Profitez-en, après celui là c'est fini

Se défendre à tout prix d’un ennemi, jusqu’à le créer

octobre 9th, 2016 Posted in Écrans et pouvoir, Fictionosphère, Les pros, Parano

Entre 2006 et 2011, les États-Unis (et plus précisément le Pentagone, la CIA et le Conseil de sécurité nationale) ont dépensé plus d’un demi-milliard de dollars pour commander à l’agence de relations publiques britannique Bell Pottinger du matériel de propagande, d’abord destiné à promouvoir la tenue d’élections démocratiques en Irak, mais qui a vite dévié vers quelque chose d’absolument impensable : la production de fausses vidéos attribuées à Al Qaeda.

pentagone

L’affaire a été révélée par Martin Wells, employé en Irak comme monteur par Bell Pottinger entre 2006 et 2008. Le Bureau of investigative journalism, qui a enquêté sur les affirmations de Martin Wells, a reçu la confirmation par Bell Pottinger et par le Pentagone de l’existence d’un contrat de cent-vingt millions de dollars par an liant l’agence de relations publiques à l’administration américaine, en partie sous l’autorité d’un groupe dédié aux opérations psychologiques (joint psychological operations task force), et a interviewé une demi-douzaine de personnes directement concernées. Selon l’enquête journalistique, trois types d’images ont été produites dans ce cadre : des publicités présentant Al Qaeda de manière négative ; de faux extraits d’émissions diffusées par des télévisions arabes (destinées au public occidental ?) ; et enfin, des vidéos faisant la promotion d’Al Qaeda, gravées sur des milliers de CD-roms disséminés aux quatre coins de Bagdad. Un des buts de cette dissémination aurait été d’identifier les sympathisants d’Al Qaeda : les CD-roms contenaient un petit bout de code qui contactait la plate-forme Google Analytics et permettait de connaître les adresses IP de leurs utilisateurs.

Explosion d'une voiture piégée en Irak en 2005

Explosion d’une voiture piégée en Irak en 2005. Photographie : Ronald Shaw Jr., pour le compte du Département de la Défense des États-Unis.

Cette information est troublante, car Google Analytics, aujourd’hui en tout cas, s’interdit de révéler l’adresse IP des personnes qui accèdent à un contenu, et si c’était déjà le cas en 2006 (je n’en ai pas de souvenir), alors il fallait que Google, qui dispose de ces informations, les fournisse. Outre la question du fonctionnement de Google Analytics, d’un point de vue pratique, il fallait que les personnes qui visionnent le CD-rom disposent d’une connexion (entre 2006 et 2008, seuls 1% des irakiens avaient accès à Internet) et se montrent très imprudents, deux conditions qui laissent imaginer un rendement assez faible : pour identifier quelques personnes visionnant le CD-rom (ce qui d’ailleurs ne suffisent pas à prouver une sympathie : ne regardez-vous, ne lisez-vous que des choses avec lesquelles vous êtes en accord ?), il fallait diffuser des milliers de vidéos de propagande djihadiste suffisamment crédibles pour convaincre les sympathisants d’Al Qaeda de la vitalité de l’organisation. Plus tordu encore, ces vidéos, que ça ait été leur but de départ ou non, sont parvenues dans les mains des médias et ont servi, bien au delà des frontières de l’Irak, à convaincre le monde entier de la vigueur d’Al Qaeda, et donc, bien sûr, à en convaincre les étasuniens et à persuader ces derniers du bien-fondé de la guerre qu’ils menaient chez le 7e producteur mondial de pétrole. La loi américaine interdit à l’État fédéral de soumettre le peuple à la propagande, mais peut difficilement empêcher la propagande destinée à d’autres pays de lui revenir ensuite.

