Profitez-en, après celui là c'est fini

Des mémoires (encore !), et des références que l’on y trouve

juillet 4th, 2011 Posted in Après-cours, Mémoires

(attention, texte un chouia polémique et pieds-dans-le-plat)

Je râle régulièrement en lisant les mémoires de Master 2 que je suis amené à évaluer à l’université. Certains sont très bons, mais beaucoup ne le sont pas et il arrive même que l’on ait à lire des mémoires véritablement scandaleux et ne contenant pas trois mots qui appartiennent réellement à leurs auteurs. Pour la session de juin, j’ai eu une bonne surprise, la grande majorité des mémoires n’étaient pas constitués de copier-coller, et en fait je n’en ai trouvé qu’un seul dans ce cas, qui n’était même pas un Master mais un « projet tutoré » (qui clôt le premier cycle), dont les phrases avaient un vocabulaire trop pompeux et une grammaire trop exacte pour être vraiment honnêtes. J’y suis allé au bluff, ou plutôt d’instinct, et sans vérifier auparavant, j’ai fait une démonstration à l’étudiant de la grossièreté de ses emprunts : j’ai ouvert une page au hasard, pris une phrase au hasard et j’en ai tapé cinq ou six mots, pas plus, dans Google. Aussitôt est apparu le reste de son texte, trouvé sur un site quelconque, donc. Mais en dehors de ce cas qui a eu la note qu’il méritait, ça ne s’est pas passé comme ça. Est-ce que les avertissements ont porté ? Est-ce que les étudiants apprennent au moins à paraphraser les textes dont ils s’inspirent ? Après tout ce serait déjà un bon début.
J’ai même remarqué, cette année, quelques mémoires qui, à défaut d’être véritablement publiables (ce qu’on ne demande pas à un Master), avaient des thèmes franchement originaux, personnels et « habités » comme on dit. Des mémoires qui ne donnent pas au lecteur l’impression d’avoir perdu bêtement une heure ou deux ou même trois (car certains sont très longs, et pas toujours les meilleurs).

Des mémoires de Master 2 assez typiques : au format A4, reliés avec une baguette à anneaux en plastique, souvent recouverts d'une feuille de rhodoid, rédigés en Times New Roman ou en Arial.

Depuis quelques années, les étudiants en école d’art sont eux aussi astreints à produire un mémoire l’année du passage de leur DNSEP. Généralement il s’agit d’un texte plus court que le Master 2 des étudiants à l’université, et il vient en soutien du projet plastique qui a occupé les étudiants pendant l’année. Ce mémoire a été imposé aux écoles d’art dans le cadre du processus dit « de Bologne » qui, entre autres, harmonise les niveaux d’étude. Les étudiants en école d’art écrivent généralement peu pendant leur cursus (mais ça dépend des écoles), alors y être subitement astreints les inquiète et les fragilise beaucoup. En revanche, arrivés en cinquième année, ils ont (presque toujours) appris à affirmer leur travail et leurs orientations esthétiques, ils savent ce qu’ils veulent, et cela les aide énormément dans leur rédaction. Curieusement, et je sais que beaucoup d’universitaires ne me croiront pas, je trouve les mémoires produits en écoles d’art bien meilleurs, à tout point de vue. Formellement cohérents (notamment dans les département design graphique ou communication, bien sûr), souvent très personnels dans leur propos, ils ne sont jamais fainéants et en tout cas jamais coupables de la moindre imposture. Du moins aux écoles d’art du Havre et de Rennes, j’ignore comment les choses se déroulent ailleurs. La force des écoles d’art vis-à-vis de l’université, c’est que ces établissements sont des cocons douillets et familiaux où les étudiants sont suivis par quantité d’enseignants, alors qu’à l’université, les parcours peuvent être plus distants, parfois chaotiques, et il n’est pas rare qu’un directeur de Master ne prenne connaissance du mémoire que très peu de temps avant la soutenance, bien trop tard pour y apporter son expertise.

Je n'ai malheureusement pas de photographies de mémoires d'étudiants en DNSEP, excepté la couverture de celui-ci, soutenu l'an dernier par Farid Meghzifene, étudiant en design graphique à l'école supérieure d'art du Havre. On devrait m'envoyer d'autres images d'autres mémoires, je mettrai cette page à jour. Ici, on voit que le mémoire ressemble à un véritable petit livre, correctement relié, et doté d'un format allongé.

