Gisants et transis

Les gisants sont des statues mortuaires qui représentent typiquement le défunt, généralement couché sur le dos en position de prière, ou tenant un sceptre, ou encore en attitude de repos. On en recense cinq-cent quarante trois dans les édifices religieux Français entre le XIe siècle (qui voit le retour de la sculpture funéraire) et la Renaissance. Certains morts ont trois tombeaux différents, et autant de gisants : un pour le corps, un pour le cœur et un pour les viscères.

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Les transis, apparus au XIVe siècle, sont des gisants dont la particularité est de représenter le défunt non pas vivant ou en position de sommeil, mais à l’état de cadavre en état de décomposition avancée, souvent rongé par des vers.
Ce phénomène, qui s’inscrit dans une période terrible de l’histoire européenne (guerre de cent ans, peste noire), a surtout touché l’Est de la France et l’Ouest de l’Allemagne. Les historiens de l’art ne s’accordent pas sur le sens profond qui peut être donné à cette évolution macabre de l’art funéraire1 : peur de la mort, célébration de la vie, rappel du destin qui attend chacun, et notamment les puissants (qui sont justement les sujets des gisants, qu’il s’agisse de transis ou non)…

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Il existe des gisants modernes, comme la très célèbre tombe de Victor Noir, au cimetière du Père-Lachaise. La mort du journaliste Victor Noir, tué d’un coup de feu par un neveu de Napoléon III le 10 janvier 1870, a participé à la chute de ce dernier, un an plus tard. La célébrité actuelle du gisant vient surtout du souci de réalisme dont a fait preuve le sculpteur, Jules Dalou, qui a représenté le jeune homme en état d’érection2. Depuis, une coutume superstitieuse pousse des femmes qui ne parviennent pas à avoir des enfants à venir toucher le détail trivial en question, ce que l’on constate effectivement à la manière dont le bronze est épargné par l’oxydation.

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Toujours parmi les gisants modernes, j’aime bien celui d’Augustine Trochery, morte en 1887 à l’âge de trente-et-un an, représentée sur son lit de mort par un sculpteur anonyme. Ce bronze se trouve au cimetière Carnot, à Suresnes :

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  1. Voir aussi : Danses macabres. []
  2. Curieusement, Félix Faure, voisin de cimetière de Victor Noir et lui aussi gratifié d’un gisant de bronze, n’a pas eu droit au même traitement, alors que les conditions de sa mort auraient pu le justifier. []
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Une réponse à Gisants et transis

  1. Wood dit :

    Un gisant remarquable : celui de Jean d’Alluye, chevalier mort en 1248, représenté en armure avec au côté une arme tout à fait inhabituelle car c’est, selon les experts, une épée chinoise.

    On ne sait comment elle est arrivée entre ses mains, mais il était en croisade en terre sainte au moment ou les Mongols affrontaient les Mamelouks en Syrie.

    Ce gisant, qui se trouvait à l’origine dans l’abbaye de la Clarté-Dieu près de Tours peut aujourd’hui être admiré au Cloisters Museum de New York. Il y est arrivé après avoir pas mal changé de mains suite à la destruction de l’abbaye en 1791. Il a même servi pendant un temps, retourné, de pont pour franchir un ruisseau entre deux champs.

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