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Darkdrive

juin 7th, 2013 Posted in Hacker au cinéma, Interactivité au cinéma

darkdrive_dvdDarkdrive (1997) est un film de Phillip J. Roth, producteur et parfois réalisateur de quatre-vingt films d’horreur ou de science-fictions à petits budget aux titres allèchants tels que Prototype X29A, A.P.E.X. (son chef d’œuvre, apparemment), supercollider, Velocity Trap, Total Reality, Digital Man ou encore Mindstorm. Sur Amazon, les critiques des clients se terminent souvent par des avertissements tels que « Don’t watch this movie! » (ne regardez pas ce film), « A waste of time » (une perte de temps), « Avoid at all cost » (évitez à tout prix) ou encore « If you can follow this plot you need professional help » (si vous parvenez à suivre l’histoire, alors vous devez vous faire suivre par un professionnel). Ce dernier conseil m’a rassuré, car je n’ai pas compris grand chose à Darkdrive.
Il y a pourtant un début de bonne idée : dans un futur proche, les prisonniers sont enfermés dans un monde virtuel, the Matrix, la matrice. On ne comprend pas les détails techniques, on voit qu’ils sont placés sur un fauteuil, qui coulisse sur un rail, mais on ignore où est censé partir ce fauteuil, on ne le voit monter de quelques centimètres, puis être inondé de lumière, avant que la caméra, pudiquement, change de plan et ramène le spectateur dans le laboratoire sous-éclairé où travaillent les scientifiques en blouse blanche de la société Zircon, qui dirige ce programme.
Steven Falcon, l’inventeur du système, démissionne car il a découvert que cette prison virtuelle était trop dangereuse : des hackers peuvent y accéder depuis Internet, ce qui pour une raison incompréhensible a tué tous les habitants du quartier où habitaient lesdits pirates, à commencer par eux.

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La société Zircon a besoin de Steven Falcon pour se rendre dans la prison virtuelle. Afin de le convaincre, ils placent une bombe dans le panier de pique-nique de son épouse Julie (Julie Benz, que les amateurs de Buffy ont connue en Darla) qui venait justement de lui apprendre qu’elle était enceinte. Elle meurt. Il est triste, alors le soir il s’installe sur sa terrasse, un verre de whisky à la main, pour visionner des souvenirs du passé1 à l’aide d’un casque de réalité virtuelle tandis qu’un saxophone mélancolique joue un air piqué sur la bande originale de Blade Runner.
Les gens de Zircon expliquent à Falcon que le coupable de cet attentat au panier de pique-nique est en fait un dénommé Shadow man, un criminel emprisonné dans le monde virtuel. Convaincu, Falcon se fait placer sur le fauteuil magique et part enquêter dans la matrice sur le shadowman. Il y rencontre un barman qui donne des conseils, deux voyous qui cherchent à lui dérober un disque sur lequel se trouve la moitié du code qui permet de revenir dans le monde tangible, et enfin une méchante criminelle, Tilda (Claire Stansfield).
Dans le monde virtuel, il retrouve son épouse décédée. Après s’être battu contre Tilda, il rencontre enfin le mystérieux Shadow Man, qui n’est autre que lui-même. Ça se complique, mais ce il y a pire, un flashback totalement incompréhensible vient expliquer au spectateur le pourquoi de la situation, mais au troisième visionnage de cette partie, je n’ai toujours rien compris. En accord avec lui-même (enfin en accord avec son double, le Shadow Man), il décide de retourner dans monde réel où il sait qu’on va le tuer mais où il sera vengé immédiatement par une surtension qui détruira le laboratoire de la société Zircon.
Une fois tout cela fait, Falken arrive chez les morts, où il rencontre une mystérieuse petite fille et retrouve son épouse.

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Le scénariste a vu Total Recall, Johnny Mnemonic, VirtuosityTwin Peaks (dont la musique et certaines ambiances sont pastichées), Blade RunnerWild Palms, et sans doute bien d’autres films, mais n’y a strictement rien compris et mélange sans logique des idées prises ici ou là. Les acteurs s’engagent totalement dans des rôles absurdes et une histoire absurde : Ken Olandt (Falcon) joue très bien le mari qui vient de voir exploser sa femme pendant un pique-nique et qui ne desserre pas les dents tout en acceptant de mener une enquête dans une prison virtuelle incontrôlable. Gian Carlo Scandiuzzi joue très bien le rôle de Matthew, le supérieur de Falcon qui en fait le trahit. Julie Benz, la vraie star du film, même si on ne l’y voit que quelques minutes, met tout son talent dans son annonce de grossesse et l’on est charmé par ses yeux à la fois impatients de faire connaître une bonne nouvelle, et anxieux de la réaction qu’aura l’heureux papa. William Hall fait un très bon barman virtuel qui pose des questions. Enfin, Claire Stansfield est une honnête psychopathe homicide. Connue pour son personnage de Atli dans quelques épisodes de la série Xena la guerrière, Claire Stansfield a un physique assez impressionnant et dépasse tous les autres acteurs de plusieurs centimètres2.

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Un très mauvais film, donc, réalisé par quelqu’un qui ne comprend pas son propre scénario et qui a une idée plus que vague des technologies qu’il utilise. Par exemple, le hacker qui pirate la matrice utilise trois écrans en même temps, mais en plus, porte un casque de réalité virtuelle.
Je ne trouve vraiment rien à sauver dans ce film en tant que spectateur — et même en tant que spectateur amateur de mauvais films —, mais il m’intéresse tout de même par la manière ignorante dont il traite les technologies informatiques, qui ne sont ici que des monstres comme les autres : pour l’auteur du scénario, un extra-terrestre à tentacules, un robot tueur ou un monde virtuel sont des jouets interchangeables qui peuvent être utilisés sans s’embarrasser de justifications logiques ou, bien entendu, scientifiques.

  1. Les souvenirs que visionne Falcon le montrent avec son épouse dans divers moments de leur vie intime. On se demande bien qui a filmé ses images. []
  2. On peut s’interroger sur le poncif visuel qui pousse les réalisateurs, hors intention comique, à n’employer les femmes grandes que dans des rôles de ce genre, et, inversement, à ne donner des rôles de « femme honnête » qu’à des actrices plus petites que le héros (ou dont on masque l’allure imposante à l’aide d’astuces de prise de vue, comme c’est le cas pour Nicole Kidman, par exemple). []

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