La venue de l’an 2000 avait suscité beaucoup de publications (y compris au rayon informatique, avec le très populaire « bug de l’an 2000 »), mais je ne me souviens pas avoir vu des rayons de librairie sobrement nommés « 2000 ».
Cela se rencontre avec l’année 2012.
La célèbre prophétie Maya qui situe la fin du monde en 2012, popularisée par José Argüelles (Le facteur maya, 1987) et quelques autres, est donc devenue un rayon de librairie à part entière (ci-dessus, le rayon en question dans une grande surface Cultura), situé entre les ouvrages de « développement personnel » et ceux qui veulent nous convaincre de l’existence des anges gardiens (sans vraiment expliquer les défaillances de ces derniers dans certains milieux sociaux, pays, ou dans certaines situations politiques précises).
Je suppose que ce rayon 2012 va être amené à augmenter en volume au cours de l’année.
On y trouve de tout : du martien, de l’accident cosmologique, des chutes de météorites, des collisions avec des planètes cachées, le retour du Christ, et que sais-je encore. C’est la particularité de cette fin du monde-là, à mon avis : l’instant fait consensus et tout un secteur de l’édition s’y est opportunément engagée, mais les modalités de ce qui est censé arriver diffèrent beaucoup d’un auteur à l’autre.
On commence à voir fleurir des ouvrages plus critiques : Alain Cirou (Ciel et Espace) nous dit que « la fin du monde n’aura pas lieu » et Pascal Bruckner s’insurge des menaces de désastre qui sont brandies par les écologistes dans le but de sensibiliser au tri sélectif ou aux énergies propres (curieux d’en connaître l’argumentation, j’ai acheté ce livre mais pas encore lu).
On remarque que le livre d’Alain Cirou nous rassure par son titre tout en appâtant le chaland par une couverture cataclysmique : la fin du monde n’aura pas lieu, mais cette nouvelle rassurante est moins vendeuse, moins apte à faire ressentir un petit frisson au lecteur, que la promesse visuelle du désastre.
Pas étonnant que la fiction — la science-fiction — exploite ce thème aussi.
On trouve en ce moment des dizaines de livres différents sur le thème, avec une nette prédilection, me semble-t-il, pour les histoires de zombies.
Je n’ai repéré qu’un seul « beau livre » pour l’instant, Le dernier jours des dinosaures, par Igor et Grichka Bogdanov (et, surtout, même si son nom est écrit en petit, par l’illustrateur Laurent Charlatte), qui présente des fins du monde passées, en recourant à des scènes à l’esthétique spectaculaire où les évènements surviennent de manière brutale et cinématographique. Le propos du livre est, me semble-t-il, de dire que si cela a déjà eu lieu, alors cela arrivera à nouveau, notre monde connaîtra des désastres identiques dans le futur. Nous sommes donc toujours dans le sujet.