Des gilets jaunes auront réussi à me faire prendre position en faveur d’Alain Finkielkraut. Super.
Comme je m’en plaignais, quelqu’un a cherché à me consoler en interprétant mes motivations :
« tu ne prends pas position pour Finkielkraut mais contre l’antisémitisme ».
Mais en fait, je dois le confesser, ce n’est pas tout à fait exact, et c’est en vérité autant pour Finkie en tant que personne que je manifeste mon soutien, que par répulsion pour l’antisémitisme. Comme tout le monde, je suis facilement irrité par Alain Finkielkraut et son passéisme réactionnaire, mais je dois lui reconnaître cette vertu : lui il ne se cache pas dans le nombre, il est plutôt du genre à s’exposer, et même à accepter le débat — car même si le dispositif est souvent biaisé1, il invite bel et bien des gens avec qui il est en désaccord dans son émission, et même si lui-même n’en tirer jamais durablement de conclusion, il arrive que ses joutes verbales se retournent contre lui.
Même si je pense qu’il a tort en à peu près tout (mais cela ne le rend pas inutile : une montre arrêtée donne l’heure juste deux fois par jour), il n’est pas malhonnête. Il est d’ailleurs le premier à avoir fait remarquer que les gilets jaunes qui l’ont invectivé et dont les images tournent n’étaient pas forcément en majorité, que d’autres au contraire lui ont parlé aimablement et que certains l’ont même invité à se joindre à eux. Même s’il y a parfois une pointe de masochisme dans sa manière de s’exposer, c’est un masochisme que je comprends plutôt, que je trouve presque touchant. Entre une foule et un individu, je n’ai pas besoin de réfléchir longtemps, en fait.
- La méthode d’Alain Finkielkraut est souvent d’inviter un « pour », un « contre » et de se poser en modérateur… Mais en modérateur qui a généralement clairement choisi son camp, ce qui au lieu de donner un « pour », un « contre » et un « neutre » donne plutôt un débat good-cop bad-cop à deux contre un. [↩]