Koh-Lanta, ou l’aliénation de la libre-concurrence
janvier 14th, 2013 Posted in indices, Série(Avertissement : cet article établit un parallèle spécieux entre un jeu télévisé et une structure économique et politique. Vous le lisez à vos risques et périls)
Devant Koh-Lanta, je trépigne et je m’épuise, malgré le caractère fascinant de cette émission. Ce n’est pas tant le programme lui-même qui m’irrite, que les coupures publicitaires et le recours aux flash-backs et aux bégaiements de séquences qui permettent au réalisateur de faire durer pendant une heure trente un programme qui pourrait très bien ne durer qu’une demie-heure. Et l’impression de redite dépasse même le cadre de chaque épisode puisque, année après années, les mêmes situations, la même narration, les mêmes phrases sont répétées. Alors je ne tiens pas, je passe de temps en temps devant le poste, mais je ne suis le déroulement du jeu qu’avec distraction et en oubliant les noms des participants — en me faisant résumer l’action par tous ceux, chez moi ou sur Twitter, qui ne rateraient pas un épisode.
Qu’est-ce que Koh-Lanta ?
Je dois expliquer ce qu’est Koh-Lanta au lecteur qui n’a pas de téléviseur ou qui évite ce genre de programmes : il s’agit d’un jeu dit de télé-réalité diffusé depuis douze ans, dont les participants vivent sur une île déserte pendant une durée d’une quarantaine de jours et doivent concilier une existence en conditions de survie (l’émission anglo-saxonne originelle s’appelle d’ailleurs Survivor) avec des épreuves ludiques diverses. Les jeux permettent d’aboutir à la victoire finale d’un participant, mais aussi de rendre moins monotone le spectacle de la vie quotidienne des participants.
Cette émission pourrait être une formidable expérience de psychologie sociale, mais la réalisation (qui abuse de montages parallèles très orientés, par exemple) et le commentaire explicatif qui est donné en voix-off faussent la compréhension que le spectateur peut avoir de l’action. Le dispositif est par ailleurs très opaque, on ne voit jamais une caméra dans le champ, on ignore combien il y a de cadreurs en tout et on ne sait pas si ces derniers donnent des indications ou posent des questions aux gens qu’ils filment, car tout est fait pour que l’on résume l’existence de la production du programme à une unique personne : l’animateur Denis Brogniart. Certaines ellipses abruptes, certaines allusions et certaines maladresses permettent de deviner qu’une bonne partie de l’action et des conversations nous est occultée, à fins de simplification scénaristique. J’ignore s’il arrive que les participants se rebellent contre les conditions auxquelles on les soumet. S’ils le font, cela n’apparaît jamais à l’écran, on n’entend même jamais la moindre protestation face à la difficulté ou à la cruauté d’une épreuve.
Koh-Lanta n’est donc pas un outil scientifique pour étudier les comportements humains, mais certaines constantes ne lassent pas de me fasciner. La plus étonnante est l’invention express d’un « nationalisme » : les concurrents sont d’abord séparés en deux équipes concurrentes, appelées tribus : les « rouges » et les « jaunes », auxquelles on donne des noms exotiques : Mawar, Batang, Mingao, Wasaï,… Au bout de quelques jours, les uns et les autres se sentent profondément patriotes de la tribu à laquelle on les a affectés. Une fois passé le moment de la « réunification », c’est à dire lorsque les tribus sont fusionnées et que chacun ne représente plus que lui-même, les couleurs attribuées arbitrairement continuent pourtant à peser. En fait, tant que le nombre de participants n’est pas descendu en dessous d’un certain seuil, chacun persiste à se définir comme « rouge » ou comme « jaune » et à échafauder alliances et stratégies en fonction de ces appartenances à des groupes créés arbitrairement quelques jours plus tôt, et ce contre leurs principes éthiques, contre les liens amicaux qu’ils ont pu tisser avec les membres de ce qui était le camp adverse et malgré les inimitiés qui les séparent de ce qu’ils considèrent, en dépit du bon sens, être le groupe auquel ils appartiennent. Le processus se répète invariablement chaque année, quel que soit le milieu socio-culturel et le niveau intellectuel des participants et alors même que ceux-ci arrivent sur l’île en ayant visionné en tant que spectateurs le déroulement des sessions précédentes et en étant, donc, avertis de tous les pièges qui les attendent. Les conditions de vie difficile sur l’île et les émotions fortes liées aux jeux, semblent suffire à aboutir chaque fois à cette situation. Sous-alimentation, épuisement physique et grandes émotions sont les outils classiquement utilisés par les groupes sectaires et les séminaires d’entreprise pour amener leurs victimes à abandonner leur individualité et à s’identifier à un groupe.