Sans être

Sans comparer la gravité des faits, et en soupçonnant plus d’opportunisme et de naïveté que de calcul et de manipulation, je suis intéressé par le cas récent du Burkini : les médias qui veulent illustrer ce vêtement piochent dans un stock d’images assez réduit : images de promotion réalisées par la marque qui le commercialise, ou photographies de deux australiennes venues braver les plagistes de Villeneuve-Loubet en burkini, apparemment pour le compte de la chaîne de télévision australienne Channel 7 qui cherchait à provoquer des réactions sur les plages pour pouvoir les filmer ensuite… À croire que ce vêtement ne se rencontre pas assez souvent pour susciter une iconographie variée. Combien d’exemplaires de cette tenue ont été vendues en France avant qu’on lance une campagne contre elle ? Je ne suis pas loin de penser que la mode du burkini autant que l’hostilité à son encontre, d’ailleurs, ont été forgées médiatiquement de manière très artificielle.

Plus d’une quarantaine de sociétés ont été embauchées par l’administration américaine pour produire du matériel de communication lié à la troisième guerre du Golfe, comme Bell Pottinger ou comme le Lincoln Group, qui a lui aussi reçu une centaine de millions de dollars, en 2004, pour diffuser dans la presse irakienne des informations qui appuyaient le point de vue étasunien. Cette opération de mystification et de corruption a été révélée par le Los Angeles Times en 2005. La Maison-blanche avait assuré découvrir l’affaire par l’enquête journalistique, mais le commandement militaire américain a finalement admis la manipulation, expliquant que ce n’était qu’une réponse « de bonne guerre » aux désinformations provenant du camp adverse. Le Lincoln Group a rapidement disparu et l’affaire n’est pas allée loin.

Il y existe de nombreux précédents dans l’histoire récente des États-Unis, les plus célèbres sont le programme de contre-espionnage intérieur COINTELPRO, destiné à discréditer diverses menaces intérieures (KKK, Black Panthers, amérindiens, Weathermen, Parti communiste, féministes, pacifistes,…) notamment par l’infiltration et la calomnie ; l’opération Stay-Behind, destinée à discréditer le communisme dans toute l’Europe (et notamment en Italie avec le groupe Gladio) ; l’Opération Northwoods, heureusement refusée par Kennedy et qui proposait de discréditer le régime de Fidel Castro en organisant des attentats attribués à Cuba sur le sol américain.
Ces coups-montés ont été révélés par des journalistes, mais aussi par des enquêtes parlementaires ou par la déclassification de documents, car on doit reconnaître aux États-Unis une capacité unique à enquêter sur les zones d’ombre de leur propre histoire — il est probable qu’ils ne soient pas seuls à se rendre coupables de manigances tordues, mais personne ne sait mieux les avouer (s’en vanter ?) ensuite.

Prête à

En 1788, prêt à se lancer dans une guerre contre sa cousine Catherine de Russie alors que la constitution lui interdisait d’être à l’origine d’un conflit, le roi Gustav III de Suède a commandé de faux uniformes russes au couturier de l’Opéra Royal, afin d’envoyer des soldats de sa propre armée, déguisés, en attaquer d’autres au poste frontière de Puumala, lui fournissant le casus belli attendu. La courte guerre russo-suédoise a duré deux ans et n’a pas eu de conséquences géopolitiques, Gustav III ne cherchait pas à conquérir la Russie, le conflit ne servait qu’à distraire ses sujets dans un contexte politiquement difficile pour lui. Plus d’une trentaine de milliers de personnes ont trouvé la mort directement ou indirectement au cours de cette guerre. Le roi Gustav III a été assassiné deux ans plus tard.

