n’avait rien de particulièrement occulte7.

Il est assez pathétique que, dans une période de progrès scientifiques et techniques accélérés, à une période où l’on peut connaître l’histoire mieux que jamais, des gens s’obstinent à faire des concours d’identification à des martyrs passés ou exotiques, souvent en prélude à une revanche haineuse, en se réclamant de concepts ineptes tels que la race, les frontières, ou la fidélité à des divinités ombrageuses dont la seule bonne action avérée est de n’avoir jamais existé effectivement.
Mais il faut l’accepter.
Laisser parler, c’est s’autoriser la possibilité d’une réponse. Et c’est important car on ne combat pas un mensonge ou une erreur en les faisant taire, ou en les forçant à être chuchotés, sous-entendus, mais en leur opposant, sinon la vérité, du moins des contre-arguments et un autre point de vue.
Tout le monde n’est pas capable d’imaginer que, en étant correctement informé, on finit forcément par réfléchir correctement. Je comprends cette défiance, mais je ne vois pas en quoi un refus d’information serait l’assurance de mieux.

  1. « J’comprends Cohen, c’est qu’en 45, les « boches », ils auraient pu finir le boulot ! Cohen » (Cohen et Bokassa, 1991). []
  2. Lire : La liste de Patrick Cohen, par Daniel Schneidermann, Libé du 17 mars 2013. []
  3. On parle souvent d' »inhumanité » pour qualifier des faits qui n’existent chez aucune autre espèce animale autre que l’humain. Cf. Cet article, sur le sujet des machines et de l’humain. []
  4. Ce qui pose quelques problèmes de hiérarchisation des abominations, d’une part, et de censure du travail des historiens d’autre part. Lire la tribune Laissons parler les imbéciles (Libé, 19/12/2013), qui explique pourquoi il est absurde et dangereux de demander au juge de rétablir le bon sens. []
  5. Quand on appelle à la censure, ce n’est jamais pour se protéger soi-même de la propagande, mais parce que l’on croit que d’autres ne sauront pas avoir autant de discernement que nous… []
  6. Un jour, un homme qui visite un asile de fou rencontre un interné qui le convainc qu’il est sain d’esprit, qu’il se trouve là par erreur, et lui demande de tout faire pour l’aider à sortir. Le visiteur promet, mais, alors qu’il s’est éloigné de quelques mètres, reçoit une brique derrière la tête. Il se relève, à demi assommé, et voit l’homme avec qui il venait de discuter, qui lui a envoyé la brique, qui l’interpelle à nouveau : « vous n’oublierez pas de leur dire que je ne suis pas fou, hein ! ». []
  7. Il est assez piquant que deux cent ans plus tard Voltaire reste un enjeu idéologique, entre ceux qui l’accusent d’avoir été esclavagiste, antisémite, islamophobe, et ceux qui lui inventent des citations diverses et variées censées être prémonitoires ou révélatrices de complots… Lire aussi : Rallumer les Lumières. []

24 réflexions sur « La Dieudonnite »

  1. Ardalia

    Et tout ça — cette inflammation brutale que j’ai découverte avec surprise hier en revenant de villégiature — parce que Manuel Valls, crapoté par ses actes et propos sur les Rroms, veut se refaire une virginité de gauche… Tout est bon pour le politique, même — ou surtout ? — l’absurde.

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  2. El Gato

    Ce que l’on nous rapporte des propos de Dieudonné me semble violent à souhait surtout que je ne vois aucune raison de le prendre autrement qu’au premier degré quand j’entends Dieudonné.
    Bon en même temps je ne vois pas trop ce que pourrait faire Valls pour le censurer.
    On est à priori en France condamné pour ses propos, pas pour les propos que l’on pourrait éventuellement tenir si l’on n’était pas censuré. Ce qui en dehors du fait-divers Dieudonné me semble plutôt rassurant sur l’état de notre démocratie.
    Ardalia a sans doute raison.

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    1. Jean-no Auteur de l’article

      Apparemment, dans ses spectacles (du moins jusqu’encore récemment), Dieudonné se moque de tout le monde (y compris par exemple de Faurrison, qu’il a fait pourtant monter sur scène). Il faudrait donc voir les spectacles entiers pour se faire une idée sur leur contenu idéologique véritable.
      En revanche, les vidéos Youtube que j’ai visionné ne sont pas très ambiguës, et ne se moquent pas, ne sont pas très drôles en sont franchement centrées sur les juifs.

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  3. ianux

    Merci pour ce billet qui soulève nombre de questions que je me pose moi-même.

