Réflexion sans intérêt

(On finit par s’habituer à l’horreur des attentats, mais on finit aussi par s’habituer aux déclarations débiles qui accompagnent l’horreur. Et on ne peut pas toujours se retenir soi-même d’en émettre, ce que je fais ici — soyez indulgents et ne voyez là que le besoin de réfléchir à voix haute)

hirondelle

Je sais bien qu’il faut attendre ce que dira l’enquête, mais plus j’en apprends sur Lahouaiej Bouhel et plus je me dis qu’il n’a rien à voir avec l’islamisme, je me dis qu’il a plutôt le même profil qu’Andreas Lubitz, l’Allemand qui s’était suicidé en emmenant avec lui cent quarante neuf autres passagers et personnels de l’avion dont il était co-piolote. Un mass-murderer tel que les États-Unis en produisent toutes les semaines, quoi, une de ces personnes qui peinent à vivre avec les autres et qui veulent mourir en emmenant un maximum de gens avec eux.
Sommes-nous dans une société qui produit plus que d’autres des gens inquiets de leur avenir, frustrés, malheureux ? Est-ce que leur médiatisation a transformé les suicides meurtriers en mode, ou est-ce qu’il s’agit juste d’en avoir eu les moyens, l’occasion, l’idée ? Est-ce que nous assistons à une épidémie d’un problème psychologique neuf ? Après tout il existe dans l’histoire plus d’un souverain ou d’un meneur de secte qui a fait payer ses problèmes psychologiques et son immaturité à des centaines, des milliers ou des millions de gens. Et finalement, est-ce tous que les gens qui se suicident en emmenant un maximum d’autres avec eux, en se vengeant du monde entier, ne sont pas les mêmes, qu’ils se donnent un prétexte idéologique ou non ?

Comment faire pour que les gens soient heureux ? Ou lorsqu’ils ne peuvent pas l’être — et du reste, ça serait impossible —, comment faire pour qu’ils apprivoisent leurs propres frustrations, leur solitude ? Tout ramener à une question de société de consommation (supplice de tantale perpétuel qui produit de la frustration en donnant à chacun l’impression — fondée — d’être submergé par l’abondance, et parfois torturé par le désir impuissant de posséder des biens ou des gens) serait un peu court, sans aucun doute, mais il doit y avoir quelque chose à réfléchir par là.

2 réflexions au sujet de « Réflexion sans intérêt »

  1. Sans intérêt mais je partage jusqu’au point final !
    Il est des évidences qui nous sont familières, mais que nous cachons sous le tapis de nos angoisses existentielles ! Merci de les formuler avec pudeur et justesse .

  2. Ou inversement, une société policée et pacifique comme la notre est, pour cette seule raison, extrêmement frustrante pour nombre d’individus qui sont heureux de pouvoir plonger leurs bras dans le sang jusqu’aux coudes quel qu’en soit le prétexte.
    Avant on n’imaginait pas de gouvernement sans pendaisons, décapitations, écartèlement publiques auxquels on associait les enfants pour leur édification et parce qu’il n’y avait pas tant d’occasions de faire la fête. Les Sarko et Hollandes de l’époque laissaient la tête de leurs adversaires pourrir aux entrées des villes pour l’exemple. Si on avait envoyé l’équivalent des CRS mater une jacquerie en région, pour éviter de les payer et marquer les esprits forts (et les autres), on les laissait piller, violer, brûler villes et campagnes rebelles pendant quelques jours. (La durée était proportionnelle au mécontentement de leur employeur, mais si on les privait de ces menus plaisirs, ils pouvaient se rebeller.) Plus près de nous, les turques massacrant des arméniens, les allemands faisant carrière en cherchant à améliorer la productivité des chambres à gaz ou les Hutus massacrant des Tutsis n’étaient pas tous des frustrés.
    Les mass-murderer ne manquent pas, ce sont les prétextes qui parfois semblent s’essouffler. Mais ça ne dure jamais très longtemps…

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