Tout ce que je raconte ici concerne ma discipline à l’université, les arts plastiques, notamment dans ma fac, qui se prête particulièrement bien à des résultats allant du plus brillant au plus navrant, du fait de la grande transversalité du domaine (philo/esthétique, histoire de l’art, critique, médiation artistique, pratique artistique, anthropologie, cultural studies,…) et d’une puissante culture de liberté et d’expérimentation. Je suppose que les études qui permettent de devenir notaire mettent un peu moins leurs étudiants en danger mais risquent aussi beaucoup moins de produire des formes ou des idées inédites. Par ailleurs, il ne faut pas croire que j’essaie de dire que les mémoires d’arts plastiques sont mauvais, on en trouve d’un niveau exceptionnel, qui, comme le dit Gwenola citée plus loin, approchent parfois de ce qu’on peut attendre d’une thèse. Inversement, si le niveau moyen des mémoires que j’ai lu en école d’art (et je ne parle que de mon échantillon non-représentatif de deux écoles, Rennes et le Havre, dans leurs départements communication visuelle ou design graphique) était bon, je dois admettre aussi que ces mémoires étaient plus souvent de longs exposés sur un sujet que de véritables travaux de recherche tel qu’on entend ce mot à l’université. Bien entendu, le mémoire universitaire est souvent plus fourni en nombre de pages, mais souvent aussi en volume de travail de recherches. Je dirais qu’un bon mémoire de Master 2, et il y en a, est certes moins beau à regarder, mais généralement plus intéressant à lire qu’un bon mémoire de DNSEP. En revanche, pour autant que je puisse en juger depuis mon petit bout de lorgnette, un mauvais mémoire de Master 2 peut être absolument lamentable tandis qu’un mauvais mémoire de DNSEP sera juste peu intéressant1.

Giovanni Colonna, "Mare historiarum", milieu XVe siècle

Ma collègue Gwenola Wagon proposait un jour d’organiser une session (travail d’enquête ? journée d’étude, colloque ?) autour des mémoires du niveau Master 2, que ce soit à l’université ou en école d’art, afin de les comparer, de regarder aussi ce qui se fait en école d’architecture, et peut-être de se mettre d’accord sur un niveau d’exigence commun ? L’organisation récente des diplômes d’école d’art a été imposée à ces établissements par un aréopage de fonctionnaires culturels et d’universitaires a priori bien intentionnés mais pas nécessairement connaisseurs du fonctionnement des écoles d’art et de leurs qualités propres. Dans les jurys de DNSEP, figurent cinq personnalités dont, obligatoirement, l’un est titulaire d’un doctorat d’université — ce qui aboutit à une amusante chasse au docteur dans les écoles d’art, toutes tentent de courtiser des maîtres de conférences et des professeurs des universités pour suivre la rédaction des mémoires — c’est une autre exigence liée à l’organisation actuelle des diplômes2.

Ironiquement, le diplôme équivalent à l’université n’est présenté qu’à un jury de trois personnes, dont sauf erreur, aucune n’est astreinte à avoir le titre docteur. On parle cependant en ce moment même dans certains départements d’imposer que les directeurs de Master soient docteurs : l’université rattraperait donc les écoles d’art sur les critères qu’elle leur a elle-même imposés. Amusant.

Ce qui se cite et ce qui ne se cite pas

Par pure coïncidence, j’ai eu connaissance cette année de deux mémoires qui faisaient chacun référence à Harry Potter. L’un était un Master 2 à Paris 8, pour lequel j’étais jury, et l’autre concernait une soutenance de DNSEP dans une école d’art que je ne connais pas. Pour un diplôme de niveau Bac+5, citer Harry Potter ne semble certes pas sérieux, mais tout dépend comment et pourquoi il est cité — il n’y a pas de mauvais sujet ou de mauvaises références a priori.
L’étudiante de l’université qui avait cité Harry Potter mentionnait en fait la cape d’invisibilité qu’utilise le jeune sorcier. Le mémoire, qui partait un peu dans tous les sens, traitait du monde invisible et des mystères, du chamanisme coréen, relié à la légende dorée des débuts de l’ère chrétienne3 mais aussi à la science contemporaine dans ce qu’elle a de plus déroutant. Ce genre de travail a tout pour me faire fuir, en méchant rationaliste que je suis, mais je l’ai trouvé cohérent, je l’ai plutôt apprécié et mes collègues, comme moi. Parmi les références citées, Harry Potter ne me semblait pas indispensable, mais j’ai été plus gêné par la mention, dans le même mémoire, de Anges et démons, de Dan Brown. C’est peut-être intellectuellement malhonnête de ma part du reste car je n’ai justement pas lu Anges et démons. Mais en même temps je conserve un souvenir épouvanté du Da Vinci code, par le même auteur, une sorte d’anti-Pendule de Foucault. Car le livre d’Umberto Eco est érudit, taquin et extraordinairement drôle, tandis que le Da Vinci Code se prend au sérieux et est aussi stupide que mal écrit.