    Je commencerai par dire que je ne m’intéresse pas spécialement à Dieudonné. Je sais juste que le duo qu’il formait avec Élie me faisait bien rigoler, tout comme les quelques sketchs que j’ai pu voir du début de sa carrière solo. Et même – horreur suprême – celui qui lui a apparemment valu sa mise à l’index des médias, à savoir son sketch du rabbin nazi dans l’émission de Fogiel. Je l’ai vu en direct, j’ai beaucoup ri de son irrévérence et je n’avais alors aucune idée d’une dérive antisémite de l’humoriste.

    Je ne m’estime bien sûr pas antisémite. En fait lorsque j’ai découvert – tardivement – cette idée, son ancrage millénaire dans la culture européenne, j’ai regardé autour de moi et j’ai estimé que la Shoah et son enseignement avaient joué leur rôle, l’antisémitisme avait pour moi totalement disparu de la société française. Je suis désolé de constater m’être trompé, une vingtaine d’année plus tard.

    Pour autant, par exemple, je ne comprends pas comment on peut condamner, ne serait-ce que pécuniairement, le fait de chanter « Shoah nana ». C’est bien sûr pas drôle, de mauvais goût, bête et méchant, et sans doute blessant. Mais je ne vois pas en quoi cela ressortirait de la provocation à la haine antisémite (j’imagine que c’est le motif qui a permis la condamnation, c’est encore moins une négation de génocide). On connaît tous des blagues avec des rabbins, voire même des blagues qui se passent dans les camps de concentration. Et si ça se trouve, on en rigole, même. La grande mode dans les années 80, c’était « y’a un arabe dans un avion… ». Personne n’oserait les ressortir aujourd’hui.

    Les défenseurs de Dieudonné font énormément le parallèle avec Desproges (bien que ce ne soit clairement pas le même public), et ce n’est pas complètement faux à mon avis. Desproges faisait beaucoup de blagues sur les juifs, mais on ne pouvait décemment pas le taxer d’antisémite (en quel honneur, d’ailleurs ?), donc ça allait, on pouvait rigoler. Mais je ne comprend pas l’argument. On nous serine que juger que Voyage au bout de la nuit est un chef-d’œuvre ne fait pas de nous des antisémites. Alors pourquoi regarder le doigt quand on nous montre la lune ? Si une blague juive me fait rire, je me fous que son auteur soit antisémite ou pas, moi je ne le suis pas. J’ai ri au sketch du rabbin nazi, mais « Shoah nana », ça ne me fait pas marrer. De plus, l’argument Desproges montre pour moi qu’on est justement devenu beaucoup plus frileux. Qui pourrait dire sur scène, en 2013 2014, pour faire rire, sans mauvaise pensée :
    Je suis fier d’être citoyen de ce beau pays de France où les juifs courent toujours.
    ou encore
    Le docteur Petiot, c’est ce médecin parisien qui a démontré en 1944 que les juifs étaient solubles dans l’acide sulfurique.

    Quant à la quenelle, il me parait difficile de prouver que c’est un geste antisémite. Certes, son inventeur l’est clairement devenu, mais les centaines de gens qui se prennent en photo faisant ce geste ne le sont sans doute pas. Néanmoins, après une telle médiatisation, il parait maintenant difficile de « glisser une quenelle » en toute innocence, comme un simple signe de protestation.

    Je suis d’accord avec toi pour dire qu’interdire les spectacles de Dieudonné est contre-productif et ne fera que le conforter dans son rôle de martyr et lui rallier encore plus de sympathisants, en geste de défis contre les puissants. D’autant plus que Manuel Valls ne me parait pas totalement neutre dans cette affaire. N’a-t-il pas eu le malheur de déclarer publiquement je suis lié de manière éternelle à la communauté juive et à Israël ? Il n’était certes pas ministre de l’intérieur à ce moment-là.

    Enfin, une réflexion anecdotique : j’ai réalisé récemment que Toto était un prénom italien, et que les inénarrables « histoires de Toto » qui ont bercé (et sans doute bercent encore) notre enfance et mettant en scène un jeune benêt trouvaient sans doute leur origine dans l’immigration italienne, pauvre et peu éduquée, de l’entre-deux-guerre. Dès lors, blague de Toto = blague raciste xénophobe qui s’ignore ? Sans parler des histoires belges, de bonne guerre assurément…

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  4. El Gato

    Les mots tuent, hier comme aujourd’hui. (La radio des mille collines)
    La comparaison avec Desproges me semble absurde, parce qu’il reprenait les fantasmes racistes ou fachos pour mieux les ridiculiser, là où Dieudo leur donne une nouvelle jeunesse. (Je cherche toujours ne serait-ce que l’ombre d’un deuxième degré chez Dieudo.) Je ne me rappelle pas que Desproges ait été l’idole des antisémites les plus radicaux. Même les plus bas de plafond avaient réalisé qu’il ne fallait pas prendre ses propos au premier degré.
    Qu’il fasse des vannes sur Faurisson ne change rien à la violence de son antisémitisme. Je ne pense pas, pour paraphraser Godard, que 5′ pour Hitler, 5 ‘ pour les juifs, serait la preuve que vos propos ne sont pas une incitation à la haine raciale, mais un brevet d’humorisme « impartial ».

