Donc, Nathalie et moi-même n’avons pu voter au premier tour des primaires de l’écologie : privés d’élection pour cause de non possession de téléphone mobile.
Mais notre fille Florence, elle, dispose d’un numéro de téléphone et souhaitait participer à la primaire. Elle s’est donc inscrite pour le faire, payant les deux euros réglementaires. Et puis un beau jour, un peu avant l’ouverture du vote, elle a reçu le message qui suit :
De : election@acces-neovote.com <election@acces-neovote.com> de la part de Primaire écologiste <election@acces-neovote.com> Envoyé : jeudi 16 septembre 2021 08:33 À : Florence Lafargue <***@***.fr> Objet : Primaire des écologistes Bonjour, Nous avons le regret de vous informer que, suite à des contrôles de sécurité opérés par notre prestataire, et ce conformément aux Conditions Générales d’Utilisation (CGU), votre inscription à la Primaire des écologistes et votre droit de vote pour ce scrutin ont été suspendus. Comme indiqué dans nos CGU, aucun remboursement ne sera effectué. En vous remerciant de votre intérêt pour la Primaire de l’écologie, L’équipe de la Primaire des écologistes
Elle n’a pas été seule dans son cas, ce sont en fait 1464 personnes qui ont été privées de droit de vote et pour qui aucun-remboursement-ne-sera-effectué-en-vous-remerciant-salut, au motif que leur identité était suspecte. Une raison du soupçon est la similitude de la partie conservée des numéros de carte bancaire : il suffit qu’une personne ait un certain nombre de chiffres en commun pour que le système considère que la carte employée est la même.
Au même moment, sur Twitter, un troll se vantait d’avoir voté six fois… Pour la candidate qu’il juge « bête » et « folle » et qui lui semble la plus à même de faire échouer son parti lors de l’élection nationale qui arrive.
Bon, bref, avec trois souhaits de participation contrariés, notre famille est un peu spécialiste des problèmes de vote en ligne. J’en tire trois conclusions :
- tout d’abord, que même le parti qu’on aurait cru le plus à même de faire une critique du téléphone mobile l’impose comme instrument de citoyenneté et preuve d’identité.
- ensuite, un constat que la démocratie en ligne n’est pas très au point. Il existe pourtant des solutions — comme celle de stocker l’identité exacte des électeurs, connue par un prestataire de confiance tiers.
- et pour finir, l’intuition personnelle que les candidats, malgré une convergence sur le programme, se défient les uns des autres et restent, malgré leurs belles paroles contre le présidentialisme monarchique à la française, embarqués dans une guerre d’égos. Je ne vois en effet que le manque de confiance et de fair-play qui explique un fonctionnement si rigide et capable de causer tant de faux positifs. Le prestataire Néovote insiste en tout cas sur le fait que la situation est consécutive à des choix explicites de la part des écologistes.
Tout ça ne me donne pas très envie d’être attentif à la suite de la campagne des écologistes, je dois dire, alors même que les questions traitées n’ont jamais été si urgentes. Ce n’est bien sûr que le tout premier épisode déplaisant d’une campagne qui, toutes tendances politiques confondues, s’annonce particulièrement pénible.
Mise-à-jour du 28/9/2021 Sur Facebook, une amie s’étonnait d’avoir été elle aussi considérée comme possible troll-de-bourrage-d’urnes. Elle ajoute : « l’écologie ce n’est pas que trier ses déchets et réduire les émissions de gaz à effet de serre, pour moi c’est une forme d’attention aux choses et aux êtres qui se situe aussi au niveau des rapports sociaux. je suis atterrée du peu d’intelligence relationnelle dont ils ont fait preuve ».