Ce qui m’amène à me poser la question de ce qu’il est digne d’utiliser comme références et ce qui ne l’est pas. Souvent, j’en ai peur, l’auteur du texte a intérêt à s’assurer que les références dont il se sert appartiennent au champ culturel de ses interlocuteurs. Pour traiter de morale et de responsabilité, il serait peut-être plus pertinent de citer la série Buffy contre les vampires que de recourir aux notions développée par des philosophes ayant pignon sur rue, mais ça ne se fait pas (ceci dit, ce serait jugé moins scandaleux que de citer un philosophe télévisuel comme Bernard Henry-Lévy ou Luc Ferry à mon avis). Malheureusement, une référence banale passera presque toujours mieux qu’une référence personnelle sortie de derrière les fagots, y compris lorsque l’auteur de la citation n’a qu’une connaissance très superficielle des textes savants qu’il évoque. Ainsi chaque année, on nous sert du Roland Barthes, du Gérard Genette, du Walter Benjamin, du Michel Foucault, du Sigmund Freud, et, parfois, des auteurs qui ne sont pas toujours évidents à lire et à comprendre comme Ludwig Wittgenstein ou Gilles Deleuze. Pas de mauvais auteurs bien entendu, et il est en quelque sorte normal de connaître ses classiques, mais ces derniers sont cités dans des conditions que je trouve (bien que participant totalement à cette mécanique moi-même) un peu bizarre : il faut montrer patte-blanche, signer son appartenance au groupe, montrer qu’on en partage un certain nombre de valeurs et de références4.
Que penser lorsque cela se fait de manière artificielle, mécanique ou insincère ?

L’autre mention de Harry Potter que l’on m’a rapporté a provoqué un véritable phénomène de rejet. Il semble que l’étudiante concernée ait juste expliqué avoir appris à lire l’anglais avec Harry Potter et qu’une partie du jury s’en soit indignée. C’est amusant puisque les jeunes gens qui ont l’âge de passer ces examens de niveau Bac+5 sont souvent ceux qui ont grandi avec Harry Potter. On ne peut pas plus leur reprocher que l’on peut reprocher à leurs juges d’avoir regardé Zorro à la télévision dans leur enfance. Et Harry Potter est une œuvre nettement plus riche que Zorro. Je n’ai lu que le premier tome de Harry Potter (en Français), et à vrai dire cela ne m’a que modérément intéressé — j’avais vu le film, et celui-ci était suffisamment fidèle au récit pour me gâcher toute surprise — mais j’y trouve des thèmes passionnants, notamment l’idée de l’école et des études comme un sanctuaire, comme un bouclier contre la cruauté de la vie, ou entre autres thèmes forts, le rapport qui est fait entre la volonté de puissance et de contrôle d’une part, et la rêverie et l’imagination (la sorcellerie n’existe pas vraiment figurez-vous) d’autre part. En fait ce n’est sans doute pas mal du tout, Harry Potter. Il doit exister des succès infiniment moins mérités et il doit y avoir de bonnes raisons de le citer autrement qu’à titre de succès commercial et d’anecdote anthropologique.

De gauche à droite : Poe, Melville, Twain, Hemingway, Steinbeck. Pas de la vraie littérature ?