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    1. Jean-no Auteur de l’article

      L’intérêt de l’humour réside souvent dans l’incertitude…
      Desproges est l’idole des fachos aujourd’hui, en tout cas, et beaucoup prétendent à présent qu’il était « anar de droite ». De même, j’ai eu un petit choc en découvrant que le second degré de Coluche, censé s’en prendre aux « beaufs racistes », avait cette catégorie pour fans. Je ne compare pas au Dieudonné actuel, mais le Dieudonné d’il y a vingt ans jouait le raciste, l’antisémite, pour se moquer du racisme et de l’antisémitisme. Personnellement, ça m’intéresse et ça m’effraie, j’ai envie de comprendre comment on passe du Dieudonné d’il y a vingt ans à celui d’aujourd’hui. Et ce n’est sûrement pas en envoyant des « antifas » devant les portes des théâtres qui l’accueillent qu’on risque de comprendre.

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  5. El Desichado

    Personnellement, ce qui m’inquiète c’est que des gens auxquels je tiens et qui n’auraient pas une culture suffisante (mes enfants par exemple) puissent assister aux genre de propos que tiens Dieudonné en pouvant penser que c’est de l’humour.
    L’État (i.e. nous) proscrit ce genre de propos, ça c’est un fait.
    Pour le reste je laisse désormais cet ex-excellent humoriste dans ma plus totale indifférence.

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  6. Wood

    Quelques trucs en vrac, comme à mon habitude :
    – cet article très détaillé pour comprendre les tenants et les aboutissants du phénomène Dieudonné : La Dieudonnisation des esprits
    – cette réflexion de Noam Norkhat l’autre jour en quelques tweets : 1, 2, 3 : quand vous créez un nouveau compte Google, vous êtes par défaut abonnés à la chaîne Youtube de Dieudonné.
    – il suffit de ré-écouter Desprosges : « on me dit que des Juifs se sont glissés dans la salle » pour réaliser que c’est des antisémites qu’il se moque, et non des Juifs. Ceux qui le citent à tort et à travers ne doivent pas l’écouter souvent. Heureusement qu’il n’est plus là pour entendre ça.
    – la dérive antisémite de Dieudonné viendrait, dit-on de sa déception suite à l’échec de son projet de film sur le Code Noir et la traite des esclave, alors qu’on peut faire tous les films qu’on veut sur la Shoah. Ce n’est pas tout à fait faux, et ça vaut la peine de se demander ce qui fait la différence entre ces deux tragédies dans l’esprit des Français : Si pour la Shoah on peut dire « c’est pas nous, c’est les Nazis qui nous ont forcé », pour la traite des Noirs on n’a pas la même excuse. De même s’il y a eu des procès du nazisme et de la collaboration, il n’y a jamais eu de procès de la traite des noirs, et ceux qui s’étaient enrichi par l’esclavage n’ont pas eu à rendre leur fortune lors de l’abolition. Au Contraire c’est Haïti qui a dû payer une rançon à la France en dédommagement des propriétaires de plantations spoliés de leur revenu.

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    1. Jean-no Auteur de l’article

      @Wood : La production cinématographique française est frileuse et on attend encore un grand film sur la traite négrière. J’en connais un petit, Case départ (2011), de Thomas Ngijol, avec lui-même et Fabrice Éboué. C’est une comédie fantastique : projetés au XVIIIe siècle, les deux gars doivent régler les problèmes de leurs ancêtres pour retrouver le présent. Éboué joue un ambitieux un peu collabo qui accepte les vannes racistes du maire de sa ville par ambition, tandis que Ngijol interprète un gars révolté qui voit du racisme dans chaque reproche (parfois très fondé) qu’on lui fait. Pas un chef d’œuvre, mais intéressant dans le débat. Bien sûr, ça a pu exister des années après la tentative de Dieudonné. C’est vrai qu’il y a un problème, toute une histoire à penser, mais on progresse : on voit de plus en plus des acteurs d’origine africaine jouer autre chose que des rôles de basanés de service, on a eu le documentaire Noirs en France, et puis il y a quelques années le travail de Pétré-Grenouilleau sur l’histoire de la traite (pas toujours bien vu car il parle aussi de la traite arabe, qui est assez taboue aussi).
      Mais s’allier aux gens qui défendaient le racisme colonial contre les juifs ne répare pas grand chose, c’est absurde. Enfin c’est pas à toi que j’ai besoin de le dire, mais quand même.

