Beaucoup de français pensent que leur pays détient une espèce de copyright sur la marque « Droits de l’homme ». Une amie me disait qu’elle avait passé les années Sarkozy à avoir honte de son pays chaque jour en allumant la radio, et qu’elle constate que la présidence Hollande, dont elle n’attendait pourtant rien, n’a pas plus de dignité.
L’affaire Edward Snowden est lamentable : un citoyen américain, qui constate que son pays s’assied sur les principes de sa propre constitution (pourtant salement écornés déjà par le célèbre Patriot act,) a révèlé au monde entier ce que l’on supposait déjà, à savoir que la National Security Agency, espionne le monde entier à commencer par les pays amis des États-Unis. Il a aussi révèlé aux américains qu’eux aussi sont espionnés et que l’instrument de la surveillance n’est autre que le réseau Internet et ses services les plus populaires : Google, Facebook, Apple, etc. En fait, on aurait facilement pu négliger de s’intéresser à l’affaire, tans ces révélations sont peu surprenantes, mais chacun doit passer pour indigné. L’histoire aurait pu en rester là mais les États-Unis d’Amérique avaient un message à faire passer, le même que celui qu’envoient les mafias : celui qui a parlé doit être puni sans pitié, sans relâche. C’est le cas du malheureux Bradley Manning, tenu au secret et à l’isolement dans des conditions qui s’apparentent à de la torture psychologique, non pour obtenir de lui des informations, mais bien pour l’exemple, pour décourager tous ceux qui, dans le futur, auraient eux aussi l’idée saugrenue de dévoiler publiquement les activités condamnables de leur propre pays.
Lorsque le ministre de l’intérieur français a fait savoir, avant même que la question ne lui soit posée, semble-t-il, qu’il n’était pas favorable à l’accueil d’Edward Snowden comme réfugié politique, il restait pardonnable car sa marge de manœuvre n’était pas très importante : accepter un réfugié politique venant d’un pays officiellement ami (quoiqu’il nous espionne, notamment industriellement — je suis curieux de savoir à quel point l’espionnage par la NSA favorise l’économie américaine), c’est s’exposer à une crise diplomatique majeure, se montrer insultant et hostile par l’affirmation que le pays ami n’est pas une démocratie complète. Mais quand notre gouvernement a refusé le survol du territoire français par l’avion du président bolivien, au motif qu’une rumeur prétendait qu’Edward Snowden se trouvait à bord, on passe un cran dans la veulerie et on s’affirme clairement en vassal qui accepte de vexer les Boliviens pour affirmer sa fidélité envers le pays suzerain, alors même que l’on fait mine de s’émouvoir qu’il nous espionne.
On attend le jour où la France bloquera courageusement les avions de dictateurs africains que l’on soupçonne de transporter de l’argent destiné à arroser la classe politique française : on prétend que cela se fait. Il existe même des communications diplomatiques américaines révélés par Wikileaks qui le disent.
À peu près au moment ou Evo Morales était traité comme un voyou, la justice française ordonnait à Médiapart et au Point de faire disparaître d’Internet les preuves enregistrées qu’ils avaient mis à disposition du public pour que celui-ci se fasse un avis sur l’affaire Bettencourt, officiellement au nom de la vie privée, mais plus vraisemblablement, dans un but de censure.
Ça ne fait plus partie des droits de l’homme, la liberté d’informer ?
La presse magazine, qui est souvent plus un support de communication économico-politique qu’un outil d’information, justement, se montre de plus en plus impatiente de nous annoncer le retour de Nicolas Sarkozy, avec des « teasers » ridicules et réguliers qui s’inspirent parfois de la tradition messianique : « Sarkozy de retour parmi les siens », « comme s’il ne nous avait jamais quittés », etc.
Mais à cette presse, on peut dire : On s’en fout ! Gardez votre camelote ! On n’en veut pas de votre Sarkozy. On le connait ! Vous l’avez vendu une fois aux Français, ça suffit, merci.
Et puis surtout, son départ n’a pas changé grand chose à la marche du pays, enfin je dis « la marche » mais c’est plus de rampement qu’il s’agit à présent, puisque nos gouvernants ne semblent être au service que de puissances qui ne veulent a priori de bien qu’à elles-mêmes : les États-Unis, notamment, et les quelques grandes sociétés suffisamment riches pour vouloir organiser le monde à leur profit et de manière bien plus monopolistique et bien moins librement concurrentielle qu’ils le prétendent.
Ça va finir par se voir, et ça va finir par pousser les citoyens à obtenir pour les diriger un régime franchement anti-démocratique qui ne changea rien au mouvement actuel de confiscation du domaine public (eau, énergie, transports, postes, éducation) et, au contraire, permettront qu’il se poursuive sans résistances. En disant ça, je ne pense même pas à Marine Le Pen, dont l’incompétence économique semble assez flagrante pour que la plupart des électeurs n’aient pas envie de la voir aux affaires, mais plutôt à un transfert massif des prérogatives politiques vers le secteur privé.
Il y a un aspect qui n’a pas été soulevé à mon sens : que les américains espionnent les autres ambassades ne me surprend pas et je suppose que les européens font de même. Nous sommes lamentablement habitués au petits jeux des espions (je te tiens tu me tiens par la barbichette…) le cinéma est embrigadé dans l’acceptabilité sociale de telles pratiques depuis toujours (James Bond, Mission impossible, j’en passe et des moins bons).
En revanche notre cher état ne réagit pas au fait que ses citoyens, celui dont il est l’émanation , dont il tire la légitimité et qu’il doit protéger, sont fliqués par un état étranger, fût-il « ami », ça, c’est choquant !
Que les services secrets « s’amusent » entre eux soit ! mais il est inadmissible que nous tous ayons nos communications privées enregistrées, les métadonnées nous concernant enregistrées et analysées, a priori, est profondément scandaleux. Ce qui l’est encore plus c’est le silence de notre état sur cet aspect des choses.