Dans la vie du camp, plus ou moins livrés à eux-mêmes et responsables de leur propre bien-être, les participants adoptent un comportement plutôt compréhensible : certains tirent au flanc, espérant que ça ne se verra pas trop, d’autres font des efforts ostensibles, certains sont responsables, certains aiment diriger, d’autres aiment suivre, etc. Pendant les épreuves, les candidats de chaque équipe se montrent plutôt soudés et capables de fair-play. À intervalle régulier, enfin — une fois par semaine pour ce qui concerne le téléspectateur —, ont lieu des « conseils » au cours desquels les participants appartenant à l’équipe qui a perdu le dernier jeu règlent leurs comptes verbalement et votent, à bulletin secret, contre un des membres de leur propre tribu, qui est exclu et doit quitter l’île.
C’ette partie du jeu pèse lourdement sur l’ensemble, et sans doute aussi sur l’identification tribale que je mentionnais plus haut : pour convaincre le groupe que l’on ne doit pas être exclu d’une équipe, il faut convaincre ses co-équipiers que l’on est au moins autant un « vrai » membre de la tribu qu’eux. Acculés à une compétition forcée, les participants apprennent vite à ne coopérer que de manière calculée, à se mentir, à échafauder des stratégies, à conclure des pactes, pactes dans lesquels les questions « nationalistes » (rouges contre jaunes) servent d’argument imparable : « Jocelyne, je vote contre toi, car tu n’as jamais réussi à t’intégrer au sein des rouges » (à quelqu’un qui a changé d’équipe en cours de jeu) ; « Gérard, je vote contre toi car tu resteras toujours un jaune » (après la « réunification »). Cette question que j’appelle « nationaliste » n’est pas l’unique motif d’exclusion : avoir fait perdre son équipe lors d’un jeu, avoir manqué de dynamisme sur le camp, être fatigué, être malade, déprimé, ou encore être soupçonné d’iniquité lors du partage de la nourriture sont des raisons fréquemment données, et nettement plus compréhensibles. Pour finir, je note que les joueurs qui sont écartés temporairement de leurs camarades parce qu’ils ont remporté un « jeu de confort » (une épreuve dont le vainqueur est, typiquement, emmené sur une autre île pour manger de la viande rôtie, des fruits ou du chocolat), sont souvent victimes de jalousie, et pâtissent du fait de ne pas s’être trouvé au bon endroit au moment où les alliances se sont conclues.
La loi de la jungle est-elle naturelle ? Et l’Europe, dans tout ça ?
Au fond, ce qui rend vraiment cruelle la « loi de la jungle » dans ce jeu, c’est qu’elle n’a rien de spécialement naturel, qu’elle est biaisée par des interventions et des règles qui au lieu d’encadrer et de « civiliser » les relations entre participants, imposent un climat de concurrence malsaine et laissent extrèmement peu de place à des comportements valorisants. La coopération ou la convivialité sont, de force, remplacés par la défiance, la fourberie. Les concurrents qui n’aiment pas se voir en compétiteurs sans pitié dépensent leur énergie à forger des excuses vaguement valorisantes pour leurs décisions et leurs actions. Les comportement chevaleresques (voter contre soi-même, faire exprès de perdre une épreuve) sont, si j’ai bien compris, interdits par le contrat qui lie les participants à la maison de production.
Je ne suis pas anti-européen, je me vois comme fédéraliste, et pour plus tard, internationaliste, et j’ai même voté (sans être sûr d’en comprendre les tenants et aboutissants et un peu dépité du caractère byzantin du texte) favorablement au traité constitutionnel. Mais la dérive actuelle de l’Union Européenne me semble très proche de ce qui me semble clocher dans Koh-Lanta : sous prétexte de rendre équitable la concurrence, on force chaque pays, chaque société, à accepter des règles du jeu qui ne permettent justement rien d’autre qu’une atmosphère mortifère de concurrence et aboutissent à rendre presque illégale ou intenable toute autre attitude. On peut dire la même chose, sans doute, de la vie quotidienne des employés des grandes sociétés, mais dans le cas de l’Union européenne, on aboutit à des situations terribles où la machine va contre l’intérêt direct des contribuables qui la financent en étant utilisée comme moyen et/ou prétexte à détruire l’idée de service public puisque la rentabilité de ceux-ci n’est pas évaluée en fonction du service rendu ni de l’intérêt du public, mais en fonction de règles du jeu qui n’arrangent guère que les administrateurs de sociétés multinationales avides et agressives, qui ne croient en la libre-concurrence que s’ils en sont les organisateurs et les truqueurs.
Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que toute entreprise doive être un service public, mais il me semble logique, lorsque l’on décide qu’un secteur a une légitimité à l’être, que cela soit fait en fonction de l’intérêt général.
Dans le cas de Koh-Lanta, ce n’est pas grave : c’est un jeu, il a une durée limitée, il laissera de plutôt bons souvenirs aux participants (contrairement à certains jeux qui portent sur la vie affective et sont odieux, comme l’ïle de la tentation), lesquels participants ont finalement bonne mine, avec quelques kilos en moins et, pour les hommes, la découverte qu’on peut avoir une meilleur tête avec une barbe que rasé de frais et en costume. Ces péripéties sont la condition pour que l’expérience soit distrayante pour le spectateur. Mais dans le cas de l’organisation des économies et des sociétés, ça me semble plus problématique.
On jugera peut-être mon parallèle spécieux. Tant pis.
17 Responses to “Koh-Lanta, ou l’aliénation de la libre-concurrence”
By d. on Jan 14, 2013
ah zut, on reste un peu sur sa faim pour une fois, on n’est pas habitué à ça par ici – j’espérais après l’introduction/avertissement un long développement sur les méfaits du capitalisme… une prochaine fois ? (enfin je ne sais pas si ça s’applique, n’ayant jamais vu l’émission que par bribes promotionnelles dans de mauvais cafés*).
sinon, pour le sentiment d’appartenance rouge/jaune, je suppose que c’est l’équivalent télévisuel de l’expérience de Stanford.
*d’ailleurs comment ça se fait que j’en sache les règles ? mystères du bourrage de crâne télévisuel…
By Jp on Jan 14, 2013
La version américaine (de référence, même si le jeu est une création suédoise) varie sur de nombreux points techniques : durée limitée à 1h hebdomadaire (soit 42 minutes sans pub), pas de reportage sur les participants, pas de voix-off….
Des éléments qui transforment l’expérience du spectateur et l’améliorent.
Surtout, j’observe dans « Survivor » un comportement différent.
Les participants ont très rarement un attachement à leur tribu d’origine.
La récompense y est beaucoup plus élevée (1 millions $ contre 100 000 € en France), à ce tarif difficile de fédérer 8 ou 10 inconnus.
Dès la désignation des équipes, des groupes de 3 ou 4 participants se créent en « alliances » discrètes, qui influeront grandement sur les votes en bande.
Le candidat qui se voudrait trop fédérateur, trop « nationaliste » se verrait rejeté, suspect de jouer un double-jeu, de participer à plusieurs alliances. Enfin, les conditions de survie sont généralement bien plus confortables que dans Koh-Lanta, ce qui dégrade l’intérêt d’un joueur d’équipe, un ravitailleur, un chasseur, un bricoleur dont la valeur sociale pourrait atténuer sa médiocrité sur les épreuves sportives.
By Jean-no on Jan 14, 2013
@d. : ça reste une intuition ou un parallèle un peu douteux pour l’instant. Il faut que je lise (je l’ai, mais pas ouvert) Snakes in Suits: When Psychopaths Go to Work qui explique que le comportement que la vie d’entreprise favorise fait agir les employés comme des psychopathes.
@Jp : intéressant ! Je n’ai jamais vu d’autre version de ce jeu.
By d. on Jan 14, 2013
curieux, la thèse de ton livre a l’air très proche du documentaire the corporation, et ça semble sorti trois ans plus tard.
le documentaire (libre en téléchargement) développe exactement la même idée, que les Corporations (sociétés anonymes en français) ont le comportement de psychopathes dangereux…
By renaud on Jan 15, 2013
mon ajout n’est pas très intéressant puisque j’ai perdu la source, mais il y a quelques années, un des participants de Koh Lanta avait tenu un blog qui suivait les diffusions. Ce qu’il expliquait était très intéressant, notamment sur le montage des séquences, le fait par exemple qu’on leur demandait leur choix pour les conseils : en 1 tu choisirais qui? Pourquoi? en deux et pourquoi? en trois? et ainsi de suite. Ce qui suivant le scénario, permettait au monteur de choisir ce qu’il voulait ou presque. Il expliquait aussi l’ennui total qu’il ressentait la plupart du temps, où il ne se passait rien, l’attente.