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    2. Sylvain

      Cet article est de loin le plus intéressant que j’ai lu à ce sujet. Il me rappelle presque que la presse ne devrait pas être là pour donner des réponses mais pour poser des questions, au même titre qu’un humoriste, selon moi. Mais veut-on que l’on réfléchisse ?
      Je ne pourrais jamais vraiment savoir s’il est antisémite ou pas. Mais je trouve qu’il a soulevé une question intéressante, celle du favoritisme dans le pays de l’égalité et de la fraternité. C’est pas nouveau me direz-vous, m’enfin on est au 21ème siècle non ?
      Et puis ça me gave la censure (dans le pays de la liberté pour finir ce que j’ai commencé plus haut) , y a rien de pire pour donner du pouvoir aux extrémistes.
      Au final ce que je vois, ce sont des clowns (tous) qui se donnent en spectacle pendant qu’on nous met effectivement une tripotée de belles quenelles.
      Alors voyez, moi, je préfère en rire.

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      1. Jean-no Auteur de l’article

        @Sylvain : la presse répond plutôt que de laisser des questions ouvertes, mais je pense que ce n’est pas forcément que de sa faute, je pense que c’est ce qu’attend le public, qui veut des affirmations vis à vis desquelles se positionner ou, s’il n’a pas le temps, auxquelles souscrire par habitude (je ne connais pas le sujet mais je suis généralement d’accord avec tel journal donc il doit avoir raison).

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  7. Ashlesha

    « Et comment lui pardonner d’avoir défendu la décision de la justice iranienne de condamner une femme adultère à mort ? »
    > Vous parlez de l’affaire Sakineh? Les médias occultent souvent le fait qu’elle aurait été complice d’assassinat de son mari et que ce serait la raison de sa condamnation et non l’adultère. Il y a eu beaucoup de remous médiatique à ce sujet (par le biais de BHL), après bien sûr que la peine de mort peut être discutée, mais alors étendons la question au monde entier.
    Voici ce qui est dit sur la page Wikipedia de Sakineh Mohammadi Ashtiani (http://fr.wikipedia.org/wiki/Sakineh_Mohammadi_Ashtiani) :
    « L’humoriste Dieudonné est parti le 12 septembre 2010 à Téhéran pour démander clémence pour Ashtiani. À son retour à Paris, il a tenu une conférence de presse dans laquelle il a dénoncé une manipulation de Bernard-Henri Lévy et a invité les signataires de la pétition à exiger des explications tout en confirmant que, selon le contenu du dossier qu’il aurait pu consulter, l’intéressée serait bien coupable de meurtre et n’a jamais été condamnée à mort par lapidation d’autant plus que la lapidation a été abolie depuis la révolution islamique. »

    Dieudonné a donc bien demandé clémence pour Sakineh.
    Pour le reste, de même que Dieudonné s’en prend au gouvernement américain et non aux américains quand il fait des sketchs sur l’intervention en Irak ou le Génocide indien, l’humoriste s’attaque non pas à l’ensemble d’un groupe religieux (de toute façon pour lui l’humain prime avant toute appartenance éthnico-religieuse) mais à la politique israélienne et aux institutions comme le Crif en France ou l’AIPAC aux États-Unis, qui instrumentalisent la Shoah pour culpabiliser les gouvernements et les amener à défendre les intérêts d’un pays étranger avant ceux des peuples qui les ont élu. Et c’est ça qui énerve au plus haut point Manuel Valls.
    Conseil lecture : « Egalité Zéro – Enquête sur le procès médiatique de Dieudonné » écrit par Olivier Mukuna.

