Archives mensuelles : décembre 2015

L’argent du café

Lorsque l’on a un peu bu, il est déconseillé de tweeter, de rédiger un statut Facebook ou d’envoyer un e-mail. Mais il faut que le romancier et essayiste Thomas Clerc sache que, lorsqu’on a un peu bu, il faut aussi éviter d’envoyer sa tribune de la semaine à Libération.
Son article du 25 décembre 2015, intitulé Attentats : que Starbucks paie l’addition, est presque drôle, mais aussi un peu triste.

Le Starbucks de la gare Saint-Lazare, décoré pour Halloween.

Le Starbucks de la gare Saint-Lazare, décoré pour Halloween.

Sans doute lecteur en diagonale du No Logo de Naomi Klein, l’auteur met d’abord en parallèle la tradition parisienne des cafés et des restaurants, effectivement victime directe des attentats du 13 novembre dernier, et celle des chaînes qui standardisent la restauration et la physionomie des villes : StarbucksMcDonald’s ou encore Costa. On peut réfléchir à la manière dont des multinationales font perdre leur caractère propre aux lieux, et aux questions d’identification que cela pose : sans doute qu’il est moins dépaysant qu’il y a trente ans de passer de Los Angeles à Paris et de Milan à Dubaï. Je ne saurais le dire, je voyage peu, mais d’autres qui voyagent le disent. Ce n’est pas de ça que l’auteur parle, il commence d’ailleurs par s’en prendre au public des Starbucks :

Prenons Starbucks, qui fait pousser des boutiques à la vitesse d’une acné juvénile, et qu’apprécient du reste des jeunes qui ne sont pas les mêmes que ceux qu’on a massacrés. Est-ce qu’Emmanuel Todd va nous expliquer quelle est la sociologie des pratiquants de Starbucks ? Moi, je ne m’appuie pas, contrairement à lui, sur des chiffres ; ce sont des sensations qui me dirigent. Et j’ai remarqué que les gens qui fréquentaient les Starbucks étaient d’une intelligence inférieure à la moyenne.

Hmmm… On commence donc par l’insulte : les gens qui fréquente Starbucks sont moins intelligents que la moyenne ! Ce genre de chose est un peu difficile à estimer scientifiquement (l’auteur nous explique d’ailleurs qu’il méprise les chiffres), mais il faudrait tout de même fournir quelques arguments.
Je peux en offrir un à l’auteur du papier : parfois, parce que c’est commode, parce que c’est ce qu’il reste pour s’asseoir dans ma gare, parce qu’il y a des prises pour le chargeur de ma tablette, parce que le wifi est correct, parce j’y trouve le goût du café moins aléatoire qu’ailleurs1, il m’arrive d’aller dans un café Starbucks.
Or à chaque fois, en cherchant sur l’écriteau combien va me coûter mon expresso, je me dis qu’il est un peu cher et je me trouve idiot d’avoir fait le queue là.
Mais bon, le prix des produits n’est pas l’argument donné par l’auteur pour juger de l’imbécillité de la clientèle. Ce qui lui fait dire qu’il faut être bête pour entrer dans un Starbucks Coffee, c’est que la société Starbucks ne paie pas d’impôts sur les sociétés.
Les gens ne sont pas toujours avertis du statut fiscal des enseignes où ils consomment, et Thomas Clerc le suppose lui-même

(…) lorsque j’endosse mon rôle de performeur occasionnel, c’est-à-dire lorsque je demande aux gens attablés aux terrasses d’un Starbucks s’ils savent que Starbucks les lèse, que Starbucks tue le café d’en face ou que Starbucks défigure la rue Montorgueil qui était autrefois une rue typique et qui est à présent une rue pittoresque-mondialisée, aucun des nombreux consommateurs ne semble s’intéresser à ce que je leur raconte.