Même si elle ne semble pas si étonnante rétrospectivement, la révélation de cette incroyable manipulation donne un peu le vertige, puisque l’on comprend que les États-Unis, pour pouvoir combattre Al Qaeda en Irak, ont été obligés d’inventer Al Qaeda en Irak, ou en tout cas, ont été forcés de donner à Al Qaeda une importance imaginaire. Même sans être complotiste, on est forcé de se demander jusqu’où les choses sont allées : ces images ont-elles suffi, ou bien certaines explosions de véhicules, ou certains enlèvements et exécutions pourrait-ils faire partie de la communication étasunienne en Irak ? Lorsqu’une antenne de la Croix-Rouge ou de l’ONU est victime d’un attentat, ou lorsqu’un journaliste anglo-saxon ou un des ressortissants coréens, turcs, bulgares, sont enlevés et exécutés, on peut imaginer que cela participe à légitimer l’action militaire étasunienne aux yeux de ses citoyens comme à ceux du reste du monde.

Dans un rapport

Dans le rapport Illusion of justice (21 juillet 2014), l’ONG Human Rights Watch et l’institut des droits de l’homme de la faculté de droit de l’Université Columbia accusent le FBI d’avoir sciemment poussé des musulmans américains à commettre des attentats sur le sol des États-Unis, allant jusqu’à les payer pour et à encadrer logistiquement un jeune homme atteint de troubles mentaux, Rezwab Ferdaus.

Bien sûr, on ne veut pas y penser trop, puisque cela nous rangerait dans le camp honni des croyants en une théorie du complot. Le public désire peut-être même si fortement ne pas penser à tout cela que l’information de la création par les États-Unis d’images attribuées à Al Qaeda, bien que relayée par les grands médias de tout bord et du monde entier, n’a fait que peu de vagues. En l’évoquant, ces jours derniers, je constate que peu de gens y ont prêté attention ou l’ont enregistrée. Je suis curieux de savoir comment les journaux télévisés ont traité l’affaire, car je n’ai rien vu passer. La grande presse, depuis le Figaro1 au Times of Israel en passant par France 24, la Tribune de Genève et l’Independant, a relayé l’information, et souvent sans utiliser le conditionnel2. Même si le premier média à l’avoir dévoilé est l’américain The Daily Beast, je remarque que les journaux américains, apparemment obnubilés par la campagne présidentielle et focalisés sur le danger que représente Donald Trump plus que sur le bilan des deux derniers présidents, n’ont pas donné un écho significatif à l’affaire.

...

Un flyer anti-Ben Laden produit dans le cadre des opérations psychologiques US, en Afghanistan. De la propagande assez banale, avec un faux-air du They Live (1988) de John Carpenter.

Il y a pourtant de quoi s’inquiéter, et se demander dans quel monde on vit si l’ennemi contre lequel on se défend a été sinon créé, du moins aidé à exister significativement par ceux-là même qui se défendent de lui.

Avertissement : à partir de ce point, l’article devient un peu vaseux

Dans son Retour au meilleur des mondes (1958), Aldous Huxley affirmait que « l’avenir [du totalitarisme] a des chances de ressembler au Meilleur des mondes plutôt qu’à 1984« . La dictature stalinienne décrite par Orwell (ou sa prédécésseure Karin Boye), qui s’appuie avant tout sur la crainte du dictateur, est une idée effectivement démodée, mais la civilisation de le soumission volontaire et de l’abrutissement (loisir, plaisir, drogues) imaginée par Huxley ne suffit sans doute pas non plus, car l’être humain se satisfait rarement de ce qu’il a et ne déteste pas toujours réfléchir3.
La civilisation étasunienne qui nous sert de référence est bien une civilisation de distraction et de consommation, comme dans Le Meilleur des mondes, mais c’est aussi, comme dans 1984, une civilisation fondée sur la peur. Non pas la peur d’un état totalitaire, mais la peur de l’autre : l’asocial futur tueur de masse, le policier si on est noir, les noirs si on est blanc, et plus généralement, la peur du l’ensemble des autres pays du monde. Cette peur s’entretient à coup d’inégalités criantes, en favorisant la circulation des armes à l’intérieur du pays, en vivant dans l’ignorance du reste du monde, et enfin, en maintenant un perpétuel état de guerre à l’extérieur de ses frontières, une guerre qui se veut défensive, généralement de manière préventive, et souvent dans des pays qui disposent en abondance de matières premières convoitées. Évidemment.

