Profitez-en, après celui là c'est fini

Du sérieux, des séries, des super-héros

septembre 1st, 2012 Posted in Au cinéma, Série

L’Express.fr a publié hier un article que je trouve pour ma part un peu idiot, et qui s’appuie sur le succès des films de super-héros pour affirmer que le cinéma américain s’infantilise. Car, nous dit-on, un producteur actuel n’oserait pas investir dans un scénario comme celui de Kramer contre Kramer tandis que le box-office semble saturé de spectacles pyrotechniques évidemment fantaisistes et de qualité médiocre, à l’exception, apparemment, du dernier Batman. L’auteur de l’article se demande ensuite si la part « sérieuse » du cinéma n’aurait pas été déportée vers la série télévisée, et cite en exemple les Soprano, Sex and The City, The Wire ou Mad Men, qui seraient autant de signes d’un « âge d’or » de la télévision. La raison de la régression hollywoodienne, dit-il, c’est que les studios de cinéma font des économies de budget, du fait de la récession, et que le public des « millennials » (nés après 1990 ?) manquerait de culture cinématographique et ne considère pas le cinéma comme une forme d’art : « Nourris aux jeux vidéo, à la BD1 et aux réseaux sociaux, ces adolescents ne s’intéressent aux films que s’ils correspondent à leur univers » .

Kramer contre Kramer, de Robert Benton, avec Dustin Hoffman et Meryl Streep. Du sérieux.

Et puisque les cinémas ne sont pas fréquentés que par des adolescents, on nous apprend que les adultes se délectent de spectacles infantilisants puisqu’ils refusent de grandir.
Beaucoup de clichés pour un seul article, non ?
Ce qui m’intéresse ici, c’est la notion de « sérieux » au cinéma.
Kramer contre Kramer (1979), qui a obtenu cinq oscars, traitait à l’évidence d’un sujet sérieux, d’un sujet de société particulièrement important à l’époque, à savoir le divorce et la manière dont la vie professionnelle peut empiéter sur la vie personnelle, et vice-versa. C’est un bon film, qui pose la question des rôles : la femme au foyer, désespérée par sa condition quitte son enfant et son mari, lequel doit apprendre à gérer le quotidien,… Pourrait-on le réaliser aujourd’hui ? Aurait-il autant de succès ? Je l’ignore, mais la question ne se pose pas vraiment, c’est un film qui correspond à une époque précise, qui répond à une génération précise,… Et qui a eu moins de succès, la même année, que le premier Superman, avec Christopher Reeve (film plutôt bouffon, de par son scénario, mais au budget important pour l’époque), ou que l’Empire Contre-attaque, second épisode de la saga Star Wars. Affirmer que les registres cinématographiques fonctionnent comme des vases communicants, que le divertissement familial nuit au cinéma « sérieux », est difficilement défendable. Il est par exemple probable que beaucoup de gens ont vu la même année Kramer contre Kramer et Superman, même si le premier film s’adresse spécifiquement aux adultes tandis que le second est destiné à un public plus large.

Le grand beau drame au cinéma en 1986 (année que je prends au hasard) a été le film «Out of Africa», de Sydney Pollack, titulaire de sept oscars, qui a été en tête du box-office pendant… une semaine. Les autres succès de l’année, bien plus importants en termes financiers, ont été Le clochard de Beverley Hills (un remake du Boudu de Jean Renoir), Police Academy 3, The Karate Kid 2, Top Gun, Aliens, Cobra et Crocodile Dundee. Les succès publics d’il y a 25 ans étaient-ils beaucoup plus sérieux que ceux d’aujourd’hui ?

Depuis Les dents de la mer (1975) et surtout Star Wars (1977),  les plus gros budgets de production du cinéma vont à des films dont les synopsis auraient, quelques années plus tôt, été cantonnés au cinéma dit de série Z, à une époque où le « grand film » était forcément un drame magnifique et/ou une grande fresque historique : Autant en emporte le vent, Lawrence d’Arabie, Docteur JivagoBen Hur, Les Dix commandements,… Type de film qui existe toujours : Titanic, The Aviator, Gangs of New York, GladiatorSaving private Ryan et la plupart des films d’Ang Lee.
Mais les plus gros budgets actuels sont effectivement alloués à des film de science-fiction ou de fantastique : les Harry Potter, les films Marvel, ou encore les séries du Seigneur des anneaux, des Pirates des Caraïbes, Matrix, Men in black, etc., qui réclament des moyens très importants. Mais les studios ne se contentent pas d’investir de l’argent dans ces films que l’article juge « infantilisants », ils y investissent aussi du talent. Aller chercher des gens tels que Tim Burton, Ang Lee2, Kenneth Branagh, Christopher Nolan ou Michel Gondry n’est pas anodin : ces réalisateurs ne sont pas de simples techniciens, mais de véritables auteurs, et chacun d’entre eux a porté un regard à la fois personnel et respectueux sur le super-héros qui lui a été confié — en ne parvenant pas toujours à convaincre les spectateurs il est vrai.

Ang Lee, réalisateur raffiné de «Salé sucré», «Sense and Sensibility», «Brokeback Mountain» et «Lust, caution» a tenu à interpréter lui-même le monstre Hulk pour les séances de capture de mouvements.

