La prière

En voyant passer cette nuit des tweets du monde entier qui disaient #prayForParis, j’ai eu un petit mouvement d’humeur : qui dit prière entend (presque toujours) religion, et la religion, c’est ce au nom de quoi on arrive à amener les gens à tuer en se croyant du côté du bon et du bien, et en mettant sciemment en veille sa capacité à raisonner : comme si nous n’étions pas assez ahuris sans le vouloir.
Je sais, bien sûr, que la religion n’est pas qu’une raison de tuer1, je sais aussi qu’elle n’est pas la seule (le nationalisme est pas mal aussi), et je sais bien évidemment que ceux qui tweetent #prayForParis ne veulent de mal à personne, bien au contraire. Ils font ce qu’ils peuvent, face à l’horreur, ils veulent agir, ne pas rester sans rien faire, alors ils proposent de prier, histoire de ne pas se sentir seuls, peut-être aussi.
Prier ne sert à rien, c’est sûr, mais après une nuit de réflexion, je me dis que c’est comme l’homéopathie : mieux vaut un remède qui ne remédie rien qu’un poison qui agit, mieux vaut manger quelques billes de glucose sans principe actif que d’ingérer une molécule active, efficace, mais pas forcément adaptée. Donc mieux vaut prier qu’aller incendier des mosquées. D’accord. Après tout, moi, je n’arrive pas à m’empêcher de parler, écrire, tweeter, non pas parce que j’ai des choses à dire véritablement (au contraire, même), mais parce que j’ai besoin de ça.

  1. La religion, heureusement, ne sert pas qu’à haïr ou à asservir, mais je n’ai jamais cru qu’elle soit une raison de faire le bien au point où elle se vante de le faire. Les mots « amour », « paix », « joie », « vérité » ou « justice » m’ont toujours l’air vidés de leur sens, ou en tout cas détournés, lorsqu’ils sont préemptés par les religions — notamment monothéistes. []

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