Je suis un cyborg
juillet 23rd, 2009 Posted in Robot au cinémaUn fait-divers authentique : un dénommé Sean Stanley Smith a été arrêté récemment dans le Nevada. Signalé par un motard qui l’avait aperçu déambulant complètement nu aux alentours de l’autoroute, l’homme avait d’abord échappé à la police en s’introduisant dans un casino. Sous les yeus héberlués d’un groupe d’enfants (dans un casino ?), il avait finalement été maitrisé à l’aide de tasers.
En guise d’explications de sa conduite indécente et de sa résistance aux forces de l’ordre, il a affirmé être un robot venu du futur. Intoxiqué au LSD, il était en effet persuadé d’être un «Terminator».
La situation existe au cinéma notamment dans le film Class of 1999 II: The substitute, où un homme est persuadé , à tort, être de nature artificielle. Dans le monde réel, je ne sais pas si ce genre de délire science-fictionnesque atteint les psychotiques. J’ai demandé à un ami qui travaille en psychiatrie et celui-ci m’a dit que ça ne lui semblait pas fréquent. Je le cite : «Les ondes ont par contre un certain succès, l’impression d’être téléguidé ou influencé par une force ou des personnes extérieures (délire d’influence). Franchement la politique, les services secrets, les sociétés secrètes ou la religion sont beaucoup plus porteurs que la science fiction. Paradoxalement les thèmes propres à la science-fiction sont peut-être trop fantastiques pour servir de base à un délire.»
Le cas de l’héroïne de Je suis un cyborg lui a en revanche fait penser au très impressionnant Syndrôme de Cotard, qui se rencontre dans les dépressions mélancoliques graves et où le sujet a un rapport particulièrement étrange avec son propre corps dont il pense ne plus disposer ou qu’il croit être étranger à lui-même ou qu’il pense, à tort, défectueux.
Je suis un cyborg (Saibogujiman kwenchana) est un film coréen de Park Chan-wook (Old Boy), sorti en 2007. Il raconte le séjour en psychiatrie de Young-Goon (Lim Soo-Jung), une jeune fille aux antécédents sérieux puisque sa grand-mère, déjà, était persuadée d’être une souris. C’est quand sa grand-mère est finalement internée (à cause de l’odeur des navets dont elle se nourrissait) que Young-Goon prend conscience qu’elle est un cyborg et qu’elle peut discuter avec les néons. La radio qu’elle adorait écouter avec sa grand-mère lui sussure d’une voix douce qu’elle doit recharger ses batteries et aller tuer des infirmiers. Très rapidement, ce sont les infirmiers qui viennent la chercher, car, sur la chaîne de montage où elle assemble des radios, elle s’est intentionellement tranchée les veines et électrocutée.
À côté d’une enquête sur l’origine de son délire, toute le suspense du film réside dans le fait de savoir si Young-Goon va enfin s’alimenter normalement. Persuadée que la nourriture biologique peut la tuer, elle fait que lêcher des piles.
Elle rencontre Il-Soon (inteprété par Jung Ji-Hoon, un chanteur pop célébrissime sous le nom Rain), un électricien kleptomane qui se fait régulièrement et volontairement interner lorsqu’il est persuadé qu’il va se mettre à rétrécir jusqu’à disparaître. Le jeune homme, visiblement amoureux, fait son possible, avec l’aide d’autre patients, pour pousser Young-Goon à manger.
Il va sans dire que Young-Goon n’est pas un cyborg, mais le réalisateur n’hésite pas à nous la montrer telle qu’elle s’imagine, en mécanique guerrière capable de tirer des balles depuis le bout de ses doigts, crachant des douilles par la bouche avec le visage inexpressif d’une poupée détraquée influencée par le romantisme cyberpunk de Ghost in the shell ou de Gunmm.
Les délires de tous les internés sont ainsi montrés comme eux se les imaginent.
Visuellement le film est somptueux, avec une image extrèmement sophistiquée qui peut rappeler certains vidéo-clips et qui aurait peut-être été insoutenable sur une telle durée (pas loin de deux heures) mais avec un sujet différent. Il y a quelques moments de grâce ou de poésie, aussi, comme une séquence incongrue de yodels alpestres ou encore une scène pendant laquelle Il-Soon convainc Young-Goon qu’il peut ouvrir une trappe dans le dos de la jeune fille pour y mettre un dispositif permettant de convertir le riz en énergie électrique : il accepte d’entrer dans son monde, de partager son délire pour l’aider à vivre tandis que le personnel hospitalier garde ses distances et ne parvient à aider personne. Le message est peut-être qu’il faut être fou soi-même pour pouvoir aider un fou. J’ignore si cela fonctionne dans la vraie vie, mais le résultat, dans ce film, est séduisant.
5 Responses to “Je suis un cyborg”
By sy! on Juil 23, 2009
J’avais oublié ce film…
Je me souviens être tombé sur le site du film tres beau tout en flash (mais je ne retrouve plus) et qui m’avait donné très très envie de le voir, je vais essayer de trouver le dvd, puis je lirais ton article…
By Ne10 on Juil 23, 2009
Voici le site : http://www.d-o-e-s.com/collection/cyborg/
Merci pour cet article.
By sy! on Juil 23, 2009
Yes ! C’est ça, merci !
By renaud on Juil 24, 2009
vu dans un bout de documentaire (plus aucune source donc à vérifier) où on disait que dans les années 1950, dans des centres, des enfants trisomiques s’occupaient d’ enfants autistes. Ceux ci qui n’acceptaient aucun contact physique par exemple avec le personnel l’acceptaient venant des trisomiques.
By sy! on Août 24, 2009
ça y est je l’ai enfin vu !
effectivement ce film est une perle, acteurs justes, scénario très bien ficelé, drôle et émouvant à la fois, bref j’ai vraiment beaucoup aimé.