Quand aux autres réalisateurs de ce genre de films, comme Sam Raimi, Joss Whedon, Zack Snyder ou Jon Favreau, ils sont d’authentiques fans de comic-books, parfois même auteurs de bandes dessinées eux-mêmes, recrutés pour leur talent mais aussi grâce à leur bonne compréhension de ce genre d’univers. Sam Raimi racontait par exemple avoir été engagé après un entretien destiné à vérifier sa bonne connaissance des aventures de Spiderman. À l’exception du Superman de 1978 et du Batman de 1989, les super-héros au cinéma ont dû attendre la fin des années 1990 pour commencer à être pris au sérieux. Car c’est bien de ça qu’il s’agit, et c’est ma thèse : ce n’est pas le public qui est devenu idiot, ce sont les super-héros qui sont devenus une affaire suffisamment respectable pour que ceux qui en font l’adaptation au cinéma tentent de tirer tout le potentiel du sujet, notamment dans le registre tragique : les malédictions de Benjamin Grimm et de Bruce Banner, le sort du surfer d’argent, du docteur Octopus, du Bouffon vert ou de l’homme-sable sont des histoires fortes, aussi fortes, et je dis ça sans rire, que celles des héros de l’Illiade.

Je vois deux raisons principales au respect dont bénéficie le super-héros au cinéma actuellement. D’une part, les réalisateurs et les scénaristes actuels appartiennent souvent à la génération qui a lu des comic-books qui se voulaient plus adultes : ceux d’Alan Moore, Frank Miller, Neil Gaiman,… Le sérieux du super-héros de cinéma serait donc la réplique (au sens sismologique) à une mutation qui a eu lieu dans le domaine de la bande dessinée vingt ans plus tôt.
D’autre part, les effets spéciaux au cinéma (et pas seulement numériques) n’ont cessé de progresser en qualité, permettant peu à peu de représenter sans ridicule un homme volant, un robot géant et des monstres divers et variés. C’est donc aussi parce que la technique était prête que ces films ont été rendus possibles : ils ont été faits parce qu’on pouvait les faire.

«Batman» (1966), de Leslie Martinson. Réalisé dans la foulée de la série télévisée, ce film se veut drôle et volontairement marqué par un kitsch «comic-book» qui montre avant tout le dédain des producteurs pour leur sujet, comme dans cette scène interminable où la jambe de Batman se trouve entre les mâchoires d’un requin qui ne lâchera prise qu’après avoir été aspergé à l’aide d’un «Batspray anti-requin»…

L’article de l’Express prétend que le cinéma « sérieux » n’émane plus des grands studios de cinéma et est à présent produit par la chaîne de télévision HBO. Ce n’est pas faux : le Elephant (2003), de Gus Van Sant, palme d’or amplement méritée au festival de Cannes, a par exemple été produit en tant que téléfilm, par HBO justement, qui a finalement décidé une sortie en salles. La distinction entre production télévisuelle et production cinématographique s’estompe, sans doute : pour un acteur, un réalisateur ou un scénariste, faire de la télévision n’est plus le signe que l’on est en début ou en fin de carrière et certaines productions télévisuelles jouissent de budgets pharaoniques. Le mouvement n’est pas univoque, puisque certains films qui n’auraient autrefois existé qu’à la télévision sont à présent produits pour le cinéma — je pense au film documentaire.

À présent, les séries sont elles si sérieuses ? Je me souviens clairement du moment où la série télévisée est devenue respectable. Ce n’est ni avec Mad Men, ni avec The Wire, ni avec Six Feet Under, les Soprano ou les Desperate housewives, c’est avec la série Twin Peaks (1990), par David Lynch. Il avait existé de nombreuses bonnes séries auparavant (pour moi, par exemple : La Quatrième Dimension, Mission Impossible, Star Trek, Hill Street blues et surtout les séries britanniques Chapeau Melon et bottes de cuirLe PrisonnierCosmos 1999…). Mais avec Twin Peaks, c’est un grand auteur, à l’époque à l’avant-garde du cinéma de son pays (son film Sailor et Lula a obtenu la palme d’or à Cannes au moment précis de la diffusion de Twin Peaks) qui signait sans honte une série télévisée dotée d’une ambiance forte et d’une esthétique différente de tout ce qui avait existé auparavant, quoique reprenant certains éléments des meilleures séries des années 19603.
Les années 1990 ont été très importantes pour la série télévisée, surtout dans le domaine du fantastique et de la science-fiction : X-Files, Wild Palms, Babylon V, Dark Angel ou encore Buffy contre les vampires ont été des séries novatrices qui, souvent de manière discrète, ont élevé le niveau d’exigence du feuilleton télévisé : des scénarios très bien construits, des personnages forts et des propos intelligents et maîtrisés sur des sujets traditionnellement absents de ce genre de production.

Dans «Mad Men», les hommes sont odieux, ils traitent les femmes comme des objets (et parmi ces dernières, certaines se complaisent dans le rôle), ils fument comme des pompiers, boivent et sont le contraire du sérieux et de la responsabilité qu’ils prétendent incarner. Derrière la dénonciation de la société de 1960, n’y a-t-il pas une part de nostalgie d’une époque «facile» où femmes et hommes avaient des rôles bien définis ? «Mad Men» me semble moins une reconstitution historique qu’une série un peu hypocritement destinée à consoler la virilité des hommes de 2012, qui ne parvient plus tout à fait à dominer sans partage. Une série extrêmement bien faite, soit dit en passant. Les dernières «screwball comedies» comme «Desk Set», avec Spencer Tracy et Katharin Hepburn, ou certains films de Billy Wilder comme «La garçonnière», qui touchent aux mêmes thèmes (les rapports entre hommes et femmes dans l’entreprise) montrent à l’évidence que les rapports entre hommes et femmes étaient moins iniques que ce que nous veut nous vendre «Mad Men».