Je suis peut-être idiot moi-même mais j’avoue que quand un « performeur occasionnel » vient m’expliquer que je défigure la rue Montorgueuil et lèse les impôts en m’asseyant dans un Starbucks, j’ai tendance à être un peu sur mes gardes, à vérifier s’il n’a pas un couteau dans les mains et s’il faut que je lui réponde poliment, s’il faut que je m’apprête à me défendre d’un fou-furieux ou s’il faut que je m’enfuie.
L’auteur invoque ensuite Sartre2 pour qualifier les gens qui ne font pas le lien entre boire un café et financer Daesh de gens «sans importance collective». Car, dit-il, «Boire un café, ce n’est pas juste boire un café», et le nerf de la guerre, c’est l’argent :

Pourquoi risquons-nous (ce «nous» ne me pose aucun problème) de perdre la bataille contre le terrorisme ? Parce que le nerf de la guerre, c’est l’argent. En France, l’Etat n’a plus d’argent, depuis la politique néolibérale des années 80 qui s’est ingéniée, sans grande résistance de la part des Français, à corroder tout le tissu social. L’Etat français ne peut pas concurrencer Daech, parce que Daech est financé par de richissimes Saoudiens, et parce que ses ressources propres sont taries par des sociétés richissimes comme Starbucks – c’est curieux ils arborent les mêmes couleurs vertes et blanches.

Certes, boire un café, ce n’est pas juste boire un café : c’est aussi profiter du labeur notoirement mal payé de gens qui habitent tous très loin de la rue Montorgueuil. Je me souviens de Félix Houphouët-Boigny, le père de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, qui faisait du café un symbole fort des iniquités nord-sud, en rappelant qu’on buvait une tasse de café à Paris pour plus cher que ce que ses producteurs africains vendaient cinq kilos de grains.
Mais ce n’est toujours pas de ça qu’il est question, l’auteur de l’article effectue un calcul complexe : puisque Starbucks ne paie pas d’impôts sur les sociétés, l’État français est pauvre et ne peut donc se battre contre Daesh.
Je ne suis pas spécialiste mais il me semble assez évident que l’organisation des attentats du 13 novembre n’a pas coûté très cher, et que le budget militaire de la France, quatrième pays au classement mondial des dépenses militaires3 est plus riche que Daesh.
Je pense aussi qu’il est faux de dire que Starbucks ne paie pas d’impôts : cette société reverse sans aucun doute à la France des millions d’euros de TVA chaque année4. Et ce n’est pas tout : je doute que Starbucks enfreigne la loi. Que cette société détourne ou contourne la loi, recoure à tous les dispositifs légaux (je pense à la « franchise », qui permet à une enseigne internationale d’être soumise au droit sur les PME) pour payer le moins d’impôts possible, profite de son statut de multinationale pour placer l’argent là où ça lui coûtera le moins cher, c’est probable, et sans doute moralement condamnable. Mais ce n’est pas illégal, ça s’appelle l’optimisation fiscale, et ça n’est ni mieux ni pire que les gens de sociétés bizarres qui m’appellent pour me proposer d’échapper à l’impôt sur le revenu en installant des panneaux solaires inefficaces sur mon toit5.
C’est pourquoi, dans sa démonstration, l’auteur de l’article a tort d’imaginer que la question de la fiscalité de Starbucks peut se régler en appliquant la loi :

(…) il faut dire à M. Olivier de Mendez, directeur général de Starbucks France : «Maintenant vous payez vos impôts ou nous fermons vos échoppes.» Bref, il faut faire un travail d’homme politique : y a-t-il encore ce genre d’homme-femme en France ? Au lieu de perdre son temps à vouloir déchoir de la nationalité française des gens qui se moquent bien de ce que signifie une nationalité, on peut au moins exiger des rentrées d’argent, juste appliquer la loi. Présenter l’addition à Starbucks. A combien s’élèvent les sommes impayées ? L’argent servira à équiper les services de renseignement, qui manquent d’hommes et de matériel. La police est obligée de mentir sur ses failles énormes, notamment dues à son sous-équipement. Surveiller des terroristes a son prix ; ne pouvoir le faire est hors de prix.

