Pas Serious

La borne d’achat de tickets de tramway de la station Université, au Havre, me contrarie car elle refuse ma carte-bleue. Elle me laisse passer commande, insérer ma carte de paiement, composer mon code, puis, après avoir fait semblant de réfléchir pendant un temps assez long, m’annonce que ça ne fonctionne pas.
Je ne suis pas le seul à connaître ce problème mais je connais des gens qui n’en souffrent pas, sans pouvoir dire ce qui distingue leurs cartes de paiement de la mienne. Comme je suis très têtu face aux machines qui dysfonctionnent1, j’essaie souvent.
Mardi soir, j’avais décidé d’aller voir L’Homme irrationnel, de Woody Allen2, au Sirius, le cinéma d’art et d’essai de la ville3.
Puisqu’il me restait cinq minutes avant le passage du tram, j’ai décidé, une fois de plus, de tester la borne de vente, avec pour projet officiel de recharger une carte de transport vide, et comme projet véritable de vérifier que la machine fonctionnait mal, pour avoir la satisfaction de me dire intérieurement : « j’en étais sûr ! ».

tramway_universite

Ça n’a pas raté. La machine a fait semblant que tout allait bien, puis m’a finalement annoncé d’un petit air perfide que ma carte-bleue lui déplaisait. À quelques centaines de mètres, le tram approchait.
Pendant que je lisais le message, le distributeur a commencé à me presser d’enlever la carte de tram du logement destiné à la recharger. Je l’ai ôtée, mais le message est resté affiché, rapidement doublé d’une très pénible série de « beeeps » rapprochés. Apparemment, la machine n’avait pas compris que j’avais enlevé ma carte4. J’ai attendu, puis j’ai remis la carte pour l’ôter à nouveau. Les « beeeps » étaient de plus en plus pressants. La machine semblait détraquée, j’ai pris mon tram. Alors que les portes se fermaient, les « beeeps » insistaient de manière toujours aussi détestable.

Deux heures plus tard, en sortant de ma séance et en tentant à nouveau de recharger ma carte de tram, j’ai compris ce que le machine tentait de me dire un peu plus tôt : ce n’est pas ma carte de tram qu’il fallait que je récupère, c’était ma carte de paiement, et je l’avais donc perdue. J’ai couru vérifier si elle était toujours là où je l’avais laissée, mais non, quelqu’un l’avait enlevée, à la satisfaction de l’automate, j’imagine, puisque ce dernier avait enfin cessé d’émettre ses « beeeps » irritants.

  1. Je fais la même chose dans ma gare de banlieue, où je sais pertinemment que le composteur de gauche, une fois sur deux, recrachera mon ticket sans le composter, tandis que son voisin s’acquittera correctement de la tâche qui lui est demandée : je fais exprès de mettre mon billet dans le mauvais automate, pour vérifier sa médiocrité et m’en plaindre ensuite aux agents de la SNCF. []
  2. Chaque année on me vend le Woody Allen du moment comme renouant enfin avec ses meilleurs films, et chaque fois je suis déçu. Ici, c’est à peu près l’histoire de l’excellent Serial Mom, de John Waters, sauf que le protagoniste principal est prof de philosophie et non mère au foyer. []
  3. J’aime bien dire le Serious plutôt que Le Sirius, mais ce jeu de mot ne fait rire que moi, d’autant que je ne suis pas sûr de l’avoir souvent sorti en société. Vous verrez, vous aussi quand vous serez vieux vous trouverez que les jeux de mots constituent une forme amusante d’humour []
  4. Comme dans Robocop, avec la scène de démonstration du droïde ED-209, qui, à cause de la moquette, ne comprend pas que l’homme à qui il a ordonné de jeter son arme a obtempéré, et le massacre de manière sanglante. []

Le premier dessin de presse qui m’ait fait rire

J’ai le souvenir très vif de cette « une » de Charlie Hebdo.
Je m’en souviens, car c’est le premier dessin de presse qui m’ait fait rire, le premier où j’aie compris les tenants et les aboutissants du gag : si on est dans un cercueil, c’est qu’on est mort, et donc qu’on ne peut pas voir sa santé s’améliorer. Et puis un cercueil qui marche1, ça n’existe pas.