Vers la fin des années 1990 et au début des années 2000, de nombreuses séries s’adressant explicitement, voire exclusivement, aux adultes4, ont fait leur apparition : Oz, Sex and the city, The Sopranos, Rome, Six Feet under, The Wire, Deadwood,… les fameuses productions HBO, donc, auxquelles on peut ajouter 24Ally McBeal, Desperate housewives, Weeds, The Good wife, Breaking bad, The L Word, The TudorsThe Borgias et enfin Mad Men. On entend souvent parler d’un âge d’or au sujet de ces séries, mais est-ce si juste ? Certaines sont très inspirées, comme (à mon goût en tout cas) The Wire et Six Feet under. Mais la plupart me semble avant tout novatrices par leur culot pour parler de sexualité et par leur goût des situations sordides. Dans Deadwood, les cowboys sont sans pitié les uns pour les autres et fréquentent des prostituées ; dans Rome, les romains sont cruels et fréquentent des prostituées ; dans Mad Men, les gens fument, boivent, et maltraitent les femmes ; The Tudors ou The Borgias, autres séries historiques, fonctionnent pareil : imaginez donc, il y a quatre cent ou cinq cent ans, les gens couchaient !

Jean-Léon Gérome, «Marché d’esclaves» (1866). Gérome, comme d’autres à son époque, a pris un plaisir manifeste à représenter l’esclavage sexuel, les harems, la violence des gladiateurs, les meurtres,…

Cette manière d’utiliser des époques passées ou des lieux et des milieux inaccessibles (le ghetto, le monde de la drogue,…) pour permettre au spectateur de fantasmer ne me semble pas une démarche si adulte et me rappelle surtout la peinture académique de la fin du pudibond XIXe siècle qui se délectait d’images sordides et érotiques sous le prétexte un peu facile de montrer ce que les choses étaient vraiment et de dénoncer la barbarie d’autres temps et d’autres mœurs. Et je suis gentil, j’aurais pu comparer la démarche à celle de la tristement célèbre collection de bandes dessinées historiques Vécu, aux éditions Glénat, sur le même principe mais, à quelques rares exceptions, sans grand talent. On peut s’amuser du fait que ce défoulement par le sexe et la violence « historiques » ou « véritables » se doublent souvent d’une grosse dose de puritanisme, puisque la sexualité qui est exposée avec complaisance est aussitôt jugée moralement : ce sont généralement les « méchants » ou les âmes perdues qui ont la sexualité la plus active, par exemple, tandis que les « gentils » ne tombent amoureux qu’une fois dans leur vie, particulièrement les femmes (les hommes sont autorisés à avoir quelques moments de faiblesse) et réduisent leur kamasutra au minimum recommandé par l’Église5.

Dans «Deadwood», les cowboys commettent des viols, on trouve des serial-killers, des chinois fourbes et cruels qui font disparaître les cadavres en les donnant à manger aux cochons, une société qui tourne autour de la prostitution et où les jurons les plus orduriers sont la base du langage. Le point passionnant de cette série est qu’elle se base sur une histoire vraie, celle de la petite communauté de prospecteurs de Deadwood qui a réellement accueilli des personnages historiques tels que Wild Bill Hickock, Calimity Jane, Wyatt Earp ou George Hearst. Le scénario s’appuie sur les chroniques d’un journal local, dont de nombreuses anecdotes sont reprises. La plupart des personnages a existé, mais les détails sordides du scénario sortent, pour la plupart, de l’imagination des scénaristes qui ont pris la responsabilité de combler les trous et d’interpréter les non-dits comme il leur plaisait de le faire, c’est à dire à la mode d’aujourdhui.

Et Kramer contre Kramer, dans tout ça ? Est-il vraiment impossible de produire ou de voir des drames sentimentaux à budget modeste en 2012 ? Les films remarqués et/ou primés des dernières années qui ne sont pas des films de super-héros à gros budget sont-ils si mauvais ? Million Dollar Baby et autres Eastwooderies, Magnolia, American beautyNo Country for Old men, Winter’s bone, The Kids are all right, Juno, There will be blood, Little miss sunshine, les derniers films des Frères Coen, les films de Wes Anderson, de David Fincher ou de Darren Aronofsky…? Je ne trouve pas que le cinéma américain soit dans un état dramatique. Il me semble que le début des années 1990 était autrement plus triste en termes de production.

  1. Curieuse remarque : aux États-Unis, depuis une vingtaine d’années, les comic-books  ne sont plus vraiment un art de masse, car à l’exception d’une poignée de titres disponibles en supermarché, il faut désormais se rendre dans les boutiques spécialisées pour en acheter. []
  2. Dans son discret Ice Storm, Ang Lee avait montré son intérêt pour les super-héros, en faisant le parallèle entre une famille du début des années 1970 et la famille Richards — les Quatre fantastiques. []
  3. En même temps que Twin Peaks, il faudrait citer The Simpsons, mais aussi Dream on, une série formellement expérimentale dont le héros pense par le biais des images de télévision ou de cinéma qu’il a vu au cours de sa vie. []
  4. Je ne parlerai pas de séries populaires et plus ou moins « tous publics » comme House, Lost, Mentalist, CSI, etc., qui ne sont jamais qu’une exploitation actuelle de la mécanique des séries télévisées des décennies précédentes. []
  5. Considération un peu péremptoire et intuitive, je l’avoue, il faudrait vérifier la chose systématiquement []
  1. 33 Responses to “Du sérieux, des séries, des super-héros”

  2. By Ardalia on Sep 1, 2012

    A propos de Games of thrones, ton article me fait penser à celui-ci

    Pour moi, le super-héros renvoie au triangle dramatique
    cependant, je ne crois pas non plus qu’il y ait une infantilisation du cinéma. Car les héros passés sont aussi des sauveurs, même maudits, même tout cassés. C’est toujours le même schéma dramatique des emmerdements et du sauvetage.