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    1. Jean-no Auteur de l’article

      @Ashlesha : l’article sur Sakineh dans Wikipédia, puisque vous le prenez pour référence, parle d’aveux faits sous la torture, de chefs d’accusation changeants,… Mais peu importe, quelle est la pertinence de l’intervention de Dieudonné ? Son anti-américanisme l’amène à trouver parfait tout ce qui vient d’Iran. Je ne fais pas partie des gens pour qui l’Iran est l’axe du mal : c’est un grand pays, avec une longue histoire, qui n’a pas déclenché de guerre depuis des siècles (mais le fait d’en faire la menace en permanence n’aide pas spécialement la paix dans la région),… C’est aussi une dictature, et aller, en tant que citoyen, valider (avec des larmes de crocodile) les condamnations arbitraires d’une dictature n’est pas un rôle très digne pour Dieudonné. Comment peut-on défendre ça ?
      Maintenant, je suis le premier à dire (c’était le but de l’article) qu’il faut juger les gens sur ce qu’ils disent, pas sur ce qu’on pense qu’ils pensent. Même si Dieudonné semble de plus en plus clairement paranoïaque. Je ne pense pas que la question soit religieuse, pour Dieudonné. J’ai peur que ça soit bien pire.
      La question des intérêts d’Israël est bien mal comprise. L’intérêt d’Israël est de survivre, mais la manière dont les US ou les dictatures voisines instrumentalisent Israël, en font un pion de géopolitique ou de politique intérieure, fait courir un risque vital à ce pays minuscule. Israël ne maîtrise pas grand chose, et vit dans la peur depuis que, le jour de sa fondation, il a été attaqué par les pays voisins. Le Crif, et autres, n’ont pas le sens commun, ils pratiquent l’intimidation (y compris envers les juifs qui s’opposent à la maltraitance des Palestiniens, et ils sont nombreux), instrumentalisent la Shoah, tout ça est vrai, mais ça va coûter très cher à tout le monde, puisqu’aujourd’hui on répond à des injustices sociales et au racisme anti-arabes par des références odieuses et décomplexées à la Shoah… Comment est-ce que ça pourrait bien finir ? Dieudonné aura une responsabilité à assumer, et il ne pourra pas s’abriter derrière l’humour.

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      1. Ashlesha

        Votre réponse est intéressante et je suis à peu près d’accord avec vous. Concernant l’implication de Dieudonné dans l’affaire Sakineh, je me pose toujours la question de son utilité, si ce n’est de contrer Bernard Henri Levi. En tout cas, a t-elle été lapidée comme l’annonçait BHL ou bien la lapidation n’est-elle plus pratiquée comme le prétend Dieudonné ? Personnellement je ne connais pas la fin de l’histoire. Quoiqu’il en soit il est difficile de ne pas penser que le combat de BHL en faveur de Sakineh n’avait pas un objectif politique, tout comme son voyage en Libye par la suite.

        « Dieudonné aura une responsabilité à assumer, et il ne pourra pas s’abriter derrière l’humour. » > Vous dites que l’humoriste aura une responsabilité à assumer dans l’hypothèse où les choses tourneraient au vinaigre pour Israël. Ne serait-ce pas lui prêter une influence qu’il n’a pas? OK, il est populaire en France et c’est par lui que certains ont accès à la problématique de l’instrumentalisation de la Shoah par le Crif (ce qui ne serait pas le cas si les journalistes faisaient leur job), mais en quoi Dieudo est responsable du fait qu’Israël est « un pion de géopolitique ou de politique intérieure » ?

        Perso je pense que Dieudo pose plus de questions qu’il ne donne de réponses, et c’est surement une partie de son succès. Je pense qu’il révèle les failles de la société et que sa manière d’en rire permet de laisser s’échapper un peu de vapeur à la cocotte minute. C’est son job d’humoriste. Pour « les réponses », il imite parfois dans ses sketchs des fans venant vers lui en lui disant « Dieudo guide nous vers la lumière ». Et lui leur répond de se démerder.

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        1. Jean-no Auteur de l’article

          BHL fait de la politique et de la morale moralisatrice à deux sous. Il fait ça depuis près de quarante ans, et il a commencé en s’en prenant à Gilles Deleuze sur un mode particulièrement injuste, ce qui le disqualifie à mon sens en tant qu’intellectuel. Je n’attends rien de lui, donc, mais je vois mal pourquoi je devrais choisir entre Dieudonné et BHL ! Je trouve l’un et l’autre également lamentables. Il existe un petit rapport, en tout cas : chacun se porte en quelque sorte caution dans des conflits. Ce n’est pas BHL qui a provoqué la chute de Kadhafi, mais il s’est fait la caution morale de l’attaque par la France. Les implications sont pour l’instant moins graves, mais en s’affichant avec Soral, Le Pen, Faurisson, de quoi Dieudonné se fait-il la caution ?

          En parlant de responsabilité à assumer, je ne parlais pas du destin d’Israël, mais plutôt des violences qui peuvent se produire ici, en France, entre « communautés » (doit-on se résoudre à accepter qu’il existe plusieurs types de Français, aux droits & devoirs différents ? C’est l’enjeu de ce mot).

