Isabelle Hadengue

Isabelle a toujours aimé dessiner, ça a même été son principal loisir bien qu’elle ne l’ait pratiqué que de manière solitaire, sans fréquenter d’atelier.
Au lycée, elle aurait aimé suivre la filière F12 (arts appliqués), ce qu’on nomme à présent STD2A. Elle avait malheureusement de trop bonnes notes pour que ses enseignants la laissent s’engager dans une section technique et elle s’est résignée à suivre, sans convictions, la filière littéraire. Une fois bachelière, elle a hésité entre des études en éducation spécialisée (qu’elle ne regrette pas de ne pas avoir suivi à l’époque, jugeant désormais qu’elle n’aurait pas été prête), et des études en art. Elle a envisagé plusieurs formations (les écoles d’art appliqué parisiennes, notamment, ou encore les Beaux-arts de Rouen) et finalement, c’est dans sa région qu’elle a été acceptée, à l’École supérieure d’art et de design d’Amiens, en 1995, sans avoir de connaissance particulière de ce qu’étaient le design ou le design graphique.
Elle se souvient avoir été enthousiasmée par le lieu : une friche industrielle reconvertie, qui lui semblait un espace où on pouvait créer, l’esprit libre, et expérimenter toutes sortes de techniques relevant des Beaux-arts plus ou moins traditionnels : lavis, photographie, dessin, sérigraphie. Elle ne se sentait pourtant pas très sûre d’elle-même, mais elle se souvient surtout d’une relative perte de plaisir ou de liberté lorsque l’ordinateur est arrivé — il était encore très rare dans les écoles d’art, notamment en première année. Peu disserte sur ses études, elle les juge épanouissantes et, si c’était à refaire, aurait peut-être cherché une formation plus tournée vers l’art. Elle conserve un grand souvenir de ses stages, chez le designer Pippo Lionni à Paris et au sein de l’agence Dolcini Associati, à Pesaro en Italie.

En 2001, elle a consacré son accrochage de DNSEP à la cécité, plongeant le jury dans l’obscurité et proposant toutes sortes de dispositifs de communication à destination des aveugles. Elle a mené ce projet concret en grande autonomie, ne se sentant pas spécialement soutenue ou accompagnée par ses enseignants, à l’exception de Ramuntcho Matta. Elle a en revanche fait des rencontres en dehors de l’école, notamment à la Cité des Sciences et de l’industrie. Le jury a été très réceptif au résultat et Isabelle a quitté l’école diplômée avec les félicitations, prête à conquérir Paris, en indépendante. Le moment n’était pas vraiment propice à un début d’activité puisque trois moins plus tard l’attentat du 11 septembre 2001 paralysait le monde de la communication visuelle, qui s’est trouvé à l’arrêt pendant des mois. Mais Isabelle est malgré tout parvenue à se faire confier une première missions par une agence et n’a plus jamais eu de mal à trouver de travail par la suite. Comme beaucoup de freelances, elle a surtout eu du mal à en refuser : on vient d’arriver sur le marché du travail, on n’a pas encore de réseau professionnel, on veut gagner sa vie, alors comment dire non à la demande d’un client, même si ça doit être au prix de ses nuits et de sa santé, et même si cela doit se traduire par de vraies frustrations artistiques, car l’adrénaline des « charrettes » ne compense pas la déception de devoir faire vite et mal. C’est lorsque sa fille est née, il y a désormais dix ans, qu’elle a eu envie d’autre chose, qu’elle a pris un certain recul et qu’elle a décidé de changer de manière de travailler. Revenue en Picardie, elle aime travailler au café, et garde comme clients (et, précise-t-elle, essentiellement clientes) les gens avec qui elle a plaisir à échanger. Elle s’est aussi intéressée au domaine du développement personnel, à la kinésiologie et au design humain, une méthode d’introspection qui s’inspire de l’astrologie, du Yi King, de la Kabbale et des Chakras. Ce domaine l’a aidée à apprendre à s’écouter, à se recentrer sur les rapports humains et à conjurer le sentiment de mélancolie propre aux métiers créatifs.
Son activité se partage désormais entre le graphisme, le développement personnel et la diffusion de produits naturels (shampoings artisanaux sans emballage, par exemple) qui correspondent à ses valeurs écologistes.
C’est dans ces domaines qu’elle compte continuer à s’épanouir, en se recentrant plus encore sur le rapport aux autres, peut-être en animant des ateliers consacrés à aider ceux qui y participent à mieux se connaître eux-mêmes.