    En tout cas, je te rejoins tout à fait sur la complaisance notamment sexiste de beaucoup de ces films ou séries. Ne parlons même pas de la violence… -_-‘

  3. By Jean-Michel on Sep 1, 2012

    Concernant l’article de l’express, je ne vois pas en quoi le dernier Batman est plus « mature ». Il y a de bonnes idées en filigrane mais pas de quoi pavoiser au chef-d’œuvre.
    Le goût prononcé pour le voyeurisme des scénaristes de Six feet under m’avait tant fatigué que j’ai renoncé à cette série.
    Je pense que tu poses la bonne question, celle des ressorts employés. Du moins, toujours le même. Tu trouveras encore cette même recette dans Boardwalk Empire.

  4. By Jean-no on Sep 1, 2012

    @Ardalia : merci de m’avoir rappelé l’article de Gaëlle-Marie. Complètement dans le sujet.

    @JM : je n’ai pas vu Boardwalk Empire mais j’imagine. C’est vrai que cette explosion des séries finit par retomber parce que ce sont toujours les mêmes trucs qui sont utilisés.

  5. By Stanislas Gros on Sep 1, 2012

    tiens Mad Men je ne l’avais pas interprété comme ça, moi, je voyais surtout le jugement un peu irritant d’une époque sur une autre, un inventaire de toutes ces choses qu’on faisait avant qui étaient mal, un moyen de rassurer le spectateur sur les immenses progrès accomplis par notre société, et qui donne l’illusion, entre autres, que le sexisme est derrière nous.
    Grosse déception pour moi en tout cas.

    Sinon la raison pour laquelle l’Express trouve le Dark Knight « mature », malgré son scénario douteux, me semble évidente : c’est le seul a adopter un ton « sérieux ».

  6. By Jean-no on Sep 1, 2012

    @Stanislas : Pour le Batman, c’est ce que je soupçonne, mais je n’ai pas osé l’écrire sans l’avoir vu.

  7. By sf on Sep 1, 2012

    Je ne sais pas si « Lost » peut être classée avec des séries telles que « House », « CSI »… d’un point de vue scénaristique, d’abord, car l’arc narratif y est plus complexe et, ce qui pourrait alimenter d’une certaine manière ton propos, d’un point de vue « media studies », relatif à la communauté de fans (Jenkins).
    « Lost » est une série citée, si je ne me trompe pas, comme bon exemple de ré-appropriation de la mythologie par les fans. Un peu comme avaient été étoffées et portées les mythologies des comics et de certaines séries nineties (Buffy), à ceci près que cette ré-appropriation version 2004 n’a plus rien de spontanée puisqu’orchestrée/fortement orientée par la production.
    À la liste des raisons qui poussent les producteurs de cinéma à valoriser aujourd’hui les super-héros, peut-être faudrait-il ajouter le goût du moindre risque, puisque chaque film extrait de ce vivier possèderait déjà une grande partie de son public (exigeant mais très réactif).
    Mais je peux me tromper.

  8. By Jean-no on Sep 1, 2012

    @sf : oui, Lost est encore un peu différent, c’est comme Les 4400 ou Heroes, avec des mystères qui traînent sur plusieurs saisons,… ok c’est encore un autre genre.

  9. By mrbbp on Sep 1, 2012

    Oups, je prends l’article en cours (commencé à la toph de MM)
    – 6FU: pas aimé, trop glauque… non VF trop mauvaise, sans plan sonore… (l’échange de fichier diskAdisk n’a pas pas que du bon)
    – Mad men: vu 2 épisodes et j’ai eu ce « même » sentiment de « regardez! CT mieux avant »… phallocrates de merd… j’ai détesté et me suis arrêté.
    – TGW: les 2 premières saisons avaient la niack parce l’actrice était en colère… après elle tombe amoureuse d’un amoureux de F..c(k) en costard… elle s’empêtre (les scénaristes)…la guimauve…
    OZ: respect, pas tout vu mais respect… c’est la première série que j’ai vue/croisée sur le cable qui m’a trouée (hormis les rediffs de Startrek – toutes générations confondues, mais c’est une autre histoire … perso)
    – Le début de « Califiornication » (S1)
    -Les 2 premières saisons de « Breaking bad », sordides, qu’on regarde comme un voyeur en se demandant jusqu’où ils vont s’enfoncer… (chose qu’on a pas dans OZ, il y a un fil moins ténu)
    et puis les séries policières avec une caméra épaule toujours mobile (à la 24h) et des flics qui dérapent (avec les poncifs sur les « minorités visibles » américaines…
    Pour les films que tu cites, oui… m’en manque qlqs un mais oui…

    Bref…
    j’aime quand tu médis sur « Mad men », Tu n’es pas le seul. ;)
    (…désolé de cet orthographe de vacances, il reste des fotes c’est sûr)

    ……….
    Je viens de lire le début (quel con je fais)…
    Je suis d’accord sur les sécnaristes qui connaissent les comics, moins sur « maintenant c’est possible techniquement », on dirait « l’homme qui valait 3M »… je pense que c’est imbriqué avec la culture visuelle du moment, on ne peut plus faire un batman sur son échelle de corde alors que le moindre clip ou la moindre pub te fait voler un « steak parlant » et que tout le monde s’y tienne comme acceptable… et crédible techniquement (belle incruste…. belle lumière… oui mais c’est un steak là!…)
    Un peu comme les boites de chocolat, il faut un peu de temps pour que ça soit accepter par le « main street » en l’occurrence des héros pas si super que ça… « les watchmen » au cinéma est une bascule… Batman devient psychorigide, Bond un tueur qui attire les femme parce qu’il tue (et en plus c’est peut-être/sans doute des méchants… le prochain opus est encore plus ambigu )…
    On est passé dans une aire « moins manichéenne » (je suis pas sûr en écrivant le mot), les héros sont plus troubles (moins nets) et c’est ça qui est intéressant quand on « sur »-médiatise les procés de goldens boy du CL, qu’on sait, ne sait pas qui est le méchant qui nous met au chômage… (« pendez les patrons » – oeil-pour-oeil (on verra))…

    je suis brouillon là…
    ça part dans tous les sens…
    désolé..
    je m’arrête…