          Poser des questions, c’est très bien. Mettre les gens dans une position intellectuelle inconfortable, les faire réfléchir avec des propos ambigus, pourquoi pas. Mais parmi les soutiens à Dieudonné, on trouve des gens qui ne se posent plus de questions et qui ne sont plus ambigus depuis longtemps, et l’extrême complaisance du « comique » face à des fascistes assumés (comment qualifier autrement ceux qui partent poser en faisant des « quenelles » devant Auschwitz-Birkenau ?) est plutôt le signe que l’obsession envers les juifs dont fait preuve Dieudonné n’est plus du second degré depuis longtemps.

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          1. Ashlesha

            Tout à fait d’accord avec votre avis sur BHL.
            « je vois mal pourquoi je devrais choisir entre Dieudonné et BHL » > Tout à fait, et personne ne demande de choisir entre l’un et l’autre. Je vois la démarche de Dieudonné comme un croche-patte à la médiatisation de l’engagement de BHL en faveur de Sakineh. Une volonté de rééquilibrage du traitement médiatique, l’un par les médias meanstream, l’autre par Internet. Et en disant ça je ne dis pas que l’humoriste a eu raison, comme je ne suis pas d’accord avec son apparente clémence envers la Russie uniquement sous prétexte qu’ils sont bannis par l’Empire US. Son régisseur Jacky (récemment agressé) parle aussi de ce désaccord dans une récente vidéo.

            « Les implications sont pour l’instant moins graves, mais en s’affichant avec Soral, Le Pen, Faurisson, de quoi Dieudonné se fait-il la caution ? »
            > La caution de la liberté d’expression non ?

            Concernant son « fricotage » avec l’extrême droite, Dieudo n’a jamais appelé à voter FN tout d’abord. En 2012, il invité les gens à voté pour une chèvre, « Biquette ». Pour ce qui est de sa visite au meeting de J.M. Le Pen en 2007, cela entrait dans sa démarche de débattre avec tous, se battre pour que chacun puisse s’exprimer sans forcément être d’accord avec l’autre, se rendant compte que la censure était contre-productive. Suite à son sketch chez Fogiel en 2003, il s’est vu diabolisé et boycotté par les médias, par la suite il s’est même fait agressé. C’est à ce moment là qu’il a décidé d’aller à la rencontre des « pestiférés » des médias, dont des gens d’extrême droite en effet. Comme on peut le lire dans ses interviews sérieuses (dont celle-ci d’Olivier Mukuna : http://www.femmesdechambre.be/dieudonne-je-veux-aller-en-prison/), il explique que les grilles de lecture droite/gauche, chrétien / juif / musulman n’a pas de sens et n’est qu’un moyen de diviser les gens. Cette même logique l’amène à s’intéresser à l’humain libéré de toute idéologie et croyance, ce qui explique son rejet de tout communautarisme qui sépare au lieu d’unir. C’est aussi cette difficulté à lui coller une étiquette qui déstabilise les journalistes encore formatés par un logiciel désuet. Les gens qui vont voir ses spectacles sont généralement non politisés.
            Maintenant concernant ses « relations », y a le cas Alain Soral, essayiste, ex-communiste et ex-frontiste. Il se qualifie comme étant à droite des valeurs et à gauche du travail et prône la réconciliation nationale. J’ai lu son bouquin « Comprendre l’Empire » et son dernier écrit avec Eric Naulleau, malgré un fort égo ses analyses de la société sont souvent intéressantes, bien que je lui préfère celles de Michel Collon. L’approche soralienne est plutôt « traditionnaliste » et nationaliste sans être racialiste, on lui reproche de faire une fixation sur Israël et le sionisme, cependant dans ses vidéos (celles que j’ai vu en tout cas), il fait bien la distinction entre le « juif du quotidien », le petit peuple d’Israël qu’il voit comme une victime sacrifiée par son gouvernement. Et ça s’apparente à ce que vous dites par – je vous cite – « Le Crif, et autres, n’ont pas le sens commun, ils pratiquent l’intimidation (y compris envers les juifs qui s’opposent à la maltraitance des Palestiniens, et ils sont nombreux), instrumentalisent la Shoah ».
            En ce sens, on pourrait y voir aussi une forme de pédagogie, limitant les risques d’actes antisémites par la distinction entre sionistes / juifs.
            Je suis sûr d’ailleurs que des gens ont découvert des juifs antisionistes comme Jacob Cohen (« Le printemps des Sayanims ») ou les Neturei Karta via Soral et Dieudonné.
            Pour revenir au cas Soral, en fait je ne vois pas pas de différence avec Eric Zemmour (avec qui il correspondrait), mis à part que ce dernier fait lui une fixette sur l’Islam (mais passe à la radio et TV par contre). Exemple type de propos soralien dans la bouche de Zemmour : http://www.youtube.com/watch?v=wmc1PHlBkxk.
            Soral, antisémite ou pas ? C’est vrai que la photo qu’il a posté devant le Memorial de la Shoah ne plaide pas en sa faveur, cependant lui donne une autre explication dans son interview (la version non coupée) par BFM TV : http://www.youtube.com/watch?v=zXDMnMDpdCY
            Peut être son explication est mensongère, en tout cas il devait avoir conscience des répercussions d’une telle photo. Faire ça uniquement par provocation n’est pas intelligent et je comprends parfaitement que des personnes puissent être blessées.