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Ce dessin de Jean-Marc Reiser date du mois de juillet 1974.
Francisco Franco est finalement bien mort le 20 novembre 1975, il y a exactement quarante ans. Trois semaines plus tôt, malgré l’agonie, il avait rassemblé ses dernières forces pour signer les sentences de mort de huit activistes de l’ETA et du Front Révolutionnaire Antifasciste et Patriote. Il est mort de « Maladie de Parkinson, cardiopathie, ulcère digestif aigu et récurrent avec hémorragies abondantes et répétées, péritonite bactérienne, insuffisance rénale aiguë, thrombophlébite, broncho-pneumonie, choc endotoxique et arrêt cardiaque »2. Seuls trois chefs d’État se sont déplacés pour les obsèques du dictateur : Rainier III de Monaco, Hussein de Jordanie, et enfin le président du Chili, Augusto Pinochet. Franco n’est pas allé au cimetière à pieds, mais presque personne n’a voulu l’accompagner.

  1. En écrivant ça, me revient en tête la chanson « Maman les petits bateaux » (qui vont sur l’eau ont-ils des jambes ?). []
  2. Wikipédia []

L’imam Google

Je pense que Xavier Bertrand vise spécifiquement les gens qui écoutent Europe 1 mais qui ne connaissent pas, ou très peu, Internet.
Le quatrième âge, quoi. Ou le cinquième.

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Mais je doute que cette tranche d’âge soit suffisamment nombreuse pour faire de lui (on dit qu’il l’ambitionne) le prochain président de la République française.

Détruire et construire

Au Havre, on détruit facilement. Une habitude qui date de la guerre, peut-être, ou qui vient de sa relative jeunesse (on fêtera le cinq-centenaire en deux-mille dix-sept), ou qui correspond à une mutation plus récente, je n’ai pas le recul pour le dire, mais cela rend en tout cas cette ville très singulière dans un pays si attaché à son patrimoine — et parfois même entravé par lui. Depuis neuf ans que j’enseigne ici, je vois des friches industrielles ou des habitations vétustes disparaître pour être remplacées par des constructions neuves. Un jour il y a un entrepôt en ruines, le lendemain un trou, et quelques semaines plus tard, une nouvelle construction. Et on oublie ce qui a été remplacé.

Je ne saurais déjà plus dire ce qui se trouvait à cet endroit avant démolition, il y a seulement un ou deux ans :

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Pour une fois, la re-construction prend du temps, et j’imagine que c’est dû à la mare qui est apparue, constamment alimentée par un sous-sol apparemment difficile à assécher, et désormais ceinte d’une clôture : il ne faudrait pas que quelqu’un aille s’y noyer, un soir d’éthylisme. Détruire ne suffit pas toujours à faire table-rase. On doit pouvoir en faire une variante de la parabole évangélique de la maison et des fondations1.

Les néons roses, au bout du terrain, c’est un sex-shop. Plus bas dans le Cours de la République — la voie sur laquelle débouche la gare —, il y a une quantité invraisemblable de kébabs.

  1. Évangile de Matthieu, 7.21-27. []

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Paris-Le Havre. Une femme trentenaire assez potelée, cheveux noirs formant une crête tenue par des pinces dont je ne comprends pas si elles sont censées faire partie de la coiffure de manière permanente ou non. Elle a un pantalon de cuir noir. Elle est entrée en même temps que moi dans le train et s’est installée plus loin. Elle parle très fort au téléphone, avec plusieurs personnes différentes, se plaignant d’une femme qui « veut foutre la merde ». Ses boucles d’oreilles font du bruit chaque fois qu’elle secoue la tête, et elle la tourne beaucoup.

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La dernière conversation se tient vraisemblablement avec un homme, qu’elle appelle d’abord « bébé » avant de se fâcher subitement : « toi, t’as appelé le père de mes enfants ? Toi t’as fait ça ? Mais pourquoi t’as fait ça ? Me mens pas. Tu m’écoutes jamais ! Attends, là je suis dans le train, j’arrive à Saint Lazare, c’est pour toi que je suis venue, mais walla, sur Allah, ce soir, j’dors pas avec toi. Sur Allah ! ».
Après quoi elle raccroche, se crème avec des gestes amples et énergiques, se maquille avec un assez grand miroir rectangulaire, se parfume fort et chante du R’n’B en français, une histoire de mère célibataire qui essaye de convaincre un homme qu’il est le père de l’enfant qu’elle va avoir. Elle a une voix assez puissante et chante juste, je suppose qu’elle est la star du R’n’B de son quartier, mais je ne l’imagine pas faire carrière au delà.