  10. By mrbbp on Sep 1, 2012

    @sf: j’ai pas lu de Comics étant petit, ni après, mais j’aime les versions très noires des « super-héros » qu’on nous montre en ce moment (et qui ont 30 ans?) et la façon dont c’est filmé.
    J’ai détesté le Frelon de Gondry qui n’est qu’une mascarade… je ne jetterai pas toutes les pierres à Gondry, (dont j’aime bcp le W de clip/pub par ailleurs… mais pas convaincu par son W de réal sur ses courts/moyens /… trop longs) mais aussi sur ses producteurs sans culture…
    Les réals de ces films sont aussi de bon auteurs « d’images qui bougent » de leur temps et comme le dit JN: pas juste de « Joyeux organisateurs » de tournages.

  11. By jjb on Sep 2, 2012

    Cher Jean-No,
    sur FaceBook tu te vantes d’avoir écrit du mal de Mad Men. Cette note laisse penser que ta critique était hélas une pose un peu snob. Ton interprétation est différente de celle des spectateurs qui y voient une critique du monde dans lequel nous vivons et que l’époque de Mad Men a préparé (prépondérance de la publicité, cynisme mâle, désintérêt pour les événements politiques, mais aussi réveil des femmes, par exemple). J’imagine que tu ne t’es pas coltiné les 5 saisons. La série est suffisamment subtile pour ne porter aucun message comme le font les productions hollywoodiennes destinées en priorité aux adolescents américains (et par extension colonialiste, à tous les gosses du monde entier). L’ensemble n’exprime pourtant aucun doute, mais comme toute œuvre il faut parfois tout voir ou lire jusqu’au bout pour que les intentions se dévoilent.
    Quant aux exemples que tu cites, tu es bien gentil avec certaines séries (par ex. Dark Angel lancée avec brio par James Cameron qui tourne vite au navet, ou l’ignorance du travail d’Alan Ball dont les œuvres sont de remarquables critiques des mœurs de notre société). Il faudrait aussi analyser la manière de filmer et pas seulement ce que ça raconte. La paresse de nombreuses séries, l’excellent travail sur la lumière et le montage des autres, la direction d’acteurs, sont des paramètres indispensables à prendre en compte dans toute critique « sérieuse » ;-)
    Amitiés,
    jjb

  12. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @jjb : C’est vrai que je n’ai pas vu les cinq saisons. Je sais bien que la série porte plusieurs messages possibles et qu’à un niveau intellectuel, la morale est sauve, comme elle l’est invariablement avec ce genre de série. Mais à un niveau purement visuel, ça ressemble à une pub pour un machisme infantile, au stade oral (tous les mecs passent leur temps à sucer une cigarette ou une bouteille et une des héroïnes a une poitrine monstrueuse)… J’ai été surpris de ressentir ça, je m’attendais à apprécier sans réserves et j’ai été déçu, quoique ce soit bien entendu très bien fichu, bons personnages toujours plus complexes que prévu, etc. Je ne parle pas de cet aspect dans mon billet mais c’est évidemment la qualité de toutes ces séries : elles sont bien faites, et contrairement au film de cinéma, elles ont le temps de développer des personnages et de leur ajouter des couches et des couches d’épaisseur psychologique. Mais après plus de dix ans de ce genre de série, il me semble que les trucs apparaissent, que les tics deviennent envahissants, qu’on devine à l’avance quelle héroïne va devenir lesbienne, qui va trahir, qui aime en secret, quel méchant va se révéler gentil, etc.
    Dark Angel partait bien, mais dès la seconde saison les producteurs ont paniqué et imposé des changements (et notamment des éléments de maquillage un peu bouffon) qui ont beaucoup nui à l’intérêt de la série, ce qui est bien dommage. Sur Alan Ball, je pense que tu ne peux pas m’accuser de l’ignorer, je cite son film American Beauty et je dis du bien de Six Feet Under qui reste ma référence en séries « sérieuses », avec The Wire. Par contre je n’ai pas encore vu True Blood.
    Reste que mes critiques sont un peu rapides, il est évident que la série télévisée contemporaine (ou plus ancienne) est un sujet carrément vaste. Mon but était d’abord de renvoyer dans les cordes le journaliste de l’Express pour qui la bon cinéma se cantonne à la série.

  13. By jjb on Sep 2, 2012

    Il est certain que le cinéma américain a régressé alors que la télévision américaine a bénéficié de budgets inédits jusque là. Question de censure et par conséquent d’autocensure aussi, c’est pourquoi je précisais la cible des ados, voire des familles, public particulièrement immature aux USA ! Mais il s’agit de l’entertainment et non du 7e art dans tous les cas. Le cinéma indépendant américain, qui n’a rien à voir avec le cinéma indépendant européen, question de budget encore, n’est pas concerné par cette comparaison.