            Concernant le révisionniste Faurisson, Dieudonné lui a remis en 2008 le prix de l’infréquentabilité. Je ne connais pas trop le dossier mais si j’ai bien compris Faurisson remet en cause le nombre des victimes de la Shoah, les chambres à gaz et nie les traite d’esclave sur l’Ile de Gorée. Provocateur comme il est, en faisant ça Dieudonné a voulu tester les médias et vérifier quel « négationnisme » serait mis en avant histoire de confirmer son idée de la sacralisation de la Shoah au dessus de tous autres crimes. Bien sûr tout ça peut être critiquable et je ne suis pas son avocat. Pour l’histoire de Faurisson la démarche rappelle ce qu’à fait Gaby Cohn-Bendit qui pour le coup est aller encore + loin chez Ardisson (mais n’a pas été soupçonné d’antisémitisme pour autant alors qu’il pourrait être sous le coup de la loi Gayssot) : http://www.youtube.com/watch?v=fD5fGXr_afI

            Maintenant Dieudonné est-il obsédée par les juifs ?
            J’ai vu tous ses spectacles, il en parle c’est vrai mais ils attaquent les travers de toutes les communautés.
            Par contre les médias ne relèvent uniquement les sketchs voir phrases concernant les juifs, ou plutôt devrais-je dire que les seules infos que l’on pouvait avoir dans les médias meanstream, se résumaient aux dépêches AFP des condamnations d’associations anti-racistes, avec bien sûr l’occultation des nombreux procès gagnés par l’humoriste.
            Car non, les médias n’ont pas parler depuis 10 ans de Dieudonné et de ses quenelles, c’est uniquement récemment lorsque l’affaire a dépassé le gouvernement avec les photos de militaires, flics et autres sportifs. Ils se sont rendus compte que la censure traditionnelle TV / Radio / presse ne marchait plus avec le net, alors ils sont passés à l’offensive, Valls en tête. Un beau jour le Crif a décidé que la quenelle était un « salut nazi inversé » (donc l’inverse du nazisme?), puis tout le monde a relayé l’info.

            Certains soutiendraient Dieudonné par esprit de contestation purement adolescent, comme l’on rit enfant des « blagues pipi caca ». En effet, y en a qui ne doivent rien connaître au contenu de ses spectacles, ni à son message, et adhèrent à l’humoriste uniquement car c’est « sulfureux », « interdit » et mal vu par l’intelligentsia. Je dirais même qu’il y a peut être des vrais judéophobes (mots plus approprié, vu que « sémite » désigne les peuples parlant les langues sémitiques, c’est à dire l’hébreu, l’arabe, l’araméen, etc…). Mais est-ce que l’on se pose la question des christianophobes et islamophobes chez les lecteurs de Charlie Hebdo? Au passage Dieudonné a soutenu ce journal après la polémique sur les caricatures de Mahomet. La réciprocité ne s’est pas faite alors que l’humoriste défend l’égalité du traitement médiatique et le droit à la critique religieuse. En gros il défend les principes de la liberté (d’expression), l’égalité et la fraternité (se retrouver tous en abandonnant les communautarismes). Bref limiter son public à des racistes est faux, ça inclurait d’autant plus des juifs parmi les antisémites. Tout ce que raconte Dieudo dans ses spectacles, des personnes médiatisées issues de la communauté juive l’ont dit. Je pense que certaines personnes vont voir ses spectacles pour les mêmes raisons qui poussent certains à aller défendre un gars par terre entrain de se faire tabasser. Et on a d’autant plus envie de venir aider le gars lorsque l’on sait qu’il se fait tabasser suite à des rumeurs accumulées depuis un sketch chez Fogiel 10 ans auparavant ! Peut être est-ce ce même sentiment d’injustice qui a poussé les « justes » à protéger les juifs durant la 2nde guerre mondiale ? (je prends mon point Godwin au passage! lol)… tiens d’ailleurs dans une de ses dernières vidéos Dieudonné disait que ces « justes » défenseurs des juifs étaient probablement les 1er quenelliers de l’histoire. Vous n’avez peut être pas entendu cette phrase, les médias sélectionnant avec soin les propos sortis du contexte.