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Son parfum – agréable mais vraiment trop fort – m’agresse à huit rangées de sièges de distance. À mon avis, malgré son serment, ce soir, elle dort avec lui.

Le drapeau

Le  Huffington Post publie un article de Fabrice d’Almeida, professeur d’histoire, qui fait le point sur la polémique qui entoure la création par Facebook d’un filtre qui permet d’associer sa photo de profil à un drapeau tricolore.
Effectivement, cette initiative de Facebook, destinée à manifester un soutien envers les victimes des attentats de vendredi nuit, a été immédiatement critiquée par les habituels grincheux1 qui voient dans cette emblème de la République un symbole impérialiste, agressif, voire un logo du Front National2.
Or le sens initial des trois couleurs du drapeau est la réconciliation et l’unité de la Nation, valeurs qui par essence ne pourraient être accaparées par un parti politique quelconque.

Puisque je sais ça, je n’aurais pas eu l’idée de reprocher à qui que ce soit d’utiliser le drapeau français comme avatar. Et même, je soutiens le principe en tant qu’acte de reconquête des emblêmes : il n’y a pas de raison de laisser la République Française devenir la propriété des partis les plus imbéciles, ni de croire qu’être heureux de vivre dans son pays soit du nationalisme.
Pourtant, ça aurait été au dessus de mes forces, et voir tous ces drapeaux partout m’a même un peu mis mal à l’aise, du moins lorsqu’ils étaient affichés par des compatriotes, car sans pouvoir expliquer en quoi cela fait une différence, j’ai trouvé le geste sympathique et même plaisant lorsqu’il émanait d’étrangers.

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Un origami adressé à Paris par Keiko, auteure de l’excellent blog Japanese-american in Boston.

Si ces couleurs me gênent, ce n’est pas pour une raison intellectuelle, puisqu’au contraire je sais que le drapeau français n’a rien de fasciste et je pense qu’il serait horrible de l’abandonner aux nationalistes.
La raison est plus épidermique : quand je vois ce drapeau, je ne peux m’empêcher de l’associer à ceux qui l’utilisent le plus volontiers : les supporters de football, dont l’enthousiasme pourtant bon-enfant m’a parfois l’air d’un entraînement à la guerre ; les partis qui revendiquent le nationalisme ; et enfin, bien sûr, l’armée, et notamment ma vingtaine, lorsque j’essayais d’échapper à la conscription, ou de temporiser, et que je recevais régulièrement des lettres en bleu-blanc-rouge des courriers militaires qui, chaque fois, signifiaient que le couperet se rapprochait un peu plus et que je devrai finir par effectuer mon service. J’ai fini par le faire : vingt mois3 de ma vie à peu près perdus, sans autre justification que le fait que l’État est plus fort que moi et se moque de mon avis comme des embarras financiers que ses exigences peuvent causer à un jeune couple avec enfant.
J’ai l’impression de ressentir aujourd’hui encore l’angoisse et la haine que j’éprouvais chaque fois que je recevais ces courriers bleu-blanc-rouge, envoyés par une machine insensible, l’État français.

Alors je n’en veux pas à ceux qui arborent des drapeaux, je n’ai aucune raison de leur reprocher leur geste, mais qu’ils ne m’en veuillent pas s’il est au dessus de mes forces de les imiter.