By renaud on Jan 15, 2013
pour l’appartenance aux rouges ou aux jaunes, c’est simplement dans l’espoir d’aller plus loin et l’équipe qui est en supériorité numérique a à la réunification toujours , il me semble, réussi à éliminer l’autre équipe, malgré la scénarisation, et les rebondissements (très bons cette année je trouve) dus à l’introduction récente des colliers d’immunité, et des éliminations groupés (un duo cette année).
By renaud on Jan 15, 2013
quelqu’un a-t-il vu ou entendu parler de l’émission américaine Survivor (ou inspiré de) il y a quelques années, où les groupes de départ étaient constitués selon une appartenance à une ‘communauté’ (afro américains, asiatiques, …). Je serais curieux du déroulement et du résultat.
By renaud on Jan 15, 2013
De ma connaissance (je suis un fidèle de l’émission depuis 2002, j’ai dû manquer une ou deux éditions), il n’y a jamais eu en effet de protestation face à la difficulté sauf à d’infimes moments que l’on peut lire entre les images (comme entre les lignes). Quand une équipe a dû mal à avoir du feu et que la faim devient évidente. Je me rappelle aussi de conditions climatiques parfois très rudes (pluies incessantes) sous certaines latitudes. Il y eut des moments cocasses avec certains candidats à la limite du gérable. Notamment quand un candidat voulait tuer une chèvre à la machette, ou quand une équipe se nourrissait depuis le début de l’épreuve d’oiseaux finalement présentés comme protégés et épargnés pour la suite de l’aventure.
By Jp on Jan 15, 2013
Je n’ai pas vu non plus la saison de Survivor avec des équipes « ethniques ». L’annonce de cette répartition a d’abord généré des pertes publicitaires pour la chaine CBS ( http://en.wikipedia.org/wiki/Survivor:_Cook_Islands#Diversity_and_controversy ).
Il est difficile d’obtenir un jeu équilibré avec des petites équipes de départ : une saison récente de Survivor abandonnait le traditionnel duel d’équipes de 10 pour une configuration à trois équipes de 6 joueurs (3 anciens participants, sortis sur blessures dans des saisons précédentes pouvaient prendre leur revanche).
Résultat : la première équipe à avoir perdu une épreuve s’est fait laminer, pour finir à 2 contre 6 pour les deux autres. L’équipe a été dissoute et deux équipes de 7 se sont affrontées. Les premiers épisodes étaient très décevants, comme 2/3 des participants ne se sentaient pas menacés. Les alliances étaient toujours en cours, mais à vide, et avec beaucoup moins de fluidité.
By Hélène on Jan 16, 2013
Quel mérite est le tien de regarder, même sporadiquement, des émissions de ce genre. Koh Lanta me terrifie, mais je ne sais pas trop pourquoi. Ce qui serait intéressant, c’est de le comparer à la réalité des joueurs. Du coup ton parallèle serait encore plus intéressant. Tout le jeu est biaisé, comme le jeu politico-économique actuel, et c’est ça qui est intéressant, comme l’expression « loi de la Jungle », employée à tort. Car un lion attend d’avoir faim à nouveau pour se jeter sur une nouvelle proie, alors que les fond d’investissement sont insatiables. Vivrions-nous dans une réalité entièrement falsifiée, dont le modèle (mensonger) serait produit par la télé, ce qui nous fournirait la base pour accepter, par similarité, les déclinaisons politico-économiques dudit modèle ?????
(mon raisonnement est un peu boiteux, je suis fatiguée, il est tard chez moi, mais cette idée très dickienne me plait assez)
By Jean-no on Jan 16, 2013
@Hélène : je comprends bien ce que tu dis. Ma théorie est qu’il y a toujours un aller-retour entre réalité et représentation, les représentations ayant parfois plus d’influence sur la réalité que le contraire.
By Hélène on Jan 16, 2013
Je voulais dire : Tout le jeu est biaisé par le montage, dans Koh Lanta comme dans la mise en scène de la crise par les politique et les médias.
By Hélène on Jan 16, 2013
Voilà.
By renaud on Jan 17, 2013
je trouve que Koh Lanta ressemble plus à des saisons d’une série qu’à un jeu (type Intervilles). Dans le sens où l’on retrouve à chaque fois le même dispositif, les mêmes personnages (leur physique et leur nom varient mais on a en gros le même panel), les mêmes lieux (des plages et des forêt équatoriales). Koh Lanta est une fiction, peu onéreuse à produire (moins qu’un film je pense?).