Il est probable que la loi soit appliquée, et si elle ne l’est pas, si Starbucks est dans l’illégalité, eh bien la solution est l’application de la loi et des règlements par les services fiscaux, et en aucun cas « faire un travail d’homme politique » (!?). Le « travail d’homme » (ou de femme, si on me demande mon avis) politique consiste à faire les lois, pas à les faire appliquer.

Pour finir, il est assez étonnant de penser que la lutte contre Daesh ne soit qu’une question de budget. Certes, il y a beaucoup d’argent dans la guerre, comme dans la communication qui l’entoure, mais l’argent de Daesh suffit-il pour « radicaliser » des jeunes gens qui ont grandi à Juvisy-sur-Orge ou à Molenbeek ? Même si tous les jeunes gens qui partent en Syrie ne sont pas issus de milieux défavorisés, ceux qui ont assassiné, chez nous, l’étaient souvent.
Et je remarque que Starbucks ou Macdonald’s, quoi qu’on pense de ces enseignes6, ont au moins pour vertu de donner des emplois à des jeunes des cités7. Et donner de l’emploi aux jeunes des cités, ou tout simplement leur dire qu’il existe des emplois qui ne leur sont pas inaccessibles, ne semble pas être la destination prioritaire de l’argent collecté par les impôts.

  1. C’est toute la puissance des chaînes standardisées : nous connaissons le rapport qualité/prix de leurs produits et de leur service. []
  2. Mais la citation s’avérera être de Louis-Ferdinand Céline ! []
  3. cf. Wikipédia. []
  4. Certes, comme on me le fait remarquer, cette TVA n’est pas offerte par Starbucks mais collectée par Starbucks, puisque c’est le client qui la paie. Mais il existe des sociétés qui trichent sur le versement de la TVA, en ne l’appliquant pas aux produits qu’ils vendent afin de pouvoir gagner plus d’argent tout en ayant les mêmes tarifs que la concurrence — certes, cela ne peut s’appliquer qu’à peu de produits. []
  5. Allez savoir, c’est peut-être aussi pour échapper à l’impôt que le milliardaire franco-israélien Patrick Drahi vit en Suisse. Ce discret et intéressant personnage est le propriétaire… du quotidien Libération. []
  6. L’odeur d’un restaurant Macdonald’s me donne des hauts-le-cœur, personnellement. []
  7. On remarque que le succès des enseignes multinationales ne vient pas que de leur côté « familier », il vient aussi du fait qu’elles ont l’air de s’adresser à tous les publics, on ne s’y fait pas prendre de haut selon son origine, ni en tant que client ni en tant qu’employé. Que par ailleurs les produits soient médiocres, la stratégie fourbe (tout le monde est exploité — client ou employé —, au profit d’une marque), etc., ne dispense pas de s’interroger sur ce point. []