  14. By jjb on Sep 2, 2012

    On dirait que mon deuxième commentaire s’est perdu. Je rendais grâce à tes choix de Six Feet Under, The Wire et Twin Peaks, certainement ce qu’on a fait de meilleur en matière de série américaine. J’avais sauté ton appréciation d’Alan Ball et m’en excusais. J’adhérais à tes critiques sur Deadwood, Rome, et pointais l’apologie de la délation de Desesperate Housewives. Je soulignais encore l’improtance de la lumière, du montage, de la direction d’acteurs, sans me focaliser sur les scénarios, car la différence entre les meilleures séries et les plus banales se situent également à cet endroit : la manière de filmer est-elle appropriée au sujet, etc. J’ai du mal à regarder les images télé mochedingues, et les plans plan-plan ;-)

  15. By jjb on Sep 2, 2012

    True Blood ne fait pas l’unanimité. Les épisodes peuvent être inégaux, mais c’est une intéressante manière d’aborder l’intolérance, dada de Ball dont le dernier long métrage a été gravement boycotté. Tabou(s), en anglais Towelhead, montre pourtant la différence de traitement entre télé et ciné, puisque cet auteur sévit sur les deux. A voir absolument ;-)

  16. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @jjb : je ne connais pas le cinéma américain au sens où je ne sais pas ce qui est disponible dans les salles pour le public – peut-être qu’il faut faire trois heures de route pour voir un film de Wes Anderson (qui est vraiment ma référence de ces dernières années, je ne saurais dire pourquoi) si on n’habite pas un des centres intellectuels du pays… Mais en tout cas, des bons films, il en existe.
    Sur les films d’entertainement, justement, je ne les trouve pas tous débiles. Ok pour taper sur Transformers (une pub animée pour Hasbro devenue une série de films…), ou des adaptations un peu plates (le seigneur des anneaux, Harry Potter), mais on peut utiliser un super-héros pour raconter des choses importantes et parfois même pour faire du cinéma. La manière dont les scènes d’action servent le récit dans Avengers est du cinéma, du vrai. Et quand Iron Man parle du « complexe militaro industriel », c’est avec une vraie finesse je trouve, malgré l’utilisation de AC/DC, qui n’a jamais été trop ce que j’écoutais :-)
    Le genre a produit de mauvais films, des déceptions, etc., mais c’est un genre récent au cinéma, qui a un potentiel assez fort, qui pâtit peut-être d’académismes (une petite partie du public, mais qui a beaucoup d’influence, réclame une fidélité aux comics qui peut lier les mains des auteurs…) mais que l’on n’a à mon avis pas de raison de critiquer plus que, par exemple, le Western, genre qui a donné les pires navets et les meilleurs films.

  17. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @jjb : j’ignorais que Ball avait sorti ce film, effectivement !

  18. By Jean-Jacques Birgé on Sep 2, 2012

    Je suis d’accord qu’il existe de bons blockbusters. À noter que les méchants ne sont plus des Soviétiques, mais l’état américain, soit la CIA, soit quelque officine moins officielle. Comment faut-il le lire ? Autocritique et autodérision ou preuve feinte que tout est possible aux USA ?
    Opposer télé et ciné est intéressant à condition de ne pas ériger cela en système. Comme partout, à chaque œuvre correspond un support approprié, à chaque support des œuvres appropriées !

  19. By Jean-Jacques Birgé on Sep 2, 2012

    Entre Soviétiques et CIA j’ai oublié les Arabes ;-)

  20. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @jjb : sur les méchants, le blockbuster n’est pas toujours si libre de critiquer, cf. ce qui s’est passé avec Avengers quand l’armée s’est rendu compte qu’elle y apparaissait en traître. Il faut dire que Joss Whedon a toujours eu une méfiance très forte envers l’armée, comme on le voit dans la saison 3 ou 4 (je sais plus) de Buffy, avec le ridicule groupe « Initiative ».
    Dans les blockbusters de super-héros, les méchants sont rarement les arabes, tiens. Enfin je ne vois même pas un seul exemple (mais je dois me tromper). Bizarrement, anachroniquement, les méchants sont souvent les nazis :-)

  21. By Stanislas Gros on Sep 2, 2012

    En passant, je te trouve un peu dur avec le début des années 90 : quand je jette un coup d’oeuil dans mes dvd, j’y trouve le Total Recall, Jurassic Park, le Dernier des Mohicans, l’Impasse, les films de Tim Burton… ça va, ce n’était pas l’horreur non plus je trouve.

  22. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @Stanislas : il y a eu de bons films et même de bons blockbysters, mais parmi les grands succès il y a eu des très mauvais films, genre Point Break ou Ghost,… J’ai le souvenir d’une période triste en cinéma. Mais peut-être qu’il faudrait récapituler tout ça sérieusement pour vérifier la validité de l’impression que j’en garde.

  23. By Stanislas Gros on Sep 2, 2012

    Attends de voir le Batman : Bane qui fait la Révolution Française à Gotham/Manhatan, ça vaut son pesant de surfers nazis je trouve, surtout traité avec le fameux ton sérieux, réaliste et sombre de Nolan. Et l’épisode précédent était plus efficace du point de vue de la réalisation, mais largement aussi stupide.

  24. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @Stanislas : j’attends de voir oui. J’ai lu des articles qui laissent penser que c’est intéressant du point de vue thématique, et fait pour qu’on y voit une dénonciation de ce qu’on n’aime pas, qu’on soit un républicain trépané ou un occupeur de Wall Street.

  25. By Stanislas Gros on Sep 2, 2012

    Le film est assez bâclé, et souvent les idées ne sont pas très précises ni très cohérentes, du coup on doit pouvoir y projeter un peu ce qu’on veut, mais à mon avis le républicain trépané s’y retrouve bien mieux que l’occupeur de Wallstreet (qui a clairement le rôle du méchant). Enfin tu verras.

  26. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @Stanislas : oui, je verrais, mais en DVD sans doute donc dans six mois. Personne n’avait trop envie de le voir à la maison. Idem avec Brave, qui ne disait à personne. Et ne parlons pas du Spiderman dont je suis le seul à me rappeler qu’il est sorti. Finalement notre sortie cinéma de l’été, ça a été Lola… le premier long-métrage de Jacques Demy.