  1. Ce sont les mêmes qui se sont plaints que l’on oublie de parler de l’attentat-suicide perpétré la veille au Liban (effectivement !) et qui a fait une quarantaine de victimes — le bilan n’est pas définitivement établi —, mais aussi des attentats meurtriers au Kenya (152 morts, certes, mais il y a huit mois !) et des massacres perpétrés par Boko Haram au Nigéria (2000 personnes, abominable, mais là aussi, l’information est ancienne puisqu’elle est contemporaine des attentats de Janvier dernier).
    Si il est utile de rappeler qu’il n’y a pas qu’en France que l’on souffre, je m’interroge sur ce réflexe qui consiste à pointer systématiquement (y compris lorsqu’aucun fait n’est disponible pour l’établir) une iniquité de traitement géographique. Si on peut déplorer que certaines tragédies nous semblent tristement normales (de fait, on nous parle rarement de la Syrie, de l’Irak, de l’Afghanistan, du Soudan ou de l’Érythrée pour autre chose que des catastrophes), ailleurs et choquantes ici, il faut peut-être cesser d’y voir un mépris pour la vie des gens qui vivent au loin : le kilomètre émotif (plus qu’affectif) se justifie assez facilement par la théorie de l’évolution, et par ailleurs, s’inquiéter pour ce qui se passe dans les quartiers où nous prenons des cafés, où vivent des amis proches, où on aurait pu être ce soir-là, est tout sauf irationel. []
  2. Je note pour ma part que, s’il ne les a pas choisies lui-même, l’ordre des couleurs de notre drapeau a été décidé par Jacques-Louis David, qui est bien le plus antipathique des peintres ! []
  3. J’ai effectué un service civil, en tant qu’objecteur de conscience, au ministère des affaires sociales. C’était deux fois plus long que le service habituel. J’étais alors en troisième année aux Beaux-Arts de Paris, où je ne suis pas revenu après. []

Les bisounours et les vautours

Le mot « bisounours » m’énerve beaucoup dans les discussions liées au terrorisme — depuis hier, j’ai dû le lire vingt fois. Il semble qu’il existe sur cette terre des gens qui croient sincèrement que, face à une Kalachnikov, il se trouvera des humanistes naïfs et assez imprudents pour penser qu’un câlin réglera tout. Je doute pour ma part que de tels « bisounours » existent. Du reste, chaque fois que je lis le terme, il est surtout utilisé pour décrédibiliser les gens qui veulent réfléchir à la situation de manière rationnelle, non-exclusivement émotionnelle et réactionnaire, aux gens qui inscrivent les événements dans le long terme, qui ne veulent pas seulement se demander dans l’urgence s’il faut courir ou se cacher, s’il faut tuer, emprisonner, envahir. Aux gens qui se demandent comment un enfant mignon de cinq ans tue des gens à quinze, et comment faire pour que les enfants mignons de 2015 ne soient les futurs meurtriers en 2025.

Je ne crois pas aux « bisounours », mais je crois aux vautours. Depuis hier, j’ai lu plusieurs personnes dire « c’est événement me donne raison ». Si je compte bien, il y avait surtout :

  • Les gens du Front national et assimilés
  • Les néo-cons étasuniens
  • Les gens de l’État Islamique
  • Bachar el Assad

Et ça n’est pas bien étonnant, parce que tous pensent, avec leur opportunisme minable, que les événements servent directement le but qu’ils poursuivent. Même lorsqu’ils semblent ennemis, ils sont objectivement alliés, puisqu’ils ont besoin les uns des autres. Chacun de nous doit réfléchir à comment on pourra éviter que ces gens-là décident de notre futur.

La prière

En voyant passer cette nuit des tweets du monde entier qui disaient #prayForParis, j’ai eu un petit mouvement d’humeur : qui dit prière entend (presque toujours) religion, et la religion, c’est ce au nom de quoi on arrive à amener les gens à tuer en se croyant du côté du bon et du bien, et en mettant sciemment en veille sa capacité à raisonner : comme si nous n’étions pas assez ahuris sans le vouloir.
Je sais, bien sûr, que la religion n’est pas qu’une raison de tuer1, je sais aussi qu’elle n’est pas la seule (le nationalisme est pas mal aussi), et je sais bien évidemment que ceux qui tweetent #prayForParis ne veulent de mal à personne, bien au contraire. Ils font ce qu’ils peuvent, face à l’horreur, ils veulent agir, ne pas rester sans rien faire, alors ils proposent de prier, histoire de ne pas se sentir seuls, peut-être aussi.
Prier ne sert à rien, c’est sûr, mais après une nuit de réflexion, je me dis que c’est comme l’homéopathie : mieux vaut un remède qui ne remédie rien qu’un poison qui agit, mieux vaut manger quelques billes de glucose sans principe actif que d’ingérer une molécule active, efficace, mais pas forcément adaptée. Donc mieux vaut prier qu’aller incendier des mosquées. D’accord. Après tout, moi, je n’arrive pas à m’empêcher de parler, écrire, tweeter, non pas parce que j’ai des choses à dire véritablement (au contraire, même), mais parce que j’ai besoin de ça.