ontemanipule

Communication un peu maladroite du gouvernement qui n’a pas peur de dire au citoyen : « On te manipule ». Avant de pouvoir consulter le site, le lecteur est accueilli par une annonce qui lui propose de de s’inscrire à la mailing-list du gouvernement. Le message est un peu trouble : « on te manipule point fr et on t’inscrit à la mail-list du premier ministre ». Hrem. Sur le site, on peut visionner une vidéo mettant en scène l’humoriste Kevin Razy dans deux rôles : d’un côté, un garçon crédule qui parle avec un accent de zonard et est vissé à son écran d’ordinateur, et de l’autre un jeune homme bien peigné qui explique posément qu’il faut exercer son esprit critique et ne pas croire tout ce qu’on trouve sur Internet. Intéressant conseil de la part d’un site Internet produit par le gouvernement qui a institué le « délit de consultation de sites djihadistes » voulu par Sarkozy il y a quelques années. On n’exerce pas l’esprit critique à coup de « circulez, y’a rien à voir ! ».

En février dernier, on m’a invité à intervenir sur le plateau d’une prestigieuse émission en prime-time, au sujet des théories du complot, que le gouvernement français avait décidé de combattre activement en lançant le site OnTeManipule.fr. Je n’aurais eu que quelques heures pour me préparer et j’ai aussitôt refusé, et aussitôt regretté de l’avoir fait, car plus j’y ai réfléchi et plus je me suis convaincu que, peut-être, j’aurais bel et bien eu des choses à dire sur le sujet. Même si je n’y suis pas spécialement « bon client » (mais je progresse), j’adore parler à la télévision ou à la radio. Je me console d’avoir refusé en me disant que je n’aurais peut-être pas eu l’habileté verbale et la présence d’esprit nécessaires pour être certain de ne pas être compris de travers, et pour qu’une phrase extraite de son contexte ne soit pas montée en épingle. Il faut dire que mon premier réflexe au sujet des théories du complot est l’affirmation périlleuse qui suit : les complots existent.
Puisqu’ils existent — et on en connaît depuis l’antiquité —, il est assez naturel que chacun de nous se demande, face à un événement inhabituel, si la vérité est bien ce qui nous apparaît ou ce que l’on nous impose de manière officielle. Chez certains, cette curiosité prend un tour paranoïaque : pour eux, rien n’est jamais ce qu’il semble — à commencer par le bien et le mal —, la vérité est cachée, le mensonge est omniprésent4, et aucun fait n’est imputable au hasard5..

L'émission Les Clés des médias, par FranceTVéducation, est plutôt bien faite, mais son épisode sur la théorie du complot est un peu étrange : il raconte les malheurs de Kamel, qui a de mauvaises notes en anglais et pense être victime d'un complot. Sa mère lui explique la locution théorie du complot, en prenant l'exemple de la destruction du World Trade Center, en 2001, ce qui rend le jeune homme perplexe : ceux qui croient à ça [qu'un président pourrait commanditer une attaque contre son propre peuple], "c'est des débiles ?". On connaît pourtant plus d'un président qui, sans rien cacher, d'ailleurs, a jugé pertinent d'envoyer les citoyens de son pays mourir loin de chez eux pour servir des objectifs dont ils ignoraient tout.

