La presse électronique en 2001 (1968)
mars 26th, 2010 Posted in Interactivité au cinéma, publication électronique, VintageUn intéressant extrait de 2001 L’odyssée de l’espace, rédigé en 1965 et sorti en 1968, c’est à dire un an avant la naissance effective du réseau Internet — et un an avant le premier alunissage, mais c’est une autre histoire.
Lorsqu’il en eut assez des rapports officiels et des mémos, il brancha son minibloc d’information sur le circuit du vaisseau et parcourut les dernières nouvelles de la Terre. Il formait l’un après l’autre les numéros de code des principaux journaux électroniques du monde. Il connaissait par coeur la plupart et n’avait pas besoin de consulter la liste qui figurait au dos du bloc. En jouant sur la mémoire de la visionneuse, il pouvait consulter la première page et choisir rapidement les rubriques qui l’intéressaient. Chacune avait son propre numéro de référence et, lorsqu’il le formait, le rectangle qui avait les dimensions d’un timbre-poste s’agrandissait sur l’écran. La lecture achevée, il suffisait de revenir à la vision de la page entière et de choisir une autre rubrique.
Parfois, Floyd se demandait si le minibloc et la technologie fantastique qu’il supposait représentaient le sommet des découvertes humaines en matière de communications. Il se trouvait en plein espace, voyageant à des milliers de milles à l’heure et pourtant, en quelques fractions de seconde, il lui était possible de consulter n’importe quel journal. Le mot même de journal était une survivance anachronique en cet âge électronique. Le texte se modifiait automatiquement d’heure en heure. Même en ne lisant que la version anglaise on pouvait passer sa vie entière à absorber le flot sans cesse changeant des informations retransmises par satellite.
Il était difficile d’imaginer que le système pût être modifié ou amélioré. Pourtant, songea Floyd, tôt ou tard il disparaîtrait pour être remplacé par quelque chose qui renverrait les miniblocs au rang des presses de Gutemberg.
La lecture des journaux électroniques amenait souvent une autre réflexion : plus les moyens de diffusion se faisaient merveilleux, plus barbare, atterrant et choquant était leur contenu. Accidents, désastres, crimes, menaces de conflits, éditoriaux sinistres — tels semblaient être les sujets principaux des articles qui se propageaient dans l’espace. Floyd en venait parfois à se demander si tout cela était vraiment aussi terrible qu’il y semblait. Les informations d’Utopie, après tout, auraient sans doute été atrocement ennuyeuses.Arthur C. Clarke, 2001 L’odyssée de l’espace (1968) trad. Michel Demuth
Ce texte n’est évidemment qu’à moitié prophétique puisque son principe d’accès à l’information ne fait que reprendre des idées plus anciennes comme le Mundaneum de Paul Otlet et Henri La Fontaine (1934), le Memex de Vannevar Bush (1945) ou encore le projet Xanadu de Ted Nelson (1965). En revanche, l’évocation du dispositif de lecture, le minibloc, me semble plus originale puisqu’il s’agit apparemment d’un livre électronique tel que l’on en commercialise à présent.
Dans le film 2001, de Stanley Kubrick, réalisé en même temps que la rédaction du livre, on ne voit pas vraiment le minibloc. Le moment pendant lequel Floyd lit la presse sur le minibloc est remplacé par une séquence où, en transit dans une station spatiale, il s’arrête à une cabine de « Picturephone » pour converser en visio-conférence avec sa fille.
Bien plus tard dans le récit, on voit en revanche les astronautes Poole et Bowman qui regardent la chaîne de télévision BBC12 sur des écrans plats orientés « portrait », posés sur leur table. Leur disposition très précise et très symétrique ne permet pas de dire s’ils sont encastrés sur la table ou s’il s’agit de dispositifs mobiles façon « tablet pc ».
11 Responses to “La presse électronique en 2001 (1968)”
By sylvette on Mar 27, 2010
Putain merde quoi… Odyssée prend DEUX « s »…. Pfffff. Elle est belle l’université française.
By Jean-no on Mar 27, 2010
grmmmlll
By clanco on Mar 27, 2010
Du bon usage de
et , ici il aurait fallu un un del, sinon on ne comprend plus rien, ou que Sylvette dit n’importe quoi. Pas vu pas pris, mais pris soyons sportif !ff, jugulaire, jugulaire.
By Jean-no on Mar 27, 2010
Je n’ai jamais utilisé la balise del mais de toute façon je préfère laisser les gens croire que Sylvie a mal vu et qu’elle raconte n’importe quoi :-)
By clanco on Mar 27, 2010
Il fallait lire :
Du bon usage de <del> et <ins>
… du bon usage des caractères d’échappement, ils avaient de la chance en 68, il n’y avait que des pavés sous la plage et pas de chausse-trapes dans l’édition d’une simple remarque, une pancarte, un feutre, no future.
By Wood on Mar 28, 2010
Puisque tout le monde est parti dans les commentaires hors-sujet…
Je connais le type qui a conçu les fauteuils pour la scène qu’on voit sur la photo de gauche. Il enseignait le design à l’école des beaux-arts de Brest.
By Stéphane Deschamps on Mar 30, 2010
… et pour revenir dans le sujet : je me rappelle avoir vu ce « picturephone » en 1990 la première fois que j’ai vu 2001, et me dire qu’on ne verrait pas ça de notre vivant.
Et le progrès m’a donné tort, et n’importe qui avec l’ADSL en deux minutes s’ouvre un compte sur Skype et on cause en famille à distance.
Je ne sais pas quoi en tirer, sauf que parfois la réalité va aussi vite que la fiction. Ça me scie un peu.
By clanco on Mar 30, 2010
@Stéphane Deschamps
I apologize mais IMHO en 1990 vous ne deviez pas être totalement informé. Cest l’époque où nous faisions des smiley sur minitel et nos premiers ASCII art. Il me semble que j’étais alors plus ressemblant que mon actuel avatar facebook. En 90 l’herbe était plus verte, la réalité avait déjà tout son potentiel d’inertie.
By Stéphane Deschamps on Mar 31, 2010
Oui en 1990 on avait le Minitel. Mais rien de comparable quand même entre l’ASCII art et la vidéophonie…
By Jean-no on Mar 31, 2010
à vrai dire en 1990, le minitel avait dix ans (les premiers tests datent de 1980)… Et la visiophonie était encore plus ancienne, même s’il a fallu attendre le temps qu’on sait avant qu’elle devienne démocratique. Dans le monde de l’art, les artistes « télématiques » tels que Kit Galloway & Sherrie Rabinowitz (Electronic Cafe) ou encore Roy Ascott ont fait des expériences de visioconférence dès les années 1980, mais là encore c’était expérimental et loin d’avoir un rapport avec la visioconférence actuelle. Pour ma part, en arrivant sur Internet après 1995, j’ai entendu parler de CU-See me mais bon, je n’y croyais pas du tout : connexion trop lente, personne n’était équipé de webcams… je comprenais le potentiel mais je ne pensais pas que ça fonctionnerait vraiment un jour.
By Rama on Août 29, 2011
Je crois que ce sont bien des tablet PC : il y a d’autres moments du film où l’on voit cette même table et où les écrans n’y sont pas, c’est donc bien qu’ils sont portables.
Ensuite on peut s’amuser à comparer avec le design de ces tablettes avec celui du ThinkPad Tablet de Lenovo qui vient de sortir aux USA.