Le ver de l’exception dans le fruit de la loi

Les lois qui concernent les sujets « chauds » et aptes à suscité une vive réaction émotionnelle — parce qu’ils suivent un fait-divers atroce ou un attentat — ne sont pas seulement mal avisées, elles ont un effet secondaire fréquemment observé, celui d’être le ver dans le fruit, apparemment bénin, mais destiné à s’étendre.
Lorsque le Fichier national automatisé des empreintes génétiques a été créé, en 1998, il était censé ne concerner que quelques dizaines de violeurs récidivistes. Comment pourrait-on refuser à la police des moyens supplémentaires pour enquêter sur ce genre de crime, qui révolte viscéralement chacun de nous ?
Peu à peu, le fichier s’est étendu à toutes sortes de crimes, mais aussi de simples délts : crimes contre l’humanité, meurtres, mais aussi vols, extorsions, etc. La dernière proposition d’extension, en 2013, concernait les infractions au code de la route et les délits financiers. Elle n’est pas passée. Un esprit soupçonneux se demanderait si c’est par hasard que les infractions au code de la route et les délits financiers ont été proposés en même temps : il n’y a aucun rapport entre les deux, mais en les proposant ensemble, on est sûr qu’ils seront abandonnés ensemble, et c’est comme ça qu’une malversation financière n’amène pas son auteur au fichage génétique, tandis que participer à une manifestation ou voler un bonbon le permet. Ça tombe bien pour les membres de la classe politique, qui sont plus souvent inquiétés pour des crimes en col blanc que pour des vols à l’étalage.
Enfin peu importe, le résultat est là : après quinze ans d’existence, le fichier des empreintes génétiques contient bientôt trois millions de personnes (2,6 millions de personnes en 2014).
Je comprends qu’on défende ce fichier, j’imagine qu’il aide beaucoup les enquêtes (plus que les caméras de surveillance, c’est certain), mais il faut retenir ce fait : ce à quoi sert ce fichier n’est pas ce pour quoi il a été créé, et ce schéma est courant, pensons par exemple aux lois d’exception concernant la cybercriminalité, d’abord destinées à répondre à la peur des réseaux pédopornographiques (dont l’importance et l’existence réelle ne sont jamais évalués et semble sans commune mesure avec l’importance qu’ils occupent dans l’imaginaire collectif), mais qui aujourd’hui va punir des délits d’expression, voire de curiosité1, et bien sûr de partage de fichiers et même de cyberactivisme.

Coton-tige Silver Spoon

Coton-tige (Silver Spoon, CC)

Les sujets qui heurtent et révoltent chacun de nous, comme le viol pédophile et les meurtres aveugles — en premier lieu les attentats terroristes —, sont souvent utilisés comme prétexte à des exceptions à la loi, exceptions qui seront ensuite tranquillement amenées à être étendues.
Aujourd’hui, le ver dans le fruit, c’est la déchéance de nationalité. Avec cette proposition consternante, le gouvernement introduit l’idée que la nationalité peut être une chose précaire, réversible, arbitraire. Aujourd’hui, cette proposition d’une possible déchéance de nationalité concerne une douzaine de jihadistes fous dont personne ne songerait à prendre la défense et dont on cherche apparemment à oublier qu’ils sont précisément français. Mais demain, la loi concernera tous les français disposant d’une double-nationalité, c’est à dire cinq pour cent de la population. Je connais beaucoup de gens concernés : les époux et épouses, qui ont demandé à être français puisque c’est ici qu’ils vivent, et ont voulu conserver leur nationalité d’origine, puisque c’était possible. C’est le cas, par exemple, de ma propre mère. Il y a le cas des enfants d’immigrés qui ont conservé le passeport du pays de leurs parents pour faire plaisir à ces derniers (je connais plusieurs marocains dans ce cas) ; dans ma génération, je connais des enfants d’algériens, mais aussi je crois d’espagnols ou de portugais,qui ont fait de leur double-nationalité une combine pour échapper à leur service militaire2 : en France ils étaient dispensés, et dans leur autre pays, ils étaient déserteurs. Ma femme songe à prendre une double-nationalité pour régler de bêtes problèmes de succession. Et je connais un artiste, Matthieu Laurette, qui s’est lancé dans une collection de passeports avec son Citizenship project, commissionné par le Ministère de la Culture français !
Affectives, pragmatiques, artistiques,… Il existe sans doute d’innombrables raisons de disposer d’une double-nationalité. Puisque l’État français ne l’empêche pas, pourquoi pas ?
La modification de la constitution qui est proposée introduit l’idée qu’il est suspect d’être français en même temps que d’avoir une autre nationalité. Elle laisse croire qu’être français est un privilège, qu’être non-français est une punition, qu’il existe des vrais français et des demi-français,… Quel que soit le sens dans lequel on tourne la question, rien ne justifie cette disposition qui, certes, pose bien trop de problèmes pratiques pour être autre chose que symbolique, mais qui justement, établit un symbole des plus fâcheux. Je n’arrive pas à comprendre s’il s’agit de malice ou de maladresse.