L’émission Les Clés des médias, par FranceTVéducation, est plutôt bien faite, mais son épisode sur la théorie du complot est un peu étrange : il raconte les malheurs de Kamel, qui a de mauvaises notes en anglais et pense être victime d’un complot. Sa mère lui explique la locution théorie du complot, en prenant l’exemple de la destruction du World Trade Center, en 2001, ce qui rend le jeune homme perplexe : ceux qui croient à ça [qu’un président pourrait commanditer une attaque contre son propre peuple], « c’est des débiles ? ». Je ne fais pas partie des gens qui croient à une volonté étasunienne dans les attentats du 11/9 (j’y vois en revanche le boomerang qui revient dans la figure de celui qui l’a lancé), mais les attentats ne sont qu’une forme de guerre parmi d’autres et on connaît plus d’un chef d’État qui, sans rien dissimuler, d’ailleurs, a jugé pertinent d’envoyer les citoyens de son pays mourir loin de chez eux pour servir des objectifs dont ils ignoraient tout.
Par ailleurs, qualifier les gens qui poussent leur imagination au delà des limites qu’on a tracées pour eux de « débiles » ou de les supposer manipulés n’est pas spécialement propice à encourager l’esprit critique, vanté par la séquence, c’est juste une manière vexante d’imposer un argument d’autorité.

L’idée que nous vivons dans un monde simulé, à la manière de Matrix ou de Simulacron 3, a été énoncée par le philosophe Nick Bostrom, et plus récemment par Elon Musk, qui ont inspiré un récent rapport de la Bank of America Merril Lynch, qui estime la probabilité que ce que nous considérons comme la réalité soit en fait une simulation informatique entre 20 et 50%. On apprend cette semaine que deux milliardaires américains anonymes envisagent si fortement cette éventualité qu’ils financent des chercheurs pour trouver le moyen de « hacker » la réalité, de s’en extraire.
Il n’y a pas assez de « glitchs » dans la matrice pour que je prête personnellement foi en cette irréfutable6 croyance techno-gnosticienne, mais je remarque que notre réalité est bel et bien « hackable » à coup d’images, d’icônes, de récits, enfin de tout un imaginaire qui fait exister les Al Qaeda, les Daech et les burkinis, qui font exister Éric Zemmour et Nicolas Sarkozy.
Philip K. Dick a écrit que la réalité est « ce qui continue d’exister lorsqu’on cesse d’y croire » (il a aussi dit qu’elle n’était qu’un point de vue), mais une partie de la réalité la plus concrète qui soit peut être produite par des fictions.

"Sens commun" est le nom d'une association politique issue de la Manif pour "tous", et autres "Printemps français".  think tank

J’ai compilé quelques visuels piqués sur le site de « Sens commun »7.
Je trouve intéressante leur intention affichée de « réconcilier la politique avec le réel », car leur projet de reconquista du pays par les valeurs d’une bonne grosse droite/extrême-droite qui se considère plus légitimement catholique que son pape, propose le contraire d’une réconciliation entre le réel et la politique, ils semblent plutôt vouloir imposer au réel de s’accorder à leurs représentations et à leurs préjugés, notamment en matière de mœurs : leur « réel » n’est pas celui des scientifiques, un objet de recherche et d’exploration, c’est est un argument d’autorité pour imposer ce qu’annonce leur nom : un « sens commun », une opinion jugée supérieure au raisonnement autant qu’aux faits nouveaux.
On remarquera que leur imaginaire est sous influence américaine, puisque pour illustrer l’importance pour la France de s’engager dans l’Otan, ils utilisent une photographie de l’opération Golden pheasant, menée par Ronald Reagan au Honduras en 1988, et que leur visuel « au service de la France » est un piteux pastiche de l’élévation du drapeau sur Iwo Jima, une des plus célèbres photographies de la mythologie iconique américaine.

Les amateurs de complotisme s’excitent sur les manipulations invisibles, et bien entendu il en existe pléthore, mais j’ai l’impression que les guerres (idéologiques, économiques, militaires) auxquelles nous participons (parfois à notre insu) se déroulent plus que jamais sur le terrain de l’imaginaire — il suffit de penser avec quelle facilité nous nous forgeons un avis tranché sur d’innombrables faits auxquels nous ne sommes absolument pas reliés, ou de voir les craintes que nous éprouvons face à des menaces dont l’existence tangible n’est pas prouvée, et de voir à quel point ces craintes nous mènent à agir contre notre intelligence et nos principes — je rappelle souvent cette vérité : pour faire rentrer les poules dans un poulailler, il ne faut pas les appeler, il faut les diriger en marchant derrière elles.