Géraldine Rey

Après près de dix ans en Australie, Géraldine n'avait pas de lieu pour l'entretien. Nous avons donc échoué complètement par hasard au Vénitien, 23, boulevard des Italiens à Paris. Il faisait un ou deux degrés dehors. Quelques dizaines d'heures plus tard, Géraldine serait rentrée à Perth, où il fait plus de trente-cinq degrés.
Après près de dix ans en Australie, Géraldine n’avait pas de lieu pour l’entretien. Nous avons donc échoué complètement par hasard au Vénitien, 23, boulevard des Italiens à Paris. Il faisait un ou deux degrés dehors. Quelques dizaines d’heures plus tard, Géraldine serait rentrée à Perth, où il fait plus de trente-cinq degrés.

Géraldine est née en 1978, elle a grandi en Moselle, à Thionville. Sa mère était pharmacien assistant et son père était professeur d’éducation manuelle et technique (« techno », dit-on à présent) en collège. Elle commence à apprendre la programmation informatique, entre huit et dix ans, grâce à une initiative locale des Postes et Télécommunications1, qui proposaient un apprentissage hebdomadaire du langage Basic sur ordinateur Thomson MO5 à un petit groupe d’enfants, avec au programme de la théorie, de la pratique, et un temps pour jouer, notamment à Dracula, sur Apple II. Géraldine n’a jamais été dessinatrice mais, avant même de savoir qu’il existait, le métier de graphiste l’attirait, et elle passait par exemple du temps à créer des lettrages pour des compilations musicales qu’elle réalisait sur cassettes audio. À l’école, elle a des facilités pour les sciences, et suit assez naturellement ce cursus. Lorsqu’elle décide d’entrer en école d’art, ses enseignants ne l’encouragent pas et elle ne peut pas suivre d’option arts plastiques au lycée : c’est un ancien prof de collège qui l’aidera à préparer son dossier. Ses parents l’ont toujours encouragée à aller là où elle voulait, mais avec une condition : il ne faut pas le faire à moitié. Elle se présente sans succès à Nancy, où elle est déroutée par les questions du jury d’admission, très orienté « art contemporain », mais est admise à l’école des Beaux-arts de Lyon. L’école est énorme — près de quatre vingt étudiants la première année —, mais elle s’y plait tout de suite, notamment pour tout ce à quoi on l’initie, de la gravure à la théorie du cinéma. Elle s’intéresse à l’époque à la notation de la danse, qui restera longtemps un sujet important pour elle, et s’initie à la mise-en-page avec un logiciel aujourd’hui oublié : Aldus Pagemaker. Malgré cette bonne expérience, Géraldine veut se spécialiser dans le graphisme et postule, soutenue par ses enseignants, à l’école d’art voisine de Valence, où elle entre par équivalence et où elle passera deux ans encadrée par Gilles Rouffineau, Jean-Pierre Bos et Annick Lantenois (qui venait d’arriver), qui la mènent jusqu’au DNAT. Elle profite de l’émulation de sa promotion, d’où émanent de nombreux directeurs artistiques devenus importants aujourd’hui, comme le célèbre duo De Valence.

Géraldine garde un souvenir très vif de ces années et de tout ce qu’elle a fait et appris au passage. Il lui a été impossible de continuer après la troisième année, puisque l’école n’avait à l’époque aucun second cycle d’études. Elle se présente alors dans deux écoles : les Arts décoratifs de Paris, et l’école supérieure d’art et de design d’Amiens. Elle sera acceptée dans les deux, mais choisit finalement Amiens, moins prestigieuse, peut-être, mais dynamique. Elle ne se sent pas vraiment prête pour devenir parisienne. C’est à l’Esad d’Amiens que je l’ai rencontrée. En second cycle, elle a surtout comme enseignants Jean-Louis Fréchin, Philippe Millot et moi-même. Je me souviens pour ma part d’une étudiante enthousiaste, talentueuse et aussi à l’aise avec la programmation qu’Olivier Cornet, un de ses camarades de promotion, devenu depuis enseignant à l’école. Une des expériences qui l’a marquée est un voyage d’échange avec la Turquie. En cinquième année, elle prend quelques distances avec l’école, car après un stage chez Hyptique, elle se voit proposer par cette société un emploi à mi-temps et décide d’habiter Paris : elle ne vient plus à Amiens que deux jours par semaine, pour préparer son diplôme, consacré à la notation chorégraphique Laban, qu’elle obtient en 2001. Les stages font partie des expériences qui ont le plus plu à Géraldine, puisqu’en six années d’étude, elle en a fait sept.