  1. Rappelons-nous du projet de Nicolas Sarkozy, réaffirmé cette année : « Pourquoi n’a-t-on d’ores et déjà pas mis en oeuvre le délit de consultation d’un site jihadiste? Lorsqu’on consulte des images de pédophilie, on est un pédophile. Lorsqu’on consulte des images d’un site jihadiste, on est un jihadiste, et on doit être traité comme tel » (meeting du 30 novembre 2015 à Rouen). []
  2. À de rarissimes exceptions, nous voulions tous échapper à la conscription : qui veut vraiment passer un an à se faire donner des ordres sans logique par des gens moins intelligents que soi ? Personnellement, j’ai préféré faire deux ans en tant qu’objecteur de conscience plutôt que de vivre un an dans une caserne. Aujourd’hui, je considère toujours que ce temps m’a été volé. []

Sauvez-vous, madame Taubira !

L’affaire est classique : quelqu’un a lancé une idée en l’air — la déchéance de nationalité des terroristes, en l’occurrence —, et au lieu d’y réfléchir entre ministres, conseillers et juristes pour conclure que c’était une mauvaise piste, le projet a été évoqué à voix haute et est devenu une affaire médiatique.
Puisque les français ne sont pas des flèches, et je pèse mes mots, beaucoup ont soutenu l’idée sans réfléchir à ce qu’elle signifiait en pratique : veut-on par là affirmer que la nationalité française d’une personne binationale est accessoire, honorifique, factice, et peut être retirée en claquant des doigts ? Voulons-nous nous faire croire que le terrorisme est forcément venu d’ailleurs, et ainsi éviter de nous poser les questions qu’il faut sur l’état de la France ? Entendons-nous avalider le sentiment que certains français nés en France, et qui ont grandi en France, ont de ne pas être des français à part entière ? Sommes-nous assez mauvais voisins pour laisser aux pays du Maghreb (de loin les premiers concernés par la binationalité) la charge de récupérer les créatures de Frankenstein qu’a fabriqué notre société ?
Je doute que la mesure satisfasse durablement quiconque : très vite, les gens vont comprendre ses contradictions et constater son inefficacité vis-à-vis du but recherché, et les effets secondaires néfastes qu’elle entraîne. En attendant, cette disposition aura été inscrite dans la constitution ! Je remarque que personne n’a proposé de retirer leur nationalité aux gens qui placent le gros de leur fortune dans des paradis fiscaux.

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Le véritable problème que tout cela pose, c’est celui de Christiane Taubira. Je l’avais entendue dire une fois dans une interview qu’elle se sentait plus utile comme ministre, disposant d’un certain pouvoir, plutôt qu’en restant à râler vertueusement, mais sans responsabilités ni moyen d’action. Et cette position est défendable : être aux affaires, être dans le monde réel, c’est certes se compromettre, ça implique forcément de faire des concessions, mais c’est aussi l’occasion d’agir véritablement. Il est bien commode et assez peu risqué de dire ce qu’on ferait si on en avait le pouvoir lorsque l’on en a aucun.
Depuis quelque temps, Christiane Taubira réalise l’exploit de n’avoir ni le beurre ni l’argent du beurre : on sait qu’elle désapprouve beaucoup les décisions du gouvernement — dont elle reste pour l’instant solidaire —, et il lui arrive parfois de le sous-entendre fortement, mais elle semble n’avoir plus aucune marge de manœuvre pour mettre ses convictions en pratique, du moins au niveau où nous pouvons l’apprécier. Hier, elle a dit clairement que le projet de déchéance de nationalité punitive était idiot et affirmé qu’il serait abandonné. Aujourd’hui, le projet est maintenu.

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J’aimerais qu’ils se trompent.

