Profitez-en, après celui là c'est fini

Claude Chabrol

septembre 12th, 2010 Posted in Au cinéma, Personnel

Tiens, Claude Chabrol est mort. Tel que je le voyais, il était un peu à la nouvelle vague ce que Degas était aux Impressionnistes : il avait beau faire officiellement partie de la bande, en être même un des fondateurs, en tant que pilier des cahiers, il appartenait pour moi à un monde bien différent, celui de ses films qui semblaient être l’autoportrait grinçant d’une bourgeoisie feutrée qu’il devait aimer et détester avec une égale intensité… Amusant comme on assimile les réalisateurs à leurs œuvres, à leurs personnages, à leurs acteurs fétiches.
Je ne sais pas si j’aimais son cinéma d’ailleurs. Je pense que j’ai toujours regardé ses films avec plaisir, notamment pour les numéros d’acteurs qu’on y voit (Stéphane Audran, Marie Trintignant, Isabelle Huppert, Jean Poiret, Jean-Claude Brialy, Philippe Noiret…), mais je ne me suis jamais précipité pour voir le dernier Chabrol. D’ailleurs je crois n’en avoir jamais vu un seul en salle.

J’ai un souvenir personnel de Claude Chabrol : il tournait Le Sang des autres dans le fort de Cormeilles-en-Parisis, c’est à dire chez moi. J’étais en classe de troisième, j’ai séché le cours de madame Legros, avec le plein accord de ma mère qui avait écrit comme excuse quelque chose comme : « Jean-noël est parti assister au tournage d’un film », ce qui lui a valu de se faire sermonner car, lui a-t-on dit, il aurait fallu inventer un mensonge acceptable, dire que j’étais malade ou quelque chose du genre. L’affaire n’est cependant pas allée très loin.
Aujourd’hui, madame Legros est la prof de sciences physiques de mes deux derniers.
L’actrice principale du film était la petite Jodie Foster, déjà légendaire pour son rôle dans Taxi Driver (que je n’avais évidemment pas vu) mais dont la carrière n’avait pas encore été relancée par Le Silence des agneaux. Le film de Chabrol n’a pas fait grand chose pour sa carrière d’ailleurs, ni pour celle du cinéaste, car même s’il était l’adaptation d’un roman de Simone de Beauvoir, c’est sans doute un de ses films les moins connus.

Je me rappelle de la patience du réalisateur et de son équipe qui ne nous ont pas virés du tournage alors que nous étions une dizaine de collégiens à y assister et après qu’un de nous, Daoud, ait ruiné une prise de son en voulant commenter, pensant qu’elle était terminée, la séquence d’action où Michel Robin (qui était surtout pour nous l’inventeur « Doc » dans la série Fraggle Rock) devait aider des gens à quitter une ferme dans une voiture. Toute l’équipe s’était tournée vers lui avec un regard atterré et un « sssshhhtt » bref et incroyablement sonore.
C’est là que j’ai pu vérifier à quel point le cinéma est un métier laborieux, technique, intense et sans doute passionnant.
Voilà, c’était l’anecdote sans intérêt du jour.

(photos : le fort de Cormeilles-en-Parisis)

  1. 9 Responses to “Claude Chabrol”

  2. By ab on Sep 12, 2010

    Non, pas sans intérêt du tout !

  3. By uthagey on Sep 12, 2010

    Ai croisé le bonhomme dans une rue de paris, assis à la terrasse d’un restaurant…

    Surpris, je suis revenu sur mes pas… (oui, c’était un peu con)

    Là, je lui demande, forcément, « dites euh… Vous ne seriez pas … »

    Et le gars assis à la terrasse, « Non, non.. ce n’est pas moi.. mais je lui ressemble beaucoup, c’est vrai… ».

    [avec, bien sur, l’oeil rieur et le sourire en coin…]

    Jamais su lequel de nous deux avait joué au plus con…

    (mais j’ai vu 2 ou 3 de ses films au ciné, plus tous ceux à la TV)

  4. By Malla pinnsvin on Sep 12, 2010

    J’ai souvent remarqué que les gens se sentent offusqués quand on dit la vérité, comme si inventer un mensonge était la moindre des politesses… ils ont peut-être raison…
    Je ne me souvenais pas que c’était un film de Chabrol.

  5. By Jean-no on Sep 12, 2010

    @Malla : Je pense que le mensonge se justifie rarement et complique inutilement la vie de tout le monde (puisqu’un mensonge, une fois proféré, doit être entretenu)… Bah…
    Donc oui, c’était un Chabrol.

  6. By Legrenier on Sep 13, 2010

    Les anecdotes se revendiquant sans intérêt ont toujours de l’intérêt. Amusant comme je rejoins votre perception de l’oeuvre de Chabrol : plaisant, mais je ne me serais pas réveillé la nuit pour en voir un… C’est surtout le bonhomme qui paraissait très sympathique, il était passé assez récemment dans C à vous, l’émission où l’on parle en mangeant, avec la belle Alessandra…

  7. By Pierre F on Sep 14, 2010

    Je partage aussi ce sentiment à propos des films de Chabrol, pas vus en salle non plus, hormis peut-être Le beau Serge. J’avais trouvé Chabrol génial en tant qu’acteur dans le seul film de Pierre Zucca que j’ai du voir, Alouette je te plumerai, au point de regretter parfois qu’il ne passe pas plus souvent de l’autre côté de la caméra.

  8. By David Rault on Sep 16, 2010

    Claude Chabrol était devenu mon ami au fil du temps. Je le rencontrais souvent, deux a trois fois par an, depuis une dizaine d’années, en festivals ou chez lui, dans le Marais. Je me souviens de ce festival de Cognac où, a la fin de la cérémonie de clôture, nous lui avions demandé s’il serait d’accord pour venir sur scene en compagnie de deux policiers pour m’arrêter, me passer les menottes et s’adresser au public a la manière de Colombo. Un truc un peu idiot en somme, que l’on n’aurait jamais osé demander à un autre – mais bien sûr, il a dit oui, dans un grand sourire jubilatoire, et il l’a fait. Je me souviens aussi de l’hommage surprise que nous lui avions rendu en compagnie de Jean Yanne, Isabelle Huppert, Michel Duchaussoy et quelques autres, qui l’avait vraiment touché. Et je me souviens de notre derniere rencontre, a Beaune, en avril dernier. Il etait fatigué bien sur, mais il semblait eternel. J’ai ete surpris d’apprendre sa disparition, et il me manque déjà.

  9. By Kemli on Avr 15, 2011

    Un membre de l’association des Amis du Fort de Cormeilles qui passait par là et y reconnait une photo… puis le nom de sa prof de physique ^^. Alors bonjour à toi qui es passé par le Fort et qui nous livre une anecdote dont nous raffolons et voudrions connaitre toutes celles des autres qui sont aussi passés par là! Le Forgeron de l’AFC

  10. By leonilde on Juin 2, 2012

    Super anecdote. Pour ma part j’ai vécu dans ce fort pendant 8 ans, ma famille a vu défiler pas mal de tournages. Dans l’un d’entre eux notre chienne avait un rôle, celui du chien de Napoléon III, en 1979 avec Michel Duchaussoy.

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