Je me demande quels livres en anglais les membres du jury courroucés par la mention du sorcier à lunettes auraient opposé à Harry Potter comme bonnes lectures pour apprendre la langue anglaise. Car en France on ne lit de toute façon pas de littérature anglophone. C’est un choix idéologique de l’éducation nationale qui remonte à très longtemps — je ne connais pas l’historique de ce choix mais je ne connais personne qui soit assez âgé pour avoir échappé à ses effets. Pour nos élites, traditionnellement latinistes et germanophones plus qu’anglophones, les américains et les anglais n’ont pas de littérature, leur langue est utilitaire et pauvre, elle ne sert qu’aux chansons et aux articles de presse. Fouillez votre mémoire : sauf extraordinaire prof qui aurait refusé de suivre le programme, vous n’avez étudié en cours d’anglais ni William Shakespeare, ni Jane Austen, ni Oscar Wilde, ni même Charles Dickens. Vous n’avez pas lu non plus Walt Whitman, Edgar Allan Poe, Herman Melville, Mark Twain, Scott Fitzgerald, Ernest Hemingway, Jack London ou John Steinbeck. Peut-être avez-vous lu l’un ou l’autre de ces auteurs dans le cadre scolaire, mais alors en cours de français, sous forme de traduction. Pourtant, ce serait facile d’étudier ces auteurs dans leur langue, considérant la forte tradition des textes courts dans la littérature américaine notamment. En cours d’anglais, vous avez sans doute étudié les Beatles et Bob Dylan, peut-être visionné quelques films, et plus tard des documents d’actualité plus ou moins intéressants, sans parler des inénarrables sketchs censés apprendre aux collégiens à se débrouiller dans la vie courante en terre anglophone malgré le handicap que représente un accent oxfordien et des tournures de phrases désuètes depuis des décennies.

Alors, qu’est-ce qui est le mieux ? Faire semblant qu’on a digéré Wittgenstein en copiant des textes trouvés sur Internet ou prendre le risque de se servir de ses références personnelles, même lorsqu’il s’agit d’une série télévisée grand public ou d’un blockbuster pour enfants ? Et d’ailleurs, qui a décrété que l’un excluait l’autre ? Et vaut-il mieux apprendre l’anglais dans Harry Potter ou faut-il préférer ne pas l’apprendre du tout ?
Pour finir, dois-je trouver une super chute pour conclure cet article ou pourrais-je m’en tirer avec une vague question rhétorique ?

  1. J’observe (sur un petit échantillon cependant) l’existence d’une distinction physique entre les deux types de mémoires : ceux qui sont produits dans les écoles d’art sont souvent encombrants, tandis que ceux qui sont produits à l’université pèsent terriblement lourd. Autre différence, le DNSEP marque, pour l’instant, la fin des études en école d’art, tandis que le Master 2 n’est souvent qu’une étape, une manière d’évaluer si une thèse est envisageable. []
  2. On pourrait parler aussi de la question, qui est liée, de l’invention d’un troisième cycle en école d’art, car pour l’instant aucune école d’art ne peut mener ses étudiants jusqu’au doctorat. Plusieurs pistes sont envisagées : cursus organisés dans les universités, partenariats avec des PhD, création de quelque chose qui s’appuierait sur le modèle des doctorats d’architecture,… []
  3. Saviez-vous que Saint-Denis, qui a marché six kilomètres sans tête, a une histoire extraordinairement comparable à celle du moine coréen Ichadon ? Eh bien maintenant vous le savez ! []
  4. Un jour, je prendrai le temps de lire Reproduction, de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, en plein dans le sujet, quoique cela fasse partie des livres qui m’inspirent plus pour ce que j’imagine qu’ils contiennent que pour ce qui s’y trouve effectivement : tant qu’on n’a pas lu le livre, on est libre d’y adhérer indépendamment des détails de son contenu, comme le petit Prince pour qui le plus beau mouton est celui qui est encore dans la boite. Cette pensée douteuse colle bien avec le sujet du paragraphe, non ? []
  1. 24 Responses to “Des mémoires (encore !), et des références que l’on y trouve”

  2. By padawan on Juil 4, 2011

    Salut ! Bon ma petite réaction à cet article. Pour tout dire je suis en M1 à Paris 3 en cinéma (recherche). Dans cette fac le niveau est vraiment très bon (les profs, les exigences, les thèmes traités), le M2 doit être soutenu devant l’ensemble des profs du département. Je pense que les profs voient de mieux en mieux les copies d’internet car il le pratique eux-mêmes et reconnaissent les réfs sur leur sujet. A vrai dire j’ai été agréablement surprise du niveau demandé. Du coup je défend ici l’université, en tout cas le département ciné de Paris 3 sur le sérieux du niveau master. Pour ce qui est des citations il existe qd même des textes canoniques qui faut connaitre, ensuite c’est davantage la façon d’insérer la citation dans son propre raisonnement qui fait la différence. L’originalité du raisonnement + la précision dans l’emploi et la citation des sources me semble un bon combo… Merci pour ton blog toujours passionnant sinon… Bonnes vacances !