  1. La religion, heureusement, ne sert pas qu’à haïr ou à asservir, mais je n’ai jamais cru qu’elle soit une raison de faire le bien au point où elle se vante de le faire. Les mots « amour », « paix », « joie », « vérité » ou « justice » m’ont toujours l’air vidés de leur sens, ou en tout cas détournés, lorsqu’ils sont préemptés par les religions — notamment monothéistes. []

Difficile d’aller se coucher

Plus de cent-quarante morts, dit la mairie de Paris. Et combien de blessés graves ? Avec un tel nombre, je sais déjà que demain j’apprendrais que des amis, ou au moins des amis d’amis, ont passé une terrible soirée.
Difficile d’aller se coucher.
Je connais tant de gens qui habitent ces quartiers, qui y sortent le vendredi. Beaucoup ont fait savoir qu’ils étaient sains et saufs. J’espère bien que les autres sont en week-end en Bourgogne ou à Paimpol, n’ont ni la radio ni la télé, et ne découvriront que demain ce qui s’est passé. Mais quand même, depuis que je sais que le groupe Eagles of Death Metal ne fait pas de Death Metal et produit précisément le genre de musique qui plait à tel et tel ami, je suis un peu inquiet.
Difficile d’aller se coucher.
Dans les semaines qui viennent, on nous dira tout des tueurs, leurs notes à l’école, l’histoire de leur maman qui avait du mal à les élever, leur papa qui s’était barré, les voisins que ça étonne, quand même, parce qu’ils se rappellent que quand ils étaient enfants, ils étaient gentils, finalement.
On saura tout, mais on ne saura rien.
Difficile d’aller se coucher.

Vous l’avez lu ici en premier

#Baidu/AFP, 11.11.2022
Le philologue islandais qui avait lu par lui-même près de 15% des conditions d’utilisation d’iTunes en six ans, et qui avait révélé au grand public avoir découvert dans ce texte juridique une mention faisant d’Apple le légataire universel des abonnés à son service, a été retrouvé mystérieusement assassiné à son domicile. Conformément aux conditions d’utilisation de Facebook, le contenu de son ordinateur a été supprimé et ses organes biologiques encore en bon état de fonctionnement ont été revendus à des banques d’organes, au profit de la fondation Zuckerberg, malgré les protestations de pure forme de la société Google qui estime que le contrat d’utilisation de Google+ lui confère automatiquement la propriété d’au moins un rein et un œil de chacun de ses usagers. Suivant sa politique habituelle lorsque ce genre de dispute survient, la firme de Mountain View a supprimé de ses bases de données le nom de la personne et détruit toute trace de ses documents d’état-civil, plongeant ses héritiers dans un vide juridique inconfortable.

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Afin qu’ils ne soient pas tentés d’en révéler les secrets de fabrication ou la localisation, les techniciens qui ont monté ce nouveau complexe de stockage de données numériques ont été congelés à la température de -271°, avec la promesse d’être ramenés à la vie dès lors que la science aura résolu les problèmes d’hibernation et que ce data center aura été jugé obsolète.

L’ordinateur IBM Watson, au terme d’une réflexion de près de 213 microsecondes, a décidé d’abandonner l’enquête sur le meurtre, considérant être dans une configuration comparable à celle du roman Le Crime de l’Orient-Express, dans son édition Tweetée1, où, selon le rapport fourni par Watson, « le nombre de personnes morales ou physiques disposant d’un mobile fort mais d’aucun alibi est trop élevé pour permettre d’établir une culpabilité unique, et prouve surtout que l’individu assassiné a bien cherché ce qui lui est arrivé, en se faisant d’innombrables ennemis et en signant n’importe quel contrat sans le lire ».

Conformément au récent règlement européen sur le droit à l’oubli flash, cet article disparaîtra d’Internet huit minutes après le début de son affichage.
Vous risquez des poursuites graves si votre Kinect 13 constate, au vu de votre activité cérébrale, que vous êtes en train de tenter de mémoriser les informations que contient l’article ou, bien entendu, si vous êtes pris en flagrant délit de tenter de la débrancher ou que vous avez le projet de le faire.

  1. @AgathaChristie : Un riche américain est tué par douze coups de couteau dans un train, un nommé poireau découvre que le coupable était douze comme par hasard. []