(J’ai eu mon premier abonnement régulier à Internet en 1996. Cela me coûtait cher, et quand la mode des téléphones mobiles est arrivée — assez rapidement —, je ne pouvais pas avoir l’un et l’autre. De plus, l’idée se faire sonner comme un domestique1 partout où on se trouve, sans répit, ne me plaisait pas beaucoup. Je n’ai donc jamais eu de mobile, je n’en ai toujours pas et je ne compte pas m’en équiper. Avec le temps, ma constance (qui n’est en rien forcée, je n’ai pas l’impression d’être privé de quelque chose) me permet de témoigner des situations où l’on n’imagine plus que l’on soit dépourvu de cet accessoire de communication et de pistage.)
Depuis un certain temps déjà, lorsque je me connecte à l’interface en ligne de ma banque2 — La Banque Postale3 —, on me propose de souscrire à un service d’authentification dite « forte », Certicode+.
En effet, La Poste, comme toutes les banques, se conforme à la directive européenne qui impose aux banques de proposer des dispositifs d’authentification dite « forte »4. Ce genre d’authentification s’appuie sur plusieurs paramètres : login + mot de passe, puis saisie d’un code reçu par SMS, par exemple. Ou login + mot de passe, puis recours à une interface d’identification biométrique,… Les possibilités sont infinies, mais à La Banque Postale, le système Certicode+ impose l’usage d’une application, sur smartphone ou sur tablette.
Je n’ai pas de téléphone mobile (ni smart ni dumb), mais je dispose d’une tablette, et j’ai une fois tenté d’y activer le fameux service. L’opération fût laborieuse, il fallait faire une demande, attendre un courrier, saisir un code, sans être bien sûr d’y comprendre quoi que ce soit… J’ai tout fait consciencieusement, mais dès l’activation je n’ai plus eu accès à la moindre opération sur mes comptes en ligne, que ce soit avec l’interface web ou avec l’application, apparemment devenues interdépendantes dans leur défectuosité.
J’ai heureusement pu annuler le service.
Hier, j’ai tenté d’effectuer un virement, mais après avoir saisi puis confirmé l’opération, j’ai eu droit à ce déplaisant résultat :
Hmmm. Je m’attendais évidemment à ce que ça arrive un jour. Mais ce que je n’attendais pas, c’était ce maigre espoir en fin de message :
Je ne comprends pas très bien ce qu’il faut activer, car je suis déjà souscripteur d’un service intitulé « Certicode », qui m’appelle sur mon téléphone fixe lorsque j’effectue un paiement auprès d’une des rares sociétés qui le prennent en compte — service d’approvisionnement en électricité ou en eau, notamment.
Mais j’ai décidé de suivre la consigne de de me rendre dans mon bureau de poste. Je savais néanmoins par avance ce qu’on m’y répondrait quelque chose comme « Gneuh !? ».
J’ai fait la queue dehors une bonne demi-heure, sagement, restant placide lorsque les habituels impatients ont obtenu de passer devant tous les autres au motif de leur droit naturel à le faire (puisque terriblement pressés, n’ayant qu’une toute petite chose à faire, etc.).
Et puis ce fut mon tour.
J’ai expliqué à l’agente mon problème : je ne peux plus effectuer de virement et on m’a demandé de venir en personne activer le service « certicode ». Elle me reprend :
« — Certicode plus !
— Non non, Certicode, sur votre site ils disent qu’on peut activer Certicode-tout-court si l’on ne dispose pas d’un smartphone.
— Ah bon, alors pouvez-vous me présenter une pièce d’identité, un chéquier ou une carte-bleue ?
— J’ai tout ça.
— Ah, et par hasard vous n’avez pas amené avec vous un justificatif d’abonnement téléphonique ?
— Ah non, je n’y ai pas pensé, mais vous avez mon numéro sur votre ordinateur, il n’a pas changé depuis trente ans !
— Oh oui mais ça hein… »
L’absence du document ne doit pas être rédhibitoire car l’agente commence à remplir un formulaire. Mais subitement elle me regarde, foudroyée par la surprise, les yeux écarquillés, et me dit :
« — Mais votre numéro, c’est un zéro-un ! Il faut un zéro-six !