  3. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @padawan : le nuveau de cinéma à Paris 3 est réputé. Mais comment arrivez-vous à soutenir un mémoire devant tout un département ? Chez nous ça serait matériellement impossible vu le nombre d’enseignant et le nombre de Masters qui sont soutenus. Les textes canoniques, quand un étudiant ne connaît pas, je trouve ça dommage, mais en même temps, n’est-ce pas du pur formatage, et des effets de mode ? Je suis toujours gêné par la place donnée à Freud que je considère comme un talentueux imposteur qui aurait dû être condamné pour exercice illégal de la médecine. À côté de ça il y a des gens vraiment intéressants comme Alfred Korzybski dont personne ne parle plus jamais… (nom choisi un peu au hasard).
    Tu as la sensation que je tape fort sur la fac ? Ce n’est pas vraiment le but en fait, mais je suis un peu étonné de la condescendance qui existe parfois à la fac envers les écoles d’art, d’où ce texte…

  4. By Julien on Juil 4, 2011

    il m’est bien entendu impossible de dire que je suis totalement d’accord avec cet article, en tant qu’étudiant d’école d’Arts.
    mais pour autant ce sont des questions qui me sont toujours venues en tête quand on me demandait de citer des références lors de bilans ou même juste lors d’une présentation de projet, et même simplement juste en regardant les étudiants d’années supérieures rédiger leur mémoire. d’autant plus que les connaissant parfois en extérieur, on sent bien que les références ne sont pas toujours abondantes ou même simplement variées.
    soit passer pour quelqu’un de pédant en sortant les bouquins de grands auteurs peu cités par la majorité des autres étudiants, sortir des références courantes de la culture populaire, ou bien être mentir et sortir des « para-références » à nos quelques pauvres références déjà acquises, en tapant parfois même la veille au soir sur Google les artistes ou auteurs relatifs à nos travaux (ou nos artistes précités).
    mais je comprends parfaitement le fait que nombre d’entre nous copient collent des éléments (parfois même des articles entiers) dans leur mémoire. le fait d’écrire n’est pas forcément une tâche aisée pour tout le monde, et c’est une chose que l’on a presque « désapprise » à faire durant ces 5 ans, étant sortis du cycle général.
    le souci étant aussi parfois qu’il est difficile (voire inutile) d’écrire nous-même une idée, qui a déjà été écrite et extrêmement bien formulée. au mieux cela ne donne qu’une vague copie mal exprimée et parfois beaucoup trop paraphrasée. je crois donc que si j’avais été prof, j’aurais mieux aimé lire un truc recopié mais au moins juste et correspondant aux idées de l’élève, qu’un texte sincère, mal dit, et handicapant cet élève.
    et pour revenir sur Harry Potter, il n’y a rien à blâmer je pense, tant que la comparaison ou la métaphore suit. d’autant que maintenant l’anglais sera enseignée même dès l’école primaire, et ils auront droit à des poèmes d’Edgar Allan Poe (s’ils ont de la chance) et des livres de Roald Dahl (voire du Charles Dickens) en fin de primaire.
    et encore, c’est sans compter sur le nombre de plus en plus conséquent de séries télévisées que les jeunes prennent de plus en plus plaisir à regarder en V.O. et se rendant compte de plus en plus tôt des sous-titres trop souvent bourrés de coquilles.

  5. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @Julien : merci de ton commentaire, mais permets-moi de réagir à : je crois donc que si j’avais été prof, j’aurais mieux aimé lire un truc recopié mais au moins juste et correspondant aux idées de l’élève, qu’un texte sincère, mal dit, et handicapant cet élève. La réponse est « oh que non ! ». Si j’ai envie de lire tel ou tel article d’un critique ou d’un théoricien, ce n’est certainement pas sous forme de pièces de puzzle mal digérées, et puis je te rappelle que ce qu’évaluent les enseignants, ce sont les écrits des étudiants, pas ceux d’autres personnes. Nous (profs) ne sommes pas des clients qui commandent un bon texte, on veut comprendre le cheminement intellectuel des étudiants et aider ces derniers à aller dans le bon sens. Donc il vaut mieux un texte mal écrit qu’un texte recopié. À vrai dire des étudiants m’ont déjà dit ce que tu dis là, et ça m’a toujours beaucoup étonné.