Hyptique, où elle sera donc employée deux ans et demi, était à l’époque un acteur central de l’édition multimédia, qui connaîtra une crise culturelle face à l’importance croissante d’Internet. Après ces années, Géraldine devient graphiste freelance tout en acceptant un poste d’enseignante à l’école multimédia, une école de formation continue parisienne. Cela ne durera que deux ans : les travaux freelance, très centrés sur la communication visuelle et la publicité, lui pèsent, mais elle apprécie l’enseignement et devient même responsable pédagogique du département design de l’école.
En mars 2005, elle a l’opportunité, selon son expression, de « faire un break » et de partir en Australie avec un visa « working holiday », qui permet à de jeunes étrangers de visiter le pays et, s’ils le veulent, d’y travailler. Elle exercera divers métiers de la restauration et apprendra l’anglais. Son année de « working holiday » écoulée, elle veut rester en Australie, et doit trouver une entreprise qui accepte de la parrainer, c’est à dire qui s’engage à l’employer. Elle aura deux propositions : un poste de graphiste interne à l’université Curtin de Perth, et l’autre dans une société à peine née, dont le fondateur est l’unique employé, Bouncing Orange. Au fil des années, la société passera de deux à quinze employés, et Géraldine y occupera tous les postes possibles, de la direction artistique à la stratégie en passant par le développement et la gestion de projet. Pour l’anecdote, elle amènera à l’époque l’utilisation du « content management system » plutôt franco-français Spip, auquel elle substituera plus tard Drupal et WordPress. Après huit ans, la direction que prend la société ne lui convient plus, et elle la quitte après un « clash » assez brutal. Elle effectue ensuite un an dans une société de communication, en remplacement d’une femme en congé de maternité. L’ambiance est médiocre, le travail souvent déplaisant, si ce n’est qu’il permet de découvrir la réalité de l’industrie, et des métiers tels que le stylisme culinaire.

En avril 2014, elle se met à son compte avec sa société Digital Chic, à East Fremantle, dans l’agglomération de Perth. Elle profite instantanément des presque dix années passées à constituer un réseau amical et professionnel, et sans doute un peu du charme que confère un accent français dans les pays anglophones. Elle n’a alors même pas besoin de disposer d’un véritable site web, les clients sont déjà là. Elle a pourtant du mal à définir son métier, qui regroupe diverses compétences, de l’identité visuelle au conseil en passant par la gestion de projet. Elle travaille seule ou avec des sous-traitants, selon les projets. Mais elle est aussi chanteuse, auteur, compositeur, et se produit sur scène de manière régulière. Vingt-cinq pour cent de ses revenus viennent de ses « gigs corporate » (des sessions musicales privées, souvent composées de reprises de standards jazz ou pop), ou des concerts de musique originale. Elle n’est pas une grande musicienne et n’a pas de voix spéciale (c’est elle qui le dit en tout cas), son talent est plutôt d’être une « entertaineuse ». Elle espère que la musique finira par constituer la moitié de ses revenus.

À bientôt trente-sept ans, avec un nouveau départ professionnel mais aussi personnel, Géraldine se donne pour but de trouver un bon équilibre dans son métier en perpétuelle mutation, et espère gagner assez bien sa vie pour voyager un peu plus, ce qui n’est pas évident lorsque l’on habite la ville la plus isolée du monde2.
Depuis qu’elle a quitté le lycée pour l’école des Beaux-Arts de Lyon, Géraldine a l’impression d’avoir vécu dix vies. Elle me disait, au moment où nous nous sommes quittés, qu’il faudrait peut-être que plus de gens effectuent des cursus en école d’art, qui servent avant tout à se trouver soi-même, bien qu’elle ne soit pas certaine que tout le monde soit capable d’accepter le voyage.