By Rodolphe on Jan 27, 2013
La saison de Survivor avec les communautés ethniques est la saison 13 (Survivor cooks island), même si au démarrage on pouvait douter de ce genre de procédé, ce n’était au fond qu’une idée vite fait oublié. 4 équipes au démarrage composé chacune exclusivement de (blancs, noirs, latinos, asiats). Mais seulement quelques jours plus tard (une 10aine), tout ce petit monde s’est retrouvé mélangé ensemble en 2 grandes équipes. Je n’ai pas envie de vous dévoiler la suite si vous êtes intéressés pour la regarder (elle doit être trouvable sur le net assez facilement en VO, puisqu’au EU, les saisons sortent en Dvd). « fin bref, tout ça pour dire que le sentiment de communauté ethnique, n’est pas vraiment ressortis.
By Rodolphe on Jan 27, 2013
Concernant KL, je suis personnellement de plus en plus déçu par ce jeu pour pleins de raisons. Je trouve les conditions de vie (de survie) beaucoup trop difficile (Ex: La sortie de Charles). La prod intervient dans les rebondissements du jeu (Le collier donné à Thierry en binome avec Myriam, qu’on ne me fasse pas croire qu’il l’a trouvé tout seul). Les épreuves sont redondantes et toujours les mêmes.
Et cette maudite voix off … qui détaille tout ce qui se passe à chaque moment et elle réexplique souvent ce qui vient d’être présenté au cours d’une scène de quelques minutes, sans apporter aucune information nouvelle.
La grande différence entre ces deux adaptations (Survivor et KL) est que l’une assume ses intentions, pas l’autre.
CBS assume qu’elle utilise le montage pour transformer ses concurrents en personnages quasi fictionnels et qu’elle provoque des tensions entre eux.
Rapidement dans une saison, certains endossent des status très clairs comme le méchant (Jerri, Johnny Fairplay), le gentil (Colby), le « manipulateur sans scrupule » (Richard, Rob)… Cependant dire que Survivor encourage les comportements les plus abjects de l’être humain est, à mon sens, une erreur de perception. Car l’émission s’efforce avant tout de créer du « drame » au sens premier du terme. Avec l’intelligence de ne pas se poser en juge de ces comportements. La trahison et la manipulation étant des composantes de stratégie et des moteurs d’intrigues, elles ne sont considérées que comme des cartes d’un jeu. Il n’y a pas dans Survivor de bonnes ou de mauvaises personnes : il n’y a que de bons ou de piètres joueurs, des personnages intéressants et des personnages ennuyeux.
TF1 au contraire refuse d’assumer la manipulation de l’image des candidats et encore moins les comportements « négatifs » générés par le jeu.
Dans Koh-Lanta, on a affaire à de vraies personnes, pas à des personnages. C’est une volonté évidente de la chaîne. De façon à rapprocher le téléspectateur avec la « vérité » des concurrents, continuellement au cours des épisodes, TF1 propose des petits reportages sur certains d’entre eux dans le « civil » en s’efforçant de les présenter sous un jour positif, avec cette fois encore l’utilisation d’un commentaire en voix off. Les concurrents sont tous des gens formidables, des « bons vivants », des « pères de famille aimants », des « jeunes femmes impliquées dans leur travail et dans leur vie de famille », des « jeunes femmes proches de la nature et passionnées par les animaux »… Chaque saison propose donc un échantillon de personnes toutes vraies, toutes méritantes. Méritantes selon les critères de la chaîne. Embarquées non dans un jeu, mais dans une « aventure humaine extraordinaire », « une expérience de vie hors du commun ».
Dans les résumés des épisodes, où sont rappelées, même au bout du septième épisode de la quatrième saison, soit après plus de cinquante épisodes, les règles de l’émission, il est expliqué que « l’un après l’autre, [les concurrents] vont devoir quitter l’archipel, chassés de ce paradis ou bien de cet enfer, par le vote de leurs compagnons rassemblés autour du puits de l’implacable conseil. » [2]. Mais c’est la dernière phrase. Pas d’explication sur le but de ces éliminations. Pas de mention d’un prix à gagner, d’argent en jeu. On est loin du : « Only one will remain to claim the million dollar prize ». (« Un seul restera et gagnera un million de dollars »). Comme si TF1 niait que l’émission était un jeu et qu’elle ne voudrait pas ajouter la cupidité aux grandes qualités humaines de tous ses candidats.
By Rodolphe on Jan 27, 2013
Je suis en parfait accord avec ce qui a été marqué dans mon long commentaire, j’espère qu’il sera approuvé. J’ai submit ^^ avant de mettre le lien de l’article. http://www.a-suivre.org/flt/koh-lanta-vs-survivor.html