  6. By padawan on Juil 4, 2011

    ha oui j’ai oublié de dire. Tu as trop raison sur l’anglais. Je découvre seulement maintenant le plaisir de lire en anglais parce que ma biblio est en partie en anglais et je découvre bc de références culturelles américaines littéraires magnifiques, et bien sûr je n’en avais jamais entendu parler avant alors que c’est essentiel.

  7. By Guy on Juil 4, 2011

    En tant que « cobaye » de ce cette arrivée des mémoires en école d’Art je suis content de voir que quelques professeurs prennent la chose au sérieux (et non, ce n’est pas le cas de tous). Et pour avoir vu des collègues s’y casser les dents ou prendre la rédaction de leur propre mémoire comme une punition divine je suis étonné (dans le bon sens) de voir que la plupart s’en sont si bien sortis… d’ailleurs comment expliquer qu’une promo comme la notre pour ainsi dire complètement coupée de l’écrit pendant 4 ans et dénué de toute logique et méthodologie s’en soit dépatouillé ? Je ne me l’explique pas. Un miracle de noël sans doute.
    Néanmoins dans ma promo la forme prise par les mémoires (en tant qu’objet imprimable) était très décevante. En fait à part 2 ou 3 personnes la plupart se sont contentés de la combinaison classique A4-scoubidou en plastique-arial. J’imagine qu’au fur et à mesure des promos les formes deviendrons plus ambitieuses.
    Quand aux citations il est sans doute plus facile de faire référence à la culture non académique (?) voire populaire dans une école d’art (mon petit orgueil : avoir pu inviter Fantômas, Orson Welles, les yes men, Borges et Devautour sous le même toit) et il ne faut surtout pas s’en priver.
    En tout cas merci pour cet article, je le ferai passer !

  8. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @Guy : tu es en section art j’imagine ? Il est logique que les étudiants de comm/graphisme produisent des mémoires formellement réussis, car après tout, faire des livres, c’est leur métier. J’avoue que je n’ai pas jeté un &oeil; à ce que faisaient les étudiants de la section art.

  9. By Guy on Juil 4, 2011

    Tout à fait d’accord et j’aimerai bien pouvoir jeter un œil au mémoires des autre écoles (un petit site dédié ?). Mais bon c’est dommage surtout quand on sait que mon école à un atelier « édition livre d’artiste ».

  10. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @Guy : ah oui c’est idiot de ne pas essayer d’être cohérent du coup. Je ne sais pas quelle forme pourrait prendre une rencontre entre les mémoires de différentes écoles mais c’est quelque chose à faire

  11. By padawan on Juil 4, 2011

    Guy, Jean-no, pourriez vous donner des pistes pour éditer des mémoires sans scoubidou et page de garde en plastique. J’aimerais vraiment éditer sous une autre forme. Un petit livre, mais comment faire la reliure simplement ? (je ne voudrais pas non plus que la forme soit trop « ostentatoire » car ce n’est pas l’objet de nos études) et aussi quel logiciel utiliser du genre http://issuu.com/oubayda/docs/dossier_marc_o
    merci à vous !

  12. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @Padawan : le secret du graphisme c’est que quand tu ne sais pas exactement ce que tu fais, il faut que tu t’imposes une grille propre qui ne change pas sans raison… Il faut se tenir à un enrichissement typographique minimal (gras, italique, et en général, éviter le soulignement). Se tenir à un petit nombre de corps de typo, un très petit nombre de fontes (une pour les titres et une pour le corps du texte ça suffit)… Enfin voilà, ce sont les conseils d’un non graphiste un peu sensible au sujet malgré tout :-)
    Je dirais qu’il faut se forcer à suivre les règles qu’on se donne, être cohérent quoi.
    Pour le logiciel, tu cherches quelque chose pour publier en ligne ou juste pour la mise en page ?

  13. By padawan on Juil 4, 2011

    Un logiciel pour la mise en page avant impression (l’exemple donné existe imprimé et c’était assez parfait comme rendu). Mon obsession/ambition première est de ne pas faire une édition de type scoubidou en reliure. La reliure alternative c’est quoi, et comment on fait ? ;)

  14. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @padawan : pour la mise en page on utilise indesign ou quark xpress (alternative libre : Scribus, mais je ne sais pas s’il est aisé d’en tirer quelque chose). Seulement ces logiciels ont beaucoup de possibilités très tentantes qui peuvent faire tomber dans le kitsch :-)
    Pour commencer il faut utiliser un logiciel de texte pur et dur (openOffice ou word), sans mise en page – la mise en page c’est ensuite. Pour la reliure je trouve bien, au minimum, de faire un dos carré collé chez un copy-top (ou autres). Tu peux te renseigner sur les reliures chez ces gens… En tout cas, c’est bien de vouloir éviter la baguette plastique.