  27. By Stanislas Gros on Sep 2, 2012

    Ha oui, ça peut largement attendre 6 mois, en plus en dvd tu pourras passer rapidement les passages ennuyeux, t’arrêter au milieu si tu as faim, sommeil ou mal au dos, etc. surtout qu’il dure presque trois heures (un vrai film sérieux ça doit durer trois heures).

  28. By Axonn on Sep 2, 2012

    Pour le dernier Batman de Nolan, je dois dire que j’ai eu un certain malaise quand ils expliquent que la loi Dent a rendu Gotham sure. D’accord, mais en faisant quoi ? Ça fait un peu utopie de droite « juste quelques lois dures et c’est fini la délinquance ». Alors que dans le 2, Batman admirait Dent parce qu’il était l’homme qui appliquait vraiment la loi. L’idée étant que l’ordre serait ramené par la loi après que Batman ait mis à terre ceux contre lesquels la loi est impuissante.

    De plus, Bane caricature le mouvement Occupy, sans une once d’humour (pas comme l’excellente parodie de la conférence sur les armes de destruction massives irakiennes dans Iron Man 2).

    Pour ne plus parler des autres commentaires, j’ai une remarque sur la chronologie : pour comprendre le Batman de 1968, il faut rappeler qu’à l’époque les comics sont à l’âge d’argent ! C’est l’époque où Gordon projette le Bat-signal sur la Lune, où Lex Luthor vole des pâtisseries, etc. Les comics étaient vraiment au moins aussi kitch que ça.

    Les comics sont aussi connu l’âge de bronze, beaucoup plus sérieux. Genre, les civilisations extraterrestres sont décrites de manière cohérente : plus question de créer une nouvelle espèce à chaque histoire. Les pouvoirs obéissent à des règles plus sérieuses. Etc.

    C’est vrai que les bons films sont arrivés après l’âge noir. Voir à l’âge moderne (prismatique ?). Mais je pense qu’à part peut-être les Nolan, les films ne s’inscrivent pas dans l’esprit des comics de l’âge noir (ceux qui sont considérés comme adultes à cause du ton très sombre, donc typiquement Miller).

    Pour les séries, je pense qu’il y a une certaine censure du sexe et de la violence dans les séries réalistes. Résultat : les scénaristes se défoulent quand ils traitent d’une autre époque, parce que là on les censure pas. Cela dit, il faut quand même être un peu con pour considérer que la présence de sexe et de violence interdisant la série aux enfants en fait une série plus intelligente que si elle était autorisée aux ados.

  29. By Jean-no on Sep 2, 2012

    @Axonn : la plupart des comics adaptés, sauf Batman, Sin City et Watchmen, se réfère au Silver age, c’est certain. Mais le regard qui est porté ne tire pourtant généralement pas vers la niaiserie de l’époque qui les a produites (quoique quelques films sont des adaptations un peu littérales, comme Green Lantern ou Ghost Rider peut-être). Mais du coup, ça montre bien une différence d’approche : le Batman des sixties se référait au Silver Age, comme, disons, le Hulk d’Ang Lee ou le Iron Man de Jon Favrau. Pourtant, rien à voir ! Hulk ou Iron Man traitent de thèmes assez forts et les exploitent bien : la colère, la guerre, la frustration,… On est loin du « bat spray anti requins ».
    Sur l’absence de censure dans le passé, oui, je pense que le fait de parler d’un « ailleurs » est une super excuse pour se défouler, précisément comme avec la peinture pompier…

  30. By Stéphane Deschamps on Sep 3, 2012

    Jean-No, sans rien révéler pour te laisser la découverte, je dirais qu’en substance le dernier Batman est extrêmement bien fait, que Bruce Wayne/Batman est sombre comme on l’aime quand on est venu à Batman au milieu des années 80 (Miller etc.) mais que c’est plein de grosses, grosses ficelles (et Marion Cotillard qui semble la nouvelle égérie de Nolan est fade et ne sert qu’à sortir un rebondissement final d’un chapeau cousu de fil blanc).

    Et malgré tout, le grand talent de ce film c’est de nous tenir en halein d’un bout à l’autre. C’est très bien fait.

    (un jour il faudrait que j’écrive sur les accents dans ce film, aussi : comme les acteurs ne sont pas majoritairement américains mas plutôt britanniques, Michael Caine doit contrefaire son accent pour donner une touche « cockney/working class », qui sonne encore plus anglais que les anglais, si je puis dire ; et ça c’est rigolo, parce qu’Alfred est tout sauf working class, son accent doit être snob).

  31. By kahazara on Sep 3, 2012

    et toc ;o)
    super article, bien documenté et argumenté
    je pense que l’auteur de l’article dans lexpress a une connaissance assez limitée des films d’il y a 20 – 30 ans