— Euh… Comme je vous disais, je n’ai pas de téléphone mobile. J’ai bien un téléphone fixe, en revanche.
— Ah mais c’est impossible, alors, il faut absolument un mobile.
— Je vous assure que votre site web ne dit pas ça ! Il dit :
— Alors là ! Je n’ai jamais entendu parler de ça !
— Je vous assure, vérifiez !
— Je vous crois. Mais vous savez, c’est la première fois que la question se pose. Je vais aller voir une collègue un peu plus au courant, parce que je n’ai jamais entendu parler de ça, jamais ! [J’ignore si « ça » désigne les gens qui n’ont pas de téléphone mobile] »
Je la vois alors faire une tournée des portes de bureaux, d’où elle se fait systématiquement envoyer paître : personne n’a de temps pour elle.
Elle finit par intercepter une collègue plus expérimentée, à qui j’expose mon problème.
« — Ah mais monsieur, c’est impossible, on ne peut pas faire ces opérations sans smartphone.
— Ce n’est pas ce que dit le site !
— Je vous assure que ça n’est pas possible.
— Mais sur le site il y a bien écrit que…
… [je continue] Et vous savez, tout le monde n’a pas de téléphone mobile, on ne naît pas avec un téléphone mobile dans la main ! Quand j’ai ouvert mon compte à la poste5, les téléphones mobiles n’existaient pas ! Je ne vais pas prendre un abonnement à un service de téléphonie mobile juste pour pouvoir utiliser mon compte en banque !
— Il n’y a pas d’autre solution.
— Vous avez tort ! [mon exclamation la fait sourire], enfin vous êtes mal renseignée, le site dit…
— Il n’y a pas de solution, monsieur.
Elle esquisse un sourire supérieur qui signifie « tôt ou tard, on t’aura ! » et tourne les talons.
La première agente écrit sur un post-it le numéro de téléphone (fixe !) et l’adresse e-mail de ma conseillère — redoutable personne, si c’est la même, qui avait réussi à me faire souscrire à une assurance obsèques bizarre alors que je venais tenter (sans y être jamais parvenu) d’ouvrir un autre compte bancaire —, afin que je lui demande si elle dispose de plus d’informations.
Je lui écrirai, malheureusement certain que sa réponse sera quelque chose comme : « Gheuh ?! »
Je sens que mon existence sans téléphone mobile est partie pour ressembler chaque année un peu plus à une farce triste à mi-chemin entre le sketch des croissants de Fernand Raynaud et Le Procès de Franz Kafka.
- Pour reprendre le mot d’Edgar Degas : « C’est ça le téléphone ? On vous sonne comme un domestique et vous accourez ! » [↩]
- Je crois que j’ai eu mon compte courant à la Poste en 1986 ou 1987… À l’époque, le web n’existait pas, les tablettes étaient de la science-fiction, et le téléphone mobile de Gordon Gekko dans le film Wall Street devait peser plusieurs kilos et n’était pas spécialement « smart ». Je n’ai jamais signé pour qu’on m’impose un service reposant sur des technologies à venir. [↩]
- Contrepèterie ! [↩]
- Directive sur les services de paiements, ou DSP2. [↩]
- Je me demande depuis quand je suis à la Poste : 1987 ou 1988, sans doute… À l’époque c’était un service public et, d’après Que Choisir?, et c’est ce qui avait motivé mon choix, le plus honnête qui soit. [↩]
Faut ruser. Je n’ai pas de téléphone mobile, n’en ai jamais eu n’ai pas l’intention d’en acheter un, mais j’ai une tablette. Avec une carte SIM et un abonnement à zéro euro chez Free.
Et j’allume le bidule uniquement quand j’en ai besoin soit, en fait, au moment de réaliser une opération financière.
Mais je n’ai pas de téléphone mobile. Et j’ai peur que, en dehors d’astuces de ce type, de plus en plus, tout résistance soit futile.
Bien sûr, il y a des ruses possibles mais pour le principe, ça m’énerve.