  15. By Guy on Juil 4, 2011

    @ Jean-no : Cela pourrais inspirer et motiver les élèves mais aussi donner une meilleur visibilité à des objets qui pour le moment on un public très restreint…

    @ padawan : écoute Jean-no, ce sont de bons conseils que j’aurai voulu qu’on me donne. J’utilise Scribus qui n’est pas si mal, plutôt simple à utiliser mais un peu poussif (me semble t-il) sur les documents très lourds. Et pour la reliure on peut aussi utiliser des agrafes (à la manière des magazines) ou tout simplement des spirales métalliques, plus discrètes.

  16. By gaby d on Juil 4, 2011

    I agree, it is always better to read HP or any other blockbuster (even Dan Brown) – as you wisely remark – in its original version, than not to read a single story…

    trying to boost French (university!) students to go for sources in other languages is a task all teachers should entail.

    bravo !

  17. By padawan on Juil 4, 2011

    merci pour vos réponses. Pour scribus je le testerai, j’ai lu qu’il gérait assez mal les notes, à essayer… (Nous on est très notes en bas de page en recherche…) ;) . Et pour la reliure je vais voir tout ça thanks les gars.

  18. By Jean-no on Juil 4, 2011

    @Parfois j’aime bien les notes en marge, mais ça ne fonctionne pas avec n’importe quel volume de notes…

  19. By jean-michel on Juil 4, 2011

    @Padawan: On peut aussi songer à la formule « livre à la demande » (lulu.com, blurb.com). À la condition de s’y prendre à l’avance —2 semaines avant le dépôt— les reliures sont d’une plutôt bonne facture pour un prix modique.

    @Jn: Peut-être les étudiants en écoles d’art ont-ils moins de complexes dès la rédaction de leur mémoire. Peut-être parcequ’ils devinent que l’on ne leur reprochera pas entre deux paragraphes une référence culturelle ‘populaire » inappropriée. Et par ailleurs pourquoi le serait-elle?

  20. By yann on Juil 5, 2011

    En passant… sur la question de la mise en forme du mémoire, je ne sais pas dans quel sens ça va aller, mais c’est un débat que j’ai eu à une époque dans une école de design en tant qu’intervenant, et il y avait toujours ceux qui défendaient une certaine originalité de la mise en forme (format, matières, reliures,…) et les autres (dont j’étais) qui défendaient la primauté du contenu, de l’expression d’une réflexion articulée et correctement rédigée. Dans la mesure où les diplômes combinent généralement d’un coté des travaux plastiques présentés et soumis à discussion et de l’autre le mémoire, il peut être important que ce mémoire soit réellement autre chose que les travaux eux-mêmes ou simplement des images commentées des travaux plastiques et de leurs références, qu’il se détache alors complètement de la forme pour proposer une véritable réflexion théorique relative aux travaux plastiques. Bon, j’ai expérimenté ça moi-même dans le cadre d’un DNSEP Option Art en VAE et il faut avouer que sans la présentation des travaux, et avec le mémoire seulement, le jury n’aurait rien validé du tout :-) (Le contexte de la VAE est aussi sans doute particulier) (+ pour ceux que ça intéresse, ce mémoire est ici: http://www.yannleguennec.com )

  21. By Jean-no on Juil 5, 2011

    @yann : le fond contre la forme, vieux débat – et c’est un vrai problème de tous ces métiers qui consistent souvent à donner une forme séduisante à des conneries (quand ce n’est pas à des saloperies) -, mais en même temps un mémoire est plus lisible et plus compréhensible s’il profite d’un peu d’expertise (typo)graphique. Et puis séparer la forme et le fond, c’est bien beau mais c’est comme séparer le corps et l’esprit : on peut s’y faire croire mais il n’y a pas vraiment de fond sans forme ni d’esprit sans corps, les deux restent liés. Je veux dire qu’un mémoire moche n’est pas « hors graphisme », il est juste moche. Ce « moche » peut relever de la communication visuelle d’ailleurs, renvoyer l’image d’un travail austère, économe de ses effets, qui ne cherche pas à séduire facilement, etc., et donc qui affirme son rattachement à la tradition universitaire. Cela ne me semble pas vraiment admissible pour un DNSEP de graphisme par contre : cordonniers mal chaussés, oui, mais quand même pas au moment de produire son « chef d’oeuvre ». Par ailleurs, quand un vrai accord se fait entre forme et fond, eh, c’est le nirvana !
    Merci pour le lien vers ton mémoire.