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  1. Jusqu’à la fin des années 1980, La Poste et France Télécom/Orange étaient une seule et même entreprise publique sous le nom de PTT puis P&T. []
  2. Perth est souvent qualifiée de ville de plus d’un million d’habitants « la plus isolée du monde » car elle est située sur la côte occidentale de l’Australie et est plus proche de Djakarta, en Indonésie, que de villes australiennes telles que Sydney ou Melbourne, de l’autre côté de l’île. Il y fait chaud et la durée des journées varie peu au cours de l’année, puisque l’endroit est au même niveau que l’Afrique du Sud ou l’Uruguay. Les gens se lèvent tôt, finissent de travailler tôt, la vie est chère mais l’ambiance est détendue et on donne leur chance aux gens qui ont des projets. []

David Longuein et Jean-Luc Lemaire

David_Longuein_Jean-Luc_Lemaire
Lieu : La Laverie, bar situé au 1 de la rue Sorbier, dans le vingtième arrondissement de Paris. David est à gauche, Jean-Luc à droite.

David et Jean-Luc se sont rencontrés à l’école supérieure d’Art et de Design d’Amiens où ils ont été étudiants de 1997 à 2002, ce qui correspond exactement à la période où j’y enseignais. À présent, ils travaillent ensemble au sein de plusieurs structures et d’un grand atelier qu’ils partagent avec quelques autres amis.
Leurs parcours sont assez différents. David, qui est né en 1977, a commencé par un cursus en architecture à Lille, puis est entré en arts plastiques à Amiens. Enfin, il a passé le concours d’entrée de l’école d’art et de design, en convainquant ses parents que le design graphique était un vrai un métier. Il est venu au concours d’entrée avec ses peintures.
Jean-Luc, né en 1975, a commencé par s’orienter vers la biologie. Après trois années, il a passé le concours de quelques écoles d’art, car le domaine l’attirait (même s’il n’avait pas une grande idée de ce qu’est le graphisme), en se disant que soit il intégrait une école d’art et abandonnait les sciences, soit il n’y parvenait pas, et restait scientifique.
David et Jean-Luc sont plutôt d’accord sur le bilan qu’il y a à tirer de leurs études : l’école était dynamique, pleine de possibilités pour ceux qui avaient envie d’en tirer parti. Ils en tirent, aussi, des rencontres, et chacun s’est d’ailleurs marié à une ancienne camarade de l’école.
Sur les dernières années, ils sont plus réservés : David était freelance dès la quatrième année, statut qui crée parfois un rapport curieux aux études : comment expérimenter en toute liberté lorsque l’on a déjà un rapport au client ? Il reste très content de son diplôme final, ce qui est moins vrai pour Jean-Luc, qui reste un peu frustré du résultat — peut-être un peu par la faute de son prof de multimédia (votre serviteur !), qui l’a poussé à ce que son travail interactif soit totalement fonctionnel, alors qu’il aurait été aussi bien de s’en tenir à un prototype de démonstration. Il est en revanche heureux de tous les voyages qu’il a effectués pendant ses années d’étude. Le DNSEP de David était consacré au livre, celui de Jean-Luc au multimédia interactif.
En sortant de l’école, Jean-Luc a à son tour pris un statut de travailleur indépendant. David a d’abord travaillé avec un des ses anciens professeurs, Olivier Champion, dans le domaine du disque. Au milieu des années 2000, le disque est devenu un domaine nettement moins rémunérateur pour les graphistes, et David a alors dû travailler seul, principalement dans le domaine de l’édition. De son côté, Jean-Luc a beaucoup travaillé avec le collectif d’artistes UltraLab™, et sa structure plus ou moins jumelle Labomatic™. Jean-Luc et David se retrouvent en 2007 pour un s’occuper de la communication de la foire d’Art contemporain Slick. En 2008, Labomatic™ se sépare, mais ses membres continuent plus ou moins de travailler ensemble, sous plusieurs noms (Lord of Design™, PBNL, L775, et enfin Art, Book, Magazine et ABM Studio), dont tous n’ont pas d’existence juridique. Je ne vais pas rentrer dans les détails, n’étant pas certain d’avoir tout compris. Je retiens que pour eux, travailler en groupe, même informel, est une force.
En 2011, excités par les possibilités de l’iPad et consternés par l’absence de bonnes réalisations dans le domaine du livre numérique, David, Jean-Luc et leurs amis créent Art, Book, Magazine, une plate-forme d’édition et de réédition de livres d’art, et notamment de catalogues d’exposition. Dans ce cadre, avec leur studio ABM Studio, ils développent notamment le savoir-faire qui leur permet de réaliser une monographie évolutive de Claude Lévêque, qui pourrait servir de modèle à bien d’autres catalogues muséographiques.
Les projets les plus passionnants sur lesquels travaillent David et Jean-Luc ne sont pas toujours les plus rémunérateurs, le métier est rude et connaît des hauts et des bas, d’autant que les budgets sont plutôt en baisse. Ils tiennent néanmoins le coup, grâce à des domaines tels que le luxe, et ne semblent pas prêts à renoncer à leur autonomie pas plus qu’au plaisir de collaborer à des projets stimulants.