Je découvre vos billets « vie sans mobile » et j’ai enfin l’impression de ne pas être seule au monde… De plus en plus, on se sent exclus des moindres actes de la vie quotidienne : en ce qui me concerne, accéder à mon espace adhérent mutuelle, m’inscrire sur une plate-forme de services, acheter en ligne sur certains sites où il faut obligatoirement un 06 quelque soit le mode de livraison choisi… Pour la Poste, même souci, sauf que j’ai réussi à activer le service sur la tablette (comment, je ne sais pas, ce fut un pur hasard…). Mais du coup, je ne peux faire les virements que sur la tablette, sur l’ordi ça ne veut plus.
Mais comme vous, je résiste ! No pasaran 🙂
@Hélène : j’étais d’accord pour l’activer sur ma tablette mais ça ne fonctionnait pas du tout ! En fait une fois certicode+ activé, je n’accédais plus à rien du tout !
Bonne nouvelle : on peut inventer des faux numéros de téléphone mobile pour certains cas (ceux qui ne nous imposent pas de confirmation), il faut qu’ils commencent par 06 39 98 : ce sont les numéros fictifs dédiés aux productions audiovisuelles.
j’ai eu exactement la même aventure que Jean No, 3/4 d’heures à la poste pour un résultat nul!Je reçois pourtant parfois des codes sur mon fixe, ça marche bien, comment c’est possible?Pour quelle raison la possession d’un portable est obligatoire (c’est écrit dans la loi?) où est le respect des client pour les banques? J’ai deux comptes aux CCP (à l’époque, les enveloppes d’envoi étaient gratuites, bien pratique pour les personnes habitant en milieu rural, ça a été supprimé sans justifications, pour gratter un peu sur les clients) depuis 50 années, leur mépris est incroyable!
Je n’ai plus d’accès internet sur mon compte pro depuis plusieurs années, mon code a été supprimé sans préavis, je devrai payer 60€ par an pour y avoir droit (alors que ça marche sans soucis sur mon compte perso..), quand j’ai protesté auprès du directeur du centre en demandant ce que faisait la banque postale pour ses clients fidèles, j’ai eu pour réponse l’envoi de la brochure tarifaire, façon lapidaire de dire: on s’en fout complètement!
Je confirme qu’il est devenu (brutalement) impossible d’utiliser les « sévices » de la BQ Postale sans posséder un smartphone « intrusif_et_espion ».
C’est BRUTAL et y a a pas eu de préavis.
Contrairement aux infos affichées sur labanquepostale.fr, la réception d’un SMS sur un télépĥone « non smart » NE SUFFIT PLUS.
Y a pas d’aide en ligne. Je n’ai plus de conseillère financière et je n’ai pas trop envie d’avoir à me déplacer pour en rencontrer une qui cherchera certainement à me proposer de nouveaux services ou placements pourris.
Je crois que La BP a perdu un client, car une autre banque concurrente me propose un dispositif sécurisé qui remplacerait le smart phone.
Quelqu’un a-t-il réussi à se faire dispenser de cette ´´« protection » ?
J’ai exactement le même problème avec ma mère qui a 86 ans et qui est en panique devant la lettre « incendiaire » de la banque postale lui imposant de régulariser sa situation, tel un malfrat qui a piqué dans la caisse. En cas de refus, l’accès au site lui serait retiré et donc à toute opération et visualisation de ses comptes ; ah oui j’oubliais, il y a quelque temps, ils lui ont supprimé l’envoi des relevés mensuels en papier sans la prévenir vraiment (en tout cas sans lui laisser le choix).
Elle a ouvert son compte il y a une bonne cinquantaine d’années. Peut-être que la fidélité commence à partir du siècle ? Auquel cas elle n’a effectivement fait que la moitié du chemin
Sinon le site de la Banque Postale dit :
« Si vous n’avez pas de téléphone mobile, vous pourrez toujours consulter le solde de votre compte et les 5 dernières opérations en appelant le :
09 69 39 36 39 service gratuit + prix d’appel , disponible 24h/24 avec votre identifiant et mot de passe actuels »
On donne quand même son mot de passe à un serveur vocal !!!!
Bravo la sécurité !!!!!!!
tout a fait en accord avec tous .
moi j ai un problème bien plus grand !
je n ai jamais pût établir une carte identité.
( piece manquante …. )
mon passeport est réalisé. et périmé en 1990 .
pour changer num tel certicode ( tel désactivé par orange )
il faut une carte identité .
le problème de fabrication carte identité resurgit .
Je suis dans la merd…