  22. By Jefaispeuralafoule on Juil 5, 2011

    Je reviens ici après des mois d’absence, et c’est toujours aussi plaisant de lire des choses construites, intelligentes, et surtout débattues avec bon sens.

    Ce qui m’amène à réagir, c’est la partie concernant les références. Qu’elles soient littéraires, cinématographiques ou autres d’ailleurs, la référence, c’est une très personnelle, et bien souvent mal jugée par autrui. Je m’explique: nombre de lecteurs ici ont les références « web » nécessaires pour comprendre des choses comme « lol » ou bien « they kill Kenny! ». Est-ce de même pour les examinateurs? Je suis perplexe à ce sujet. Bien sûr, cela ne dévalorise pas l’examinateur en soi, sauf s’il estime (à tort ou à raison) que la dite référence est de « mauvaise qualité », ou pire que tout « hors sujet ».

    Que Harry Potter soit cité ne me dérange pas outre mesure, étant donné qu’il s’agit bien d’un jalon dans la littérature pour ado (tant par la masse des ventes que par la persistance du phénomène des années après la sortie du dernier tome). Ce qui est autrement plus dérangeant, c’est tant côté élève que côté professeur:
    – L’élève n’aurait-il pas pu placer une référence plus appropriée, ou simplement moins « populaire »?
    – Les examinateurs peuvent-ils décemment ignorer l’influence d’une telle popularité, et donc sa présence dans le propos d’un élève?

    Quand je parle de « populaire », je sous-entends un nivellement par le bas, à savoir un choix simpliste, dépourvu d’une profondeur supplémentaire. Harry Potter se laisse lire, aborde quelques sujets graves, mais nous sommes loin des philosophes classiques par exemple. A contrario, la culture populaire, c’est aussi Brassens, Brel, donc des poètes faisant echo au coeur de la rue, à monsieur tout le monde… et donc, au lecteur habituel de Harry Potter justement.

    Maintenant, référencer n’importe comment est saugrenu, tout comme avoir la prétention de placer des choses obscures et inutiles.
    « La culture, c’est comme la confiture: moins on en a, plus on l’étale »
    OU
    « La culture, c’est comme les parachutes: quand on en n’a pas, on s’écrase ».

  23. By berenice on Juil 5, 2011

    Je reviens sur plusieurs choses évoquées ici.

    – D’abord les références. Dans mon mémoire, j’ai eu l’occasion de citer un certain nombre de films et livres de SF, des bons, comme des moins bons. Je pense qu’une référence est bonne tant qu’on peut la défendre. Si on cite un grand philosophe sans avoir compris le contenu, ça ne sert pas à grand chose. Pour ma part j’ai privilégié ce que je maitrisais.

    – La mise en page : en design graphique on nous a tout de même obligé à avoir un objet graphique au final. Cela m’a même semblé plus important que le contenu. Il faudrait savoir vraiment ce qu’on attend d’un mémoire… une vraie réflexion, ou un nouvel exercice d’édition et mise en page. J’ai pensé que le contenu était plus important. On fait beaucoup (enfin, selon le choix des étudiants) de mise en page en design graphique et finalement peu de réflexion. Il me semble donc plus important dans un mémoire de primer l’écrit à la mise en page. Après je suis pas prof!

    – Jean-no, je t’envoie des photos de mon mémoire, j’en ai en réserve!

  24. By yal on Avr 18, 2016

    Salut a tous, je me permets de poster ici, cherchant des informations sur la VAE (DNSEP art). J’ai lu le mémoire présent en lien, il me semble que la demande a changé aujourd’hui et que c’est (de ce que j’ai compris) un dossier artistique qu’il faudrait présenter ? Si quelqu’un a l’info.ou des conseils
    Merci

  25. By Jean-no on Avr 19, 2016

    @yal : je ne suis pas spécialiste de la VAE, mais il me semble qu’il faut toujours les deux : un mémoire et une production artistique.

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