La haine dont l’accable la droite la plus pouacre prouve à quel point Christiane Taubira, elle, a de la dignité à revendre. Mais cela ne peut plus suffire. À moins qu’il y ait des choses que nous ne puissions pas connaître — nous, le public qui n’évolue pas entre les ors et le velours rouge du pouvoir républicain —, il semble que le pouvoir de Christiane Taubira au sein du gouvernement soit bien plus faible que celui de gens qui ne sont pourtant pas ministres : la famille Le Pen et Nicolas Sarkozy, notamment.
Si vous me lisez, madame Taubira, il est temps de fuir. Non pas pour faire plaisir aux Ciotti, Mariani, Dupont-Aignant, Philippot, Ménard et autres abrutis qui réclament votre démission et s’en feraient un trophée aussi pathétique que leurs personnes, mais juste pour vous, pour que ce que vous représentez — vous êtes une des rares personnes qui aient un peu de stature politique, de quel côté que l’on se tourne —, garde encore un peu de substance.
Ne démissionnez pas pour faire plaisir à ceux qui vous haïssent, sauvez-vous pour ceux qui vous apprécient.

PS : j’ai voté pour vous aux premier tour des présidentielles de 2002. Qu’est-ce que j’ai pris dans la figure à l’époque ! On m’a accusé, par ce vote, de faire le jeu du Front National. Dans le contexte actuel, je dois dire que je trouve ça assez ironique.

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L’ours polaire lêve la tête, dans une attitude sans doute conquérante, mais un niveau rouge le recouvre lentemet puis le submerge, accompagné d’indications de température : 1,5°, 1,6°, 1,7°, 1,8°, etc.

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Le message final est : « Agissons ensemble contre le réchauffement climatique ».

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L’annonceur est le World Wide Fund for nature, une ONG richissime qui cherche principalement à assurer la survie d’un groupe très select d’animaux sauvages, mais néanmoins nobles : dauphin, baleine, éléphant, tigre, rhinocéros, tortues, gorilles,…

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Ce sont les animaux que n’importe quel enfant reconnaît, mais souvent aussi, les animaux que l’on chasse. Les philantropes attachés au WWF sont souvent des têtes couronnées, qui sont justement aussi des grands amateurs de chasse, comme le roi Juan Carlos d’Espagne, président d’honneur du WWF en Espagne, ou le prince Charles, qui dirige l’aile britannique de la fondation.

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J’espère que le message envoyé par cette fondation n’est pas que les puissants de ce monde ont droit de vie (lorsqu’ils financent leur préservation) ou de mort (lorsqu’ils les chassent ou suppriment leur habitat) sur les espèces sauvages de notre planète. Enfin de leur planète, pas de la nôtre, cessons de nous mentir1.

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Sur le même panneau « Numériflash », l’opérateur téléphonique Orange nous félicite de prendre le train, réputé moins gourmand en énergies fossiles que l’automobile, mais nous rappelle que nos ordinateurs consomment de l’énergie, et que chacun de nos e-mails fait empirer le phénomène du réchauffement climatique.

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L’opération proposée par Orange est d’encourager les internautes à supprimer leurs e-mails inutles. On estime en effet que le stockage d’1Go d’e-mails pendant un an représente une consommation de 32kWH. Ce que ne dit pas cette publicité, c’est que chaque panneau Numériflash consomme environ 1000 watt.

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Je ne sais pas s’ils sont éteints aux heures de fermeture de la gare, mais ces panneaux sont en tout cas animés de 4:00 à 1:00, soit vingt-et-une heures par jour. Pour une campagne de deux semaines affichée sur quarante panneaux, si je ne me trompe pas dans mes calculs, nous avons donc 23x40x2, soit 1840kWh.
Une publicité contre le gaspillage qui gaspille de l’énergie : belle démonstration !

  1. Et bientôt, c’est même le reste de l’univers qui pourra avoir des propriétaires, cf. l’article Le jour où l’espace a cessé d’être un bien commun, sur le blog de Lionel Maurel. []