L’effet Koulechov, ou Effet-K, attribué au cinéaste soviétique Lev Koulechov, professeur à l’école de cinéma de Moscou, procède d’une expérience que ce dernier aurait menée en 1921 ou 1922 pour vérifier et démontrer la puissance du montage au cinéma. On y voyait un plan fixe sur l’expression totalement neutre de l’acteur Ivan Mosjoukine, placé après une séquence montrant de la nourriture, un enfant dans un cercueil et enfin, une femme séduisante.
La légende raconte que les spectateurs d’alors se sont extasiés devant l’art du comédien à interpréter la faim, la douleur paternelle ou le désir.
On constate en tout cas un effet de contamination sémantique : nous regardons le plan sur le visage sans expression comme s’il était une réponse au plan qui précède. Les sciences cognitives et la psychologie sociale l’ont vérifié depuis, y compris en dehors de l’image animée : si l’on place la tête d’une personne à côté de l’image d’une paire de baskets, le personnage sera jugé plus sportif que si la même photographie était placée en regard d’une paire de lunettes. Si un animateur télé se montre neutre face à ses invités, il sera jugé connivent.
Les images qui précèdent ne sont que des reconstitutions de la célèbre expérience dont on ignore, en fait, si elle a effectivement eu lieu. On en a un temps attribué la paternité à Vsevolod Poudovkine, disciple de Koulechov. Il existe une expérience de Koulechov que ce dernier a précisément décrite est qui est, sans contredire les conclusions de celle-ci, inverse : le cinéaste demandé à un acteur d’exprimer les sentiments suscités par deux situations différentes : affamé, un détenu se voit porter une copieuse assiette de soupe et s’en réjouit ; vivant dans l’ennui, un détenu est libéré. Or malgré la grande différence de jeu de la part de l’acteur, c’est la succession des plans, quelle que soit la combinaison choisie, qui prévaut. Dans l’interpétation que fait le spectateur, le montage a plus d’importance que le travail d’acteur.