J’avais pris un peu d’avance car il ne fallait absolument pas que je le rate mais mon train était à quai, prêt à partir, lorsque je suis arrivé à la gare. Les portes semblaient prêtes de se refermer, pas le temps de composter1. J’ai eu raison, le train est parti aussitôt. Juste à côté de moi, sur la plate-forme, trois contrôleurs ont annoncé qu’ils devaient vérifier les billets de chacun. Ils ont accompagné l’annonce en agitant leur clé de Berne, comme s’ils actionnaient un verrou imaginaire.
J’ai fouillé mes poches assez longtemps, avant de me rappeler que, si je ne trouvais aucun ticket composté, c’est que je n’en avais composté aucun, et que j’étais donc parfaitement dans mon tort. J’ai expliqué mon cas à une contrôleuse, sans essayer de négocier quoi que ce soit, mais en discutant longuement et en lui apprenant notamment que le ticket « section urbaine » que j’utilise n’a pas toujours existé, qu’autrefois on pouvait avoir un ticket qui ne faisait que « train » et pas « train + métro », et que l’impossibilité de séparer les deux me semblait être de la vente forcée. Je lui ai parlé de l’évolution de la SNCF, des gares,… L’amende était de 43 euros, que j’ai payés sans rechigner mais en rappelant que pour certaines personnes, c’était une grosse somme, que ça représentait la moitié d’une journée payée au SMIC. Pour finir, je lui ai écrit l’adresse de mon blog, mais j’ai dû m’y reprendre à plusieurs fois car ça n’était pas très lisible. Je m’appliquais à faire de belles lettres mais il y avait toujours un détail qui gâchait l’ensemble.
C’est d’avoir eu des difficultés à écrire à la main qui a fini par me réveiller.
- Depuis quelques années, dans ma gare de banlieue, les horaires sont « en temps réel », c’est à dire que les panneaux d’affichage ne m’informent pas vraiment des horaires prévus pour les trains, mais de leur passage effectif. Ce qui fait qu’il n’est pas rare qu’un train quitte la gare avec trois minutes d’avance. [↩]
« qu’autrefois on pouvait avoir un ticket qui ne faisait que « train » et pas « train + métro », et que l’impossibilité de séparer les deux me semblait être de la vente forcée. Je lui ai parlé de l’évolution de la SNCF, des gares,… »
Ça c’est drôle : dans un rêve, être dans son tort, mais chipoter quand même, chercher mille moyens de compenser la caractère anonyme et automatique de la sanction. Vouloir insuffler de l’humain, de la subjectivité, pour exister symboliquement.