            Pour conclure, je tiens à dire que je n’ai pas LA vérité sur toute cette histoire, mais compte tenu des éléments je ne pense pas qu’il soit juste d’interdire les spectacles de l’humoriste.

            Je prends note aussi de votre 1ère réponse que j’ai trouvé intéressante au sujet de la peur du peuple israélien. Il est clair qu’il est pris en étau par son gouvernement et les pays voisins, malheureusement la paix ne semble pas pour demain. C’est peut être cette question qu’il faudrait mettre en avant.
            Mais lorsque vous dites « la manière dont les US ou les dictatures voisines instrumentalisent Israël, en font un pion de géopolitique », d’autres pensent au contraire que le gouvernement US et les pays du Moyen-Orient sous domination US sont des pions d’Israël en vue du projet sioniste du Grand Israël qui étendrait sa zone d’influence du Tigre à l’Euphrate. Je sais qu’une version est davantage considérée conspirationniste mais qui a raison ?

          2. Jean-no Auteur de l’article

            @Ashlesha : En réponse à : Mais lorsque vous dites « la manière dont les US ou les dictatures voisines instrumentalisent Israël, en font un pion de géopolitique », d’autres pensent au contraire que le gouvernement US et les pays du Moyen-Orient sous domination US sont des pions d’Israël en vue du projet sioniste du Grand Israël qui étendrait sa zone d’influence du Tigre à l’Euphrate. Je sais qu’une version est davantage considérée conspirationniste mais qui a raison ?… la réponse me semble facile : un pays de 8 000 000 d’habitants (dont plus d’un million et demi d’arabes musulmans ou chrétiens) qui dominerait 400 000 000 d’étasuniens, 450 000 000 d’arabes et pourquoi pas 1 600 000 000 de musulmans, c’est un peu gros !

        2. El Gato

          Dieudonné est-il un humoriste?
          Est-ce que ces spectateurs rient parce qu’ils trouvent ses blagues drôles ou parce qu’ils se reconnaissent dans ses propos de la même façon que des gens vont « rire » à des plaisanteries racistes ou machistes éculées qu’ils ont déjà entendues des centaines de fois?
          Plus que la réponse à une proposition comique, le rire me semble fonctionner ici comme un signe de reconnaissance, d’appartenance à un groupe où l’on est heureux de se retrouver entre pairs, de se tenir chaud parce que l’on rit aux même vannes ou supposées telles.

          Et puis il y a sans doute aussi dans le public, le rire de la fausse transgression (dans la mesure où le public est acquis à ses idées). C’est le rire du petit enfant qui entend « pipi » ou « caca ».

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  8. raphaelB

    Je pense que du point de vue de dieudonné (sous influence de soral), les attaques contre les juifs, pardon, des « sionistes » est nourrie par leur surreprésentation (perçue et/ou réelle) dans les médias et la finance, c’est-à dire dans « l’oligarchie ». Les rapports de domination complexes tissés par la finance et la classe média sont ainsi réduits à une simple affaire de « complot sioniste ».

    Bref, je suis très en colère contre dieudonné et soral, parce qu’ils se sont emparés de problématiques réelles sans en avoir vraiment les facultés intellectuelles, et qu’ils assènent aujourd’hui avec l’assurance des sots (qui suffit à bluffer pas mal de jeunes) un discours socio-politico-économique outrageusement simplifié à propos de sujets qui demandent au contraire une très grande finesse d’analyse, une prudence et un doute cartésien qui leur fait de toute évidence défaut.

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  9. Ange d'Houblevet

    Bon article, équilibré et qui reflète mes inquiétudes.
    Tout comme raphaelB, je suis assez remonté contre Soral qui récupère des enjeux sociétaux pour faire monter la sauce, créer du beuz et tisser leur toile. A lire cette bonne analyse du phénomène:
    http://www.monde-diplomatique.fr/2013/10/PIEILLER/49683

    que je ne peux m’empêcher de citer:

    « Il serait néanmoins frivole de considérer que les habitués de Soral sont tous de la graine de fascistes. Il le serait tout autant de ne pas prêter attention à ce qui, dans son discours, est un « embrayeur » d’équivoque, un facilitateur de dévoiement. »

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