Je ne sais pas trop si la fin de cet article est intelligible, mais tant pis, on en recausera, et en attendant, je clique sur le bouton « publier ».

  1. Sauf erreur, le très atlantiste Le Monde n’en a pas parlé, mais des médias appartenant au groupe comme le Courrier International, ou ayant des financeurs en commun comme L’Obs et le Huffington Post, si. Libération ne semble pas s’être intéressé au sujet non plus. []
  2. Curieusement, c’est la presse gratuite ou provinciale qui préfère annoncer les choses au conditionnel, tandis que les médias plus réputés ont pour la plupart publiés des articles affirmatifs. []
  3. La meilleure description des traits haïssables de la civilisation américaine, et la meilleure évocation de leur caractère séduisant, reste pour moi le film Starship Troopers (1997), par Paul Verhoeven, []
  4. L’omniprésence du mensonge dans la société humaine est une vérité aussi, du reste, et nous sommes bien placés pour savoir à quel point puisque nous mentons nous-mêmes tous les jours. Lorsque l’on vous réveille d’un coup de téléphone et que vous bredouillez « non non, je dormais pas », vous venez de commencer votre journée sur un mensonge, et ce n’est pas le dernier : il y a cet horrible nourrisson que vous trouverez « très beau » ; cette anecdote que vous attribuerez à un ami mais qui est en fait celle d’un ami d’ami d’ami ; ce retard ou cette absence dont vous n’oserez pas donner la véritable raison ; etc. Il ne s’agit bien sûr pas de manipulation, mais il n’en reste pas moins vrai que dans bien des cas, le mensonge est un réflexe, une manière d’éviter de trop longues conversations, une manière de garder le beau rôle, ou de ne vexer ou inquiéter personne. Les États (et leurs dirigeants) sont sans doute assez naturellement amenés à raconter des histoires simples ou à éviter d’admettre les faits qui les déshonorent, ou tout simplement parce que, comme l’a dit un jour Mark Twain, la réalité est, contrairement à la fiction, dispensée d’être vraisemblable (« The only difference between reality and fiction is that fiction needs to be credible”), ce qui signifie que pour présenter la réalité de manière satisfaisante, il faut souvent en faire une fiction.  []
  5. J’ai toujours pensé qu’il existe un lien entre la foi en une divinité et les croyances compotistes. Dans les deux cas, il y a l’envie de croire que tout ce qui advient est le fruit d’une volonté infaillible et le résultat d’une planification. []
  6. Irréfutable au sens épistémologique, puisque l’on ne peut en prouver ni la validité ni la fausseté. []
  7. Sens commun est une association politique issue de la Manif [soi-disant] « pour tous », et autres « Printemps français » qui entend aider le centre et la droite à se décaler vers des valeurs humanistes telles que l’augmentation de la dépense militaire, l’enseignement aux enfants de l’amour de la patrie, l’interdiction de construire trop de logements sociaux, la suppression de l’impôt sur la fortune (et plus généralement un rééquilibrage des impôts, afin que les pauvres se montrent un peu plus solidaires des riches), et vers une écologie dont le prémisse est que « l’homme est la clef de voûte de la nature ». Ils aiment bien le mot « clef de voûte » car pour eux, la clef de voûte de l’humanité, c’est la famille traditionnelle, avec mariage officiel entre personnes de sexe différent. []
  1. One Response to “Se défendre à tout prix d’un ennemi, jusqu’à le créer”

  2. By Florian on Oct 10, 2016

    Cela me rappelle ce dossier du diplo (juin 2015). Je mets le lien en complément :

    https://www.monde-diplomatique.fr/2015/06/A/53058

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