  32. By Smolderen on Sep 4, 2012

    Plusieurs critiques anglo-saxons ont relevé le plaisir pervers que certains spectateurs pouvaient prendre à regarder le monde de Mad Men, où les tabous actuels (machisme, alcool, tabac, mensonges…) sont joyeusement ignorés – en toute liberté- par les protagonistes. A mon sens, il s’agit d’un épiphénomène.
    Surtout… je ne vois pas comment on peut dire que la « morale » (actuelle) est respectée en sous-main par Mad Men : du point de vue scénario, toute la série repose sur le fait que les personnages – contre notre attente-, ne sont pas punis pour les transgressions de ce genre; c’est ce qui rend imprévisibles tous les développements narratifs. Et les personnages féminins qui naviguent dans cet univers de travail sont les plus intéressants, justement parce qu’ils doivent fonctionner « avec » les valeurs dominantes et essayer néanmoins de tirer leur épingle du jeu (là où les mecs ont toutes les cartes en main, et peuvent se permettre d’être unidimensionnels). Mais les « filles » doivent aussi en payer le prix. Et là où Mad Men (qui est vraiment une série d’auteur) se rapproche de notre monde, c’est dans la peinture méticuleuse des désirs (de possession, surtout) et des moyens cyniques et veules que les personnages sont prêts à mettre en œuvre pour les réaliser. Si punition il y a, c’est la lente dégradation de l’image de soi qui en découle nécessairement : la difficulté à se regarder dans la glace le matin sans se mépriser. On peut remarquer l’absence significative, dans le milieu dépeint, de « manipulateurs pervers – dans le genre Dallas – c’est-à-dire de personnages cyniques qui jouissent d’opérer de cette manière. Tous payent le prix. Cet écroulement au ralenti de l’image de soi, c’est toute l’histoire du personnage principal (mais le phénomène affecte aussi la plupart des personnages évoqués). Le scénario travaille en réalité dans la perspective d’une « biographie spirituelle » inversée – comme description d’une déchéance morale intériorisée, lucide, aussi inexorable que subtile. Ce modèle narratif qui s’inscrit dans la tradition puritaine, se trouve -soit dit en passant- complètement en phase avec le cinéma des années 50. Et je ne vois pas comment on peut nier qu’il s’agisse d’un retour vers un mode de narration adulte et sérieux , dans lequel la morale échappe complètement aux « lois » artificielles d’Hollywood, avec son mode infantile de punitions explicites et directes pour chaque transgressions.
    Par ailleurs c’est superbement filmé, joué, mis en scène et écrit.
    (Note la mini-série Mildred Pierce de Todd Haynes montre à quel point ce mouvement vers le sérieux est avéré dans le monde de la série TV – voir aussi Parade’s End qui passe actuellement à la BBC – tous les Kramer contre Kramer et autres Terms of Endearment peuvent allers se coucher face à ces œuvres (j’inclus évidemment The Wire et Six Feet Under): les excellents scénaristes qui travaillent sur ces séries – sous la houlette d’auteurs extrêmement engagés dans l’ensemble du travail d’écriture – sont en train de dépoussiérer les manuels de rhétorique hollywoodienne de manière radicale. Pour le coup, je suis assez d’accord avec ce que semble dire l’Express (je n’ai pas lu l’article original).

  33. By Jean-no on Sep 4, 2012

    @Thierry : Quand je dis que « la morale » est sauve dans Mad Men, c’est un abus, je veux dire que le jugement porté par le spectateur, à un niveau intellectuel, est moral, que l’on sait qui sont les gentils, les méchants, les courageux et les lâches, etc. Mais l’image raconte une autre histoire, avec la même perversité, disons, que le Starship troopers de Verhoeven, qui présente comme désirables les petits fascistes hédonistes terriens et nous fait détester les affreuses bestioles du désert, alors que si on suivait vraiment, on se rendrait compte que les agresseurs sont bien les terriens. J’aurais pu prendre Mad Men pareil mais la série m’a au contraire gêné (j’étais tout prêt à l’aimer, ne serait-ce que pour les qualités objectives que tu dis en termes de cinématographie), parce que malgré l’horreur décrite, elle reste une publicité pour une époque brutale des rapports entre hommes et femmes.
    En 1964, la télé américaine diffusait BewitchedMa sorcière bien-aimée, qui a des points communs avec Mad Men : des publicitaires qui se pensent sérieux mais dont le monde est ridicule (c’est plus ou moins le monde des hommes), opposés à la fantaisie et à la perversité des sorciers et des sorcières, notamment Samantha, qui a sciemment décidé de cacher ses talents et de faire croire qu’elle n’était qu’une femme au foyer… Je trouve que cette série modeste et un peu bête était une réponse excellente à l’époque.

    Ensuite : je ne dis pas que Mad Men n’est pas une série sérieuse, mais après une dizaine d’années de ces séries sérieuses, je remarque des tics dans la manière de construire les intrigues, les personnages, les retournements de situation, etc. Parfois je marche quand même, parfois ça me bloque. Tu parles de la BBC : je trouve bien plus d’idées chez eux, et bien plus d’originalité même si les finissions scénaristiques manquent parfois (j’ai un mal fou à suivre Docteur Who par exemple, alors que je vois bien que c’est bien).
    L’article de l’express ne dit pas seulement que les bons cinéastes font des séries : qui peut dire le contraire ? Il prétend que c’est à cause du cinéma d’entertainment qu’il n’y a plus de Kramer contre Kramer, négligeant au passage que l’entertainment n’est pas une nouveauté à Hollywood et que le cinéma de genre progresse en qualité (entre le Superman de 1978 et le récent Avengers, par exemple…), et ne voit pas, par ailleurs, qu’il existe toujours de bons films selon les critères que propose l’article de l’auteur.

  34. By Rémi Guertin on Sep 10, 2012

    «Les films remarqués et/ou primés des dernières années qui ne sont pas des films de super-héros à gros budget sont-ils si mauvais ? ». Tout dépend peut-être du «moment esthétique» recherché au moment de voir un film. On ne regarde pas Batman pour les mêmes raisons qu’un Bergman…

    Je lance de façon tout à fait gratuite et pour le plaisir deux titres forts intéressants qui ont été réalisés avec très peu de moyens (2 «Sundance»):
    Six string Samourai (une parodie de série Z dont le héro se révélera à lui-même par l’entremise d’un adjuvent inattendu);
    Bellflower.

    R.

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