Leurs divers sites : L775 | Art, Book, Magazine | ABM Studio

Benoît Wimart

B
Benoît, à la « Brasserie des Belges », rue de Saint Quentin.
La sonnerie de son téléphone est un morceau du groupe Royksöpp.

Benoît est né en 1977. Il a grandi à quelques dizaines de kilomètres d’Amiens et s’est d’abord orienté, au lycée, en section scientifique. Il aimait dessiner, il s’intéressait notamment au graffiti — sans le pratiquer réellement hors de ses cahiers, ou sous forme d’autocollants. Mais il s’intéressait aussi beaucoup à l’informatique, bien que ses parents ne lui aient acheté un ordinateur qu’une fois son baccalauréat passé. Il ne s’est pas beaucoup plu en cursus maths/informatique à l’université, mais il passait ses nuits à utiliser tous les logiciels qu’il parvenait à se procurer : Corel Draw et Microsoft Publisher, pour le graphisme ; Paint shop pro pour le traitement d’images ; Deluxe Paint pour le dessin ; etc. Il dévorait avidement les magazines tels que Computer Arts ou Studio multimédia. Plus tard, toujours pour s’informer, il a fréquenté des forums ou des listes de diffusions telles que « Pistes-L ».

Il est arrivé au concours de l’école supérieure d’art et de design d’Amiens avec un lutin rempli d’impressions d’images réalisées avec un logiciel de 3D, avec une affiche réalisée aux crayons de couleurs, mais aussi avec un site Internet, qu’il avait réalisé sans être connecté, à l’aide du logiciel Netscape Composer. On était en 1998 et, même si Internet commençait à être connu du public, rares étaient ceux qui y étaient connectés. Benoît s’est vite fait la réputation d’être le « geek » de l’école, et il a souvent été mis à contribution pour des tâches telles que le paramétrage du réseau de l’école ou la réalisation du site web d’enseignants. Mon épouse Nathalie et l’artiste Marie-Ange Guilleminot l’ont d’ailleurs fait travailler sur une maquette interactive en 3D, réalisée d’après des plans de Lygia Clark, pour une exposition à la biennale de Sao Paulo. C’est avec Denis Toulet, qui enseignait le graphisme à l’Esad, que Benoît a le plus assidûment collaboré sur des projets extérieurs à l’école.

Lorsque Benoît a obtenu son diplôme, Denis Toulet, justement, lui a proposé de devenir l’assistant de ses cours à l’école d’art d’Arras, trois jours par semaine, ce qui lui laissait du temps pour travailler en freelance. L’embauche a traîné à se concrétiser et les conditions proposées par la mairie se sont avérées de moins en moins avantageuses. Benoît est loin de n’être qu’un « geek », il est aussi un authentique designer graphique.
C’est une toute autre histoire, mais il faut signaler que Benoît est aussi un percussionniste sérieux, il a un temps été très impliqué (participant à beaucoup de concerts, sans pouvoir ne vivre que de ça) dans le domaine.

De ses années à l’école d’art d’Amiens, il retient de s’être formé le goût et d’avoir acquis le sens du design, de ce qui est « gratuit » et de ce qui ne l’est pas. Je me souviens de lui comme d’un étudiant très autonome, qui aimait trouver les solutions par lui-même, bien comprendre ses outils, et partager ses connaissances avec les autres étudiants.

Benoît a un temps envisagé de poursuivre ses études à Waide Somme, une école spécialisée dans l’animation et la 3D, qui émane de l’Esad. Il s’est inscrit à la Maison des Artistes. Il a participé à des concours (dont un lui a payé les licences de ses logiciels), a été graphiste pour l’ASSEDIC, il a réalisé des jeux Flash pour France 3, et continue, depuis, à effectuer des piges diverses. Il y a quelques années, il est revenu à l’école d’art d’Amiens pour en réaliser le site Internet. Et puis il s’y est fait embaucher comme professeur à mi-temps.

Site web : jaiunsite.com | blog : jaiunblog.com |